Les années RATIÉ 1985 – 1987

Le 4 septembre 1985, le Général Forget, commandant la FATac 1ère RA, remet le commandement de la BA 136 au Colonel Ratié. Il est le onzième commandant de la base. Cette cérémonie est l’occasion d’une remise de décorations et d’un défilé des troupes devant les autorités civiles et militaires.

Le colonel Ratié
Le colonel Ratié

Lorsqu’un nouveau ministre de la Défense est nommé, on lui présente l’armée de l’air. Une base aérienne est donc désignée pour la présentation et tous les moyens sont regroupés à cet endroit. J’ai souvenance d’une présentation où je me suis retrouvé à la fois, chauffeur, guide et porte serviette d’un général pour l’occasion…

Le 15 octobre 1985 le ministre de la défense, Monsieur Paul Quilès, vient se faire présenter l’armée de l’air sur Rosières. Accompagné du Général Capillon, chef d’état-major de l’armée de l’air, du Général Forget, commandant la FATac 1ère RA, des généraux commandant les FAS, le CAFDA et le COTAM, il assiste à plusieurs présentations statiques commentées par les différents grands commandeurs. 

_P.Quiles interviewant Ferrando devant Forget et Capillon
_P.Quiles interviewant Ferrando devant Forget et Capillon

Le Mirage 2000 N, le successeur des Mirage IV P, est présenté par le Général Guegen, sous-chef plan de l’état-major de l’armée de l’air. Peu après, un décollage massif de 18 appareils de la 11ème escadre, de la 33ème escadre de reconnaissance et de la 3ème escadre de chasse, s’effectue à partir du terrain. Il est suivi du décollage d’un Mirage IV équipé des fusées d’appoint de type “Jato”. Un Transall effectue par la suite un posé d’assaut, déchargeant un véhicule blindé devant les spectateurs avant de décoller à nouveau. Une conférence suit cette présentation en présence de la presse écrite et radiodiffusée. Un vin d’honneur clôture la manifestation. Les délégations représentatives du personnel de la base sont également reçues par le ministre avant son retour vers la capitale.

Le 16 octobre 1985, le lendemain de la visite du ministre, c’est au tour du chef d’état-major des armées, le Général Saulnier, de se rendre sur le site. Accompagné du chef d’état-major de l’armée de l’air et du commandant de la FATac 1ère RA, le chef d’état-major des armées se fait présenter la base et ses missions. Un exposé sur la guerre chimique effectué par le Général Millet précède la visite du PC enterré.

La visite des installations de l’escadron 03.011 permet de montrer le nouveau poste de commandement et son module d’accès aux abris collectifs. Les équipements de contremesures électroniques lui sont présentés au GERMaS CME. Le chef d’état-major des armées assiste à une démonstration de ravitaillement en vol d’un Jaguar par un Transall. 

Ravitaillement JAGUAR par un Transall
Ravitaillement JAGUAR par un Transall

Le Général Saulnier fera part de sa satisfaction en notant : “La rigueur, la compétence et la motivation dont chacun fait preuve dans l’exécution de ses tâches méritent d’être soulignées…”

On a beau être sur la base de Rosières, on ne connaît pas forcément ses voisins les plus près…c’est ce qui ressort d’un sondage effectué sur la base. Et pourtant, chacun travaille à la réussite des missions des unités aériennes. Mais voilà, il y a une sorte de guéguerre qui s’installe sur cette base entre ceux que l’on appelle “les opérationnels” et ceux que l’on surnomme “les territoriaux”.

Les “opérationnels”, vous l’avez deviné, ce sont ceux qui font partie des unités aériennes, des forces aériennes tactiques, et qui accomplissent les missions sur les théâtres d’opérations extérieures. Les “territoriaux”, ce sont les autres, ceux qui ne font partie des unités aériennes, donc de l’escadre, qui sont là, pour assurer le support et donner les moyens pour accomplir les missions. Alors que se passe-t-il ? De la jalousie ? Pas vraiment ! Mais les territoriaux ont un vague ressentiment d’être pris pour une quantité négligeable de la part des opérationnels. Ils sont, en fait, les travailleurs de l’ombre dont on ne parle jamais. Et pourtant, leur activité a une influence directe sur le bon déroulement de la mission. Alors, pour aplanir ces ressentiments, des visites sont organisées pour faire découvrir les unités.

Le 29 janvier 1986, le personnel civil de la base est convié à une visite des installations pour découvrir les unités présentes sur le site. Une quarantaine de personnes bénéficie de cette visite instructive…Puis c’est le tour des militaires, par entente directe entre les unités. Une excellente manière de régler le problème latent, en faisant toucher du doigt les problèmes de chacun et en exposant les façons de régler au mieux ces problèmes…

Le 5 février 1986, le médecin Général Delahaye, directeur du service de santé de la FATac 1ère RA, vient en visite sur le site. Accueilli par le Colonel Ratié et le médecin chef Dauba du service médical 50.136, il effectue le tour des installations et visite la station de traitement des eaux par l’ozone. Cette station a été installée suite aux analyses effectuées en 1979. Elle est l’aboutissement de longues et complexes études et tractations sur la potabilité chimique des eaux. Elle assure désormais une parfaite qualité de l’eau consommée sur le site, les teneurs en fer, manganèse et ammonium ne dépassent plus les normes admissibles.

Station de traitement des eaux
Station de traitement des eaux

Nous sommes le 19 février 1986, le Colonel Ratié, commandant la BA 136, donne le premier coup de pioche symbolique pour le futur bâtiment de piste de l’escadron 01.011. C’est le seul escadron qui n’a pas son bureau de piste…près de la piste…

Il fait un froid sévère comme il en existe dans notre Lorraine. Cette petite cérémonie regroupe madame Stéphan, chef du service local constructeur, le LCL Guevel commandant la 11ème escadre de chasse, le Commandant Pével, chef des Moyens Généraux, le Capitaine Schoenher, officier adjoint, et le Capitaine Stéfani, officier infrastructure.

Ce premier semestre 1986 est la période des visites et des inspections. Le 20 février 1986, le Général Bertin, directeur de l’infrastructure de l’air, se rend sur le site. En compagnie d’une vingtaine de personnes il procède à la réception des hangarettes de l’escadron 02.011. Au cours de cette journée le Général Bertin rencontre madame Stéphan du SLC. La visite des installations porte principalement sur les hangarettes de l’escadron 02.011 mais aussi sur le dépôt d’alerte où des travaux relatifs à l’armement guidé laser sont en cours. Après la réception des portes des hangarettes, le Général regagne Paris en fin d’après-midi. Ce que nous appelons “hangarettes” sont en fait des abris durcis pour les avions. Au départ, les marguerites des escadrons étaient nues, ne comportant aucune construction. Une campagne de protection des aéronefs a été décidée, au niveau de l’état-major, de manière à conserver le maximum d’avions en état de fonctionnement, suite à une attaque classique des installations. On ne protège pas un coup direct au but, mais les dégâts collatéraux. 

Escadron avec ses hangarettes
Escadron avec ses hangarettes

La hangarette est un abri en forme de demi-tonneau, construit en béton armé et équipé d’une porte coulissante sur rail. Cette porte, dont le poids avoisine les 140 tonnes, est capable de résister à une bombe de 400 kilogrammes éclatant à proximité. L’arrière de la hangarette est équipé d’un déflecteur de jet, permettant d’évacuer les effluves des réacteurs vers l’extérieur. Cette ouverture est équipée d’un panneau coulissant permettant de fermer le déflecteur. L’avion à l’intérieur est donc protégé des effets de souffle d’une bombe explosant à proximité, mais également des retombées radioactives et chimiques. La hangarette n’est pas étanche, le personnel chargé de mettre en œuvre les aéronefs en ambiance chimique ou nucléaire doit porter les protections nécessaires. 

L’aéronef est capable de démarrer à l’intérieur de la hangarette et de sortir vers la piste. Ce nouveau concept permet de conserver les avions sur le site et d’éviter le déploiement sur une autre plateforme (un déploiement dont le coût est devenu prohibitif eu égard aux conditions économiques). On distingue parfaitement sur la vue ci-dessus, les portes et le déflecteur arrière. 

L’équipement des escadrons se fera par tranches, selon le plan d’infrastructure. Des abris plus sommaires, appelés “astroarches”, seront installés à l’escadron 01.011 en attendant la notification des tranches correspondantes. Ce sont des demi-tonneaux ouverts à chaque extrémité. Ils ne protègent les avions que des intempéries. Le retrait du service de l’avion Jaguar et la dissolution des escadrons stopperont le plan d’équipement en hangarettes, notamment l’équipement de l’escadron 01.011.

Nous sommes au début de l’ère des audits. Une conception toute nouvelle au sein de l’armée de l’air qui se rapproche de plus en plus des errements en vigueur dans le civil. Le nouveau concept est simple : à travail égal, militaires et civils sont soumis aux mêmes lois. Les textes existants sont aménagés et il n’est pas rare de voir des commentaires explicatifs portés sur les documents qui sont transmis aux bases. Il y en a un qui m’a toujours amusé : “par directeur d’établissement lire : chef de corps ou commandant de base”    Ce qui a poussé certains, dont j’ai fait partie, je l’avoue maintenant, à dire par la suite : ” il faudra en parler au directeur de la caserne…” Un contrôle de gestion effectué par les différents services de l’administration centrale est mis sur pied. Les bases n’échappent pas à ces audits. Le 10 avril 1986, le Général Rolland, commissaire Général, inspecteur du commissariat et de l’administration de l’armée de l’air, vient inspecter la base de Rosières pendant cinq jours.

Le 17 avril 1986, la base de Rosières accueille le Général Solleau, chef de la mission militaire française des forces aériennes alliées centre Europe et le général Breckner, commandant les forces aériennes américaines en RFA. Le Général Breckner effectue ainsi un pèlerinage sur le site. En effet, il y a plus de 20 années, il était sur la base aérienne américaine et la visite permet de retrouver les locaux où il officiait à l’époque.

Le 18 avril 1986, le Général Forget, commandant la FATac 1ère RA inaugure les locaux rénovés de l’escadron 01.011. 

Forget inaugure le batiment du 1/11
Forget inaugure le bâtiment du 1/11

Il est le premier pilote à utiliser la nouvelle salle de briefing pour son vol sur Jaguar.

Nous avons vu que les escadrons effectuaient des échanges avec d’autres escadrons français ou étrangers. Cette idée a dû faire le tour des esprits des unités non navigantes car le 22 mai 1986, se déroule un échange entre les services administratifs de la base de Saint-Dizier et ceux de la base de Toul-Rosières. Une expérience assez originale…

Le 24 juin 1986, le Colonel Ratié, commandant la BA 136, procède à l’inauguration du centre émission de la BA 136. Après avoir manié la pince coupante pour couper la jarretière tricolore inaugurale, le commandant de la BA 136 remet une lettre de félicitations au Sergent-chef Bourquin de la STB 81.136, chef du centre émission et maître d’œuvre du chantier de rénovation qui a duré 9 mois. Etaient présents à cette cérémonie, madame Stéphan, chef du SLC, le Colonel Tricand de la goutte, commandant en second, les Lieutenant-colonel Frontel et Joucla, le Capitaine Brière et l’adjudant-chef Ory, représentant le Capitaine

Les bâtiments de Rosières datent des années 50, ces constructions nécessitent souvent des améliorations, voire des rénovations partielles ou totales en fonction de l’évolution des missions et des conditions de vie. Le mess des sous-officiers n’échappe pas à cette règle et le 1er Octobre 1986 le Colonel Ratié, commandant la BA 136, inaugure le nouveau mess des sous-officiers. Ce bâtiment a fait l’objet d’une rénovation quasi totale pour le confort de tous.

Le colonel Ratié inaugure le mess des sous-officiers
Le colonel Ratié inaugure le mess des sous-officiers

Afin de vérifier la capacité des bases aériennes à faire face à une éventuelle crise, celles-ci sont soumises fréquemment à ce que l’on appelle, dans le jargon militaire, une “évaluation tactique” (réduite à “évaltac” pour faire plus court) L’évaluation tactique de 1986 a permis de démontrer, encore une fois, la capacité de réaction du personnel. Voici l’anecdote qui s’est déroulée aux Moyens Généraux 40.136 (MGX 40.136) …

Pendant la période de vulnérabilité qui précède tout exercice, le chef des MGX 40.136 mène une campagne tambour battant pour assurer le desserrement des véhicules. On sait que les évaluateurs prennent un malin plaisir à simuler la destruction du matériel pour observer la réaction du personnel en situation critique. Pour cet exercice, le plan de desserrement prévoit la mise en place des moyens de transport dans des endroits divers et variés, on ne met pas tous les œufs dans le même panier. Ce plan n’est pas sans inconvénients, les chauffeurs cherchent sans cesse les véhicules. Un nouveau plan est donc mis en place, les véhicules sont regroupés vers la butte de tir. Les évaluateurs, qui se sont mis en quête des véhicules, tournent en rond pendant deux journées avant de trouver les véhicules, retournés au garage, par on ne sait quel miracle. L’enveloppe simulant la destruction massive des moyens de transport est donc donnée au chef du garage. Le chef des MGX apprend que 10 bus sont détruits et que l’évacuation du personnel ne peut plus se faire par ces moyens. Le déroulement de l’exercice semble compromis, du moins c’est ce qui ressort de l’analyse primaire de la situation. Celui des évaluateurs qui croyait que cet état de fait allait réduire le garage au désespoir était bien naïf. A Toul-Rosières on ne recule devant aucun sacrifice. Les camions, épargnés par les évaluateurs, sont rapidement transformés en transport de troupe et ceci à l’aide des bancs de la chapelle, bancs religieusement vissés sur les planchers, ce qui donne au garage une capacité d’emport de 500 places, bien supérieure à celle des 10 bus. Qui a dit que les militaires manquaient d’idées… Notre Padré, qui venait se recueillir, avant de soutenir le moral des troupes, n’en croit pas ses propres yeux et laisse échapper un juron peu ecclésiastique mais bien compréhensible. Doux Jésus ! On vient de lui emprunter, sans son approbation, les bancs de la chapelle… L’évacuation des troupes, en revanche, se déroule sans problème et les évaluateurs sont réduits à la conclusion suivante : A Rosières, il faudra aussi, à l’avenir, faire sauter la chapelle !

Psst ! Messieurs les évaluateurs : fictivement s’il vous plaît, pour la santé de notre Padré…

Souvenir de l'EVALTAC 1987
Souvenir de l’EVALTAC 1987

L’année 1987 débute avec son lot de visites, Toul-Rosières est la tête de lance de la force d’action rapide avec ses Jaguar présents sur tous les fronts. L’efficacité accrue des systèmes de défense sol-air rend les missions d’attaque de plus en plus périlleuses. Le Jaguar avec son système d’armes guidées laser est à la pointe du progrès. Le système embarqué de pod de désignation laser (PDL) permet à l’appareil d’évoluer hors de portée des batteries sol-air. La base de Rosières devient donc la vitrine de l’armée de l’air.

Un Jaguar équipé d'un POD ATLIS et d'un AS 30
Un Jaguar équipé d’un POD ATLIS et d’un AS 30

On visite la base et ses unités pour découvrir la capacité du Jaguar, l’armement guidé laser. On fait venir les clients potentiels à Rosières…cette base devient également une vitrine des industriels de l’armement, elle reçoit, aujourd’hui, des délégations étrangères qui seront, peut-être, les futurs clients de demain…

Le 3 avril 1987, le Général Urug, chef d’état-major général des armées turques est en visite sur la base. Accompagné du Général Pessidous, commandant la FATac 1ère RA, il visite le PC enterré et assiste à une présentation en vol du Mirage 2000 DA.

Le 8 avril 1987, le Général Oaks, commandant en chef de la zone sud de l’OTAN est en visite sur le site. 

Le général OAKS
Le général OAKS

Les missions d’appui au sol dévolues à la 11ème escadre de chasse favorisent les échanges avec nos camarades de l’armée de terre qui viennent découvrir les possibilités offertes par le système d’armes embarqué. 

Les 30, 31 mai et 1er juin 1987, le premier escadron du 6ème régiment de dragons séjourne sur la base. Le 5 mai 1987, c’est au tour du Général Preaud, commandant la 4ème division aéromobile et la 61ème DMT de venir en vsite. Le 7 juillet 1987, la base reçoit une délégation de 12 officiers de l’état-major Saoudiens. Ils sont invités à découvrir le système Crotale en action.

Le 6 juillet 1987, la piste est fermée pour permettre le changement du balisage de piste et des barrières d’arrêt. La première tranche des travaux d’entretien des chaussées aéronautiques comprenant 2 bretelles d’accès et un taxiway est mise en œuvre par le 15ème régiment du génie de l’air. Les travaux seront terminés pour le 18 août 1987. Malgré des conditions météorologiques peu favorables, la gigantesque machine qui déroule un tapis de béton uniforme à la cadence de 40 m3 /h est à l’œuvre chaque jour.

Scans du journal “Reflets” N° 101

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