Premier RED FLAG

COMPTE RENDU OFFICIEUX ET CHRONOLOGIOUE DES EVENEMENTS DU PREMIER RED FLAG 1981.

Composition du détachement.

Pilotes et officiers mécaniciens: Colonel H. Pissochet – FATac-1°RA – 3°bureau.

  • Lieutenant-colonel C. Mennessier – Commandant en second la 11 ° « EC »
  • Commandant P. Amarger – Commandant en second EC 02/11
  • Commandant P. Namer – Commandant en second EC 01/07
  • Capitaine C. Durand – Commandant d’Escadrille EC 01/03.
  • Capitaine M. Mandrille – Commandant d’Escadrille EC 03/l11.
  • Capitaine J. Michel – Commandant d’Escadrille EC 02/11.
  • Capitaine P. Magnan – Pilote EC 03/03.
  • Capitaine C. Bellaton – Pilote EC 03/11.
  • Capitaine P. Vinchon – Pilote EC 01/11.
  • Capitaine R. Ferrando – Pilote EC 04/11.
  • Capitaine R. Renard – Pilote EC 02/11.
  • Capitaine M. Vern – OAT EC 02/11.
  • Lieutenant G. Latour – OAT en second EC 03/11.

Avions: Jaguar A 35 – 101- 107 – Jaguar E 36

Les événements.

Mardi 17 mars : Mise en place du détachement à Istres. Briefing général du convoyage avec les équipages du C 135. Les incidents commencent : le capitaine Michel a oublié la clef de sa valise chez lui. Le capitaine Magnan (gentleman cambrioleur dans le civil) l’ouvre en 6mn avec un tire-bouchon. Pensée du jour : « En principe tant que je ne me suis pas mis en colère, il n’y a pas lieu de se mettre en colère ». (Colonel Pissochet). Commentaire : « On a de la marge »…

Mercredi 18 mars : Briefing météo ; situation à Gander : visi 400m, Plafond 200′, neige… Morosité générale.

Pensée du jour : « On ne sait pas où l’on va, mais on y va…. » (Colonel Pissochet)

Nous allons aux avions avec une pensée émue pour notre « spare » le capitaine Lang qui, lui, reste sur le parking avec ses bagages et ses dollars.

Décollage d’Istres à six heures. Arrivée à Lajes (Açores) après un convoyage sans histoire. Premier contact avec la nourriture américaine. On en rit encore…

Décollage de Lajes à 13 heures. Compte tenu de la météo à Gander, déroutement à Stépheneville (New foundland). Nous passons la nuit à « l’Holiday Inn » de Corner Brook situé à 80 km de Stépheneville, sous une tempête de neige. Découverte de la merveilleuse cuisine locale (langue de morue, rata de morue, morue en salade, etc.…)

Jeudi 19 mars : météo « fataquienne ». On y va… décollage de Stépheneville à 6h30. Arrivée à Wright Patterson AFB (Indiana). Brillante démonstration de procédure bosniaco-américaine par l’équipage du C 135. Accueil nul des Américains. Première colère du chef (il y en aura d’autres…)

Décollage de Wright Patterson. Tempête de neige. Arrivé à Nellis AFB (Nevada) à 18 heures.

Accueil chaleureux du « staff de Red Flag » et surtout de notre échelon précurseur le capitaine Durand et le lieutenant Latour, plus des mécaniciens… On oublie la fatigue en sirotant une bonne bière (la première d’une longue série…). Le colonel Pissochet nous fait les honneurs de Las Vegas. Festin en ville.

Vendredi 20 le samedi 21 mars : fatigue oubliée, nous partons pour un grand week-end. Cinq cow-boys à San Francisco, deux au grand canyon en voiture. Les autres essaieront d’y aller en avion. Mais dame MTO est capricieuse (QGO sur le grand canyon). Ils resteront à Las Vegas. Nos cinq premiers cow-boys essayent de passer les «  plus folles nuits de leur existence » à Berkeley. Mais le tuyau était crevé… un seul cri «  Ferrat au trou !!! ».

Dimanche 22 mars : retour à Nellis. Premier contact avec le major Bill Thomas, officier de l’USAF chargé de nous conseiller pendant la première semaine de familiarisation. Briefing sur la procédure IFR.

Entendu au briefing : Colonel Pissochet : « si je comprends bien, on est baisé… »

Major Thomas: « yes… very busy ».

Lundi 23 mars : première mission de familiarisation : navigation IFR FL 150. Angoisse des leaders avant de partir, sourire décontracté à l’arrivée… Le major Thomas est lâché place arrière. Le soir même il reçoit l’insigne FATAC de la façon la plus traditionnelle.

Mardi 24 mars : suite des missions IFR. We improve…

Mercredi 25 mars : on commence les missions IFR/VFR. Petit détour au grand canyon et on se jette avec volupté dans la TBA.

Soirée chaude à l’officer’s club. Les « dancing girls » sont très applaudies par le détachement Français.

Pensée américaine : « Je n’aime pas regarder les avions et les femmes nues, il faut que je les touche… «  (Tous des romantiques, ces américains).

Jeudi 26 mars ; suite des vols VFR. Le chef découvre le « glouton », jeu électronique qui le met en transe.

Vendredi 27 mars ; mission de familiarisation sur le « range ». On est heureux ; on vole bien ; on comprend l’américain ; le weekend est là…

Samedi 28 mars : journée de repos. Rodéo à Boulder City pour les fanas. Le soir repas au « Stardust » (le chef flambe à la pièce de cinq cts). Puis on découvre le « cow-boy Club », ambiance « country » très sympathique. On n’y viendra souvent par la suite.

Pensée du jour : « il n’y a que deux qualificatifs pour juger la cuisine américaine : comestible ou vénéneuse ».

Dimanche 29 mars : journée aux 1000 briefings.

  • Briefing général Red flag par le staff.
  • Briefing sur le pal par le colonel Pissochet pendant le repas, suivi d’une leçon extrêmement vivante de catéchisme par le même conférencier.
  • Visite d’un AWACS accompagné par le lieutenant John Parenteaux (français par ses parents, il est pour nous un ami qui nous rendra de nombreux services).

Lundi 30 mars : journée de familiarisation « range » pour tous les équipages. Premier « mass débrief» ou les points essentiels de l’exercice sont abordés.

Le captain « Bloody Mary » (gérante de O’Club) dans une tenue très sexy nous invite :

  • à ne pas toucher les « dancings girls »,
  • à ne surtout pas enlever leur « fasties » (mauvais jeu de mots pour marines) et termine par une mauvaise plaisanterie sur les pilotes français aussi rapides que des cow-boys. L’heure 30 restante n’est utilisée que pour aborder quelques points de détail.

Résultat : le lieutenant-colonel Mennessier perd son flegme britannique et boude le «  mass débrief » du soir.

Le colonel Pissochet se lance à fond dans la cuisine américaine (aller voir Louis de Funès dans « les grandes vacances » pour plus de détails).

Mardi 31 mars : première mission RED FLAG.

Le lieutenant-colonel Mennessier a retrouvé le sourire à l’issue de sa mission. Tout a baigné dans l’huile. Découverte des « Smokys Sam » : impressionnant le passage des lignes.

Excellents résultats face à la menace : un seul avion tiré en huit sorties.

Mission de l’après-midi : le capitaine Michel (leader) avorte son décollage et le commandant NAMER (député leader) abandonne la formation au bout de 15 minutes de navigation (lampe feu allumée). Les équipiers sont obligés de sortir la carte pour terminer son bien que mal la mission (well done capitaine Vinchon)

Mercredi 1er avril : mission le jour, mission la nuit.

Malgré l’heure tardive du mass débrief, les Français arrivent à temps au « vol de nuit » de l’Oclub et tiennent leur place avec succès.

Jeudi 2 avril : toutes les missions sont annulées cause MTO : le « range » est accroché.

Vendredi 3 avril : dit « vendredi noir ».

Après une journée commencée dans la béatitude (quatre jours de bonne mission, tout marche, tout baigne même le biplace…) la catastrophe arrive : les Jaguar auraient survolé la zone interdite (la box). Après plusieurs heures d’angoisse les choses semblent s’arranger. Il nous faut attendre lundi pour la restitution sur table traçante.

Malgré cet événement les souvenirs reviennent, le soir, pour fêter au mess, les 25 ans ( ??) du chef. Il reçoit pour cette occasion un véritable chapeau de cow-boy (Steton pour le connaisseur) une formidable galoche de Bloody Mary dont on parlera longtemps dans les ranchs. Le champagne, puis la bière coulent à flots.

Samedi 4 et dimanche 5 avril : enfin un vrai week-end ! Entier. Le groupe éclate et s’éclate dans toutes les directions : Los Angeles, San Francisco, grand canyon autre lieux de délices…

Lundi 6 avril : reprise des vols. On n’entend plus parler du vendredi noir. Les esprits se détendent. Le capitaine Renard et Ferrando participent à un exercice de survie. Soirée au cow-boy Club. Le lieutenant-colonel Mennessier fait une solide cabine d’anglais : il essaye des heures durant de prononcer correctement le mot bourbon : (bonbon, bobonne, boubin, badin, etc.…). Le commandant Namer et le capitaine Ferrando sont sauvagement agressés par une vieille qui ne leur voulait pas que du bien. Débriefing : « c’était horrible, elle avait des yeux de rattle snake ».

Mardi 7 avril : mass brief de la veille un « agresseur » se permet une remarque ironique sur le « poor out looking of the french »… colère du chef débriefing de l’avorton « First I came in Nellis with four Jaguar and I’ll come-back with four »

« seconde. Putain I disagree !! Etc… ». L’agresseur mettra plus d’un quart d’heure pour se repeigner. Suite à ce problème les Français se rebiffent et ramènent sur la pellicule deux photos d’agresseurs. Ovation au mass débrief. Notre cote monte.

Mercredi 8 avril : on baigne dans le bonheur. Un agresseur vient faire amende honorable. Nous avons trouvé ce matin sur notre tableau : «I tried to chase you in the free fire zone… » Ric Cazessus 64 TWS Agressor.

Explication. La semaine précédente, il avait déjà utilisé cette tactique d’interception dans la zone des SAM, et nous nous étions étonnés. La preuve est maintenant faite qu’elle peut être dangereuse… que nous n’avions pas tout à fait tort. Visite du général de brigade aérienne Lauzeral, attaché militaire à Washington. Présentation du détachement devant les Jaguar. Pot au champagne.

Jeudi 9 avril : on a failli s’homologuer 2F4 à la bombe freinée d’exercice. On ne saura jamais ce que faisaient ces deux « kamikazes » sur notre objectif car ils se sont bien gardés de se manifester…

Quelques-uns d’entre nous, parmi les plus fringants rendent visite au cours de français de l’université du Nevada. Excellent accueil chez un professeur- croupier …

Vendredi l0 avril : Un seul vol ce jour.

L’après-midi est réservée aux bagages, derniers achats et libations.

Mise en place du pot final. Nos amis américains nous font une démonstration de rapidité : ils liquident 110 bouteilles de champagne en moins d’une heure. Saluons l’exploit. Remise de cadeaux et discours suivent…

Dernière soirée à Las Vegas. Adieux émouvants aux américaines…

Samedi 11 avril : Las Vegas, c’est fini, mais l’épopée continue.

Les pilotes des 4 Jaguars préparent le départ.

Les autres se trainent vers le C135. Les Ray-Ban cachent des yeux souvent bouffis.

Après avoir casé, non sans peine les dernières valises dans le Boeing, on décolle à 12h00 vers la Floride. Arrivée à Eglin AFB à 17h00 loc.

Accueil (??) chaleureux par un caporal chauffeur à moitié saoul. Visiblement on ne nous attendait pas. A nous de nous débrouiller pour manger et dormir. Ire du chef. Seule aide appréciable et appréciée : les 2 serveuses françaises du mess officiers.

Dimanche l2 avril : Tentative de départ pour pointe à pitre.

Un des réacteurs du Lcl Mennessier crache ses dents sur le parking (mettant le leu à une pelouse par ailleurs). En moins de deux heures nos valeureux mécaniciens changent le moteur et l’avion est prêt à repartir. Voyage sans autre incident.

Atterrissage de nuit à Pointe à Pitre. Le chef fait un gigantesque « boum » dans la joie de retrouver le sol français. Au roulage on peut entendre sur la fréquence :

« Maquis 01 vous souhaite la bienvenue ».

Car le général Forget est venu nous rejoindre aux Antilles pour faire le retour avec nous. Après moult ordres et contre ordres, nous pouvons savourer un sommeil bien mérité. Rêvant de plages de sable fin, de cocotiers et de belles filles bronzées.

Lundi 13 En guise de farniente, c’est un appui feu au profit de nos camarades de l’armée de terre qui nous est offert. L’exercice « Moustique » peut commencer : il y en a pour tout le monde (OGT, surveillant des vols, etc…).

Heureusement le soir, un délicieux repas antillais nous remonter le moral.

Mardi l4 avril : Une patrouille le matin pour Fort de France.

Le Lcl Menessier et le Cne Mandrille s’y posent pour présenter le Jaguar.

Quelques privilégiés réussissent à aller faire trempette du côté de l’hôtel Arawak. L’après-midi est consacré aux bagages. Le soir, cocktail chez le gouverneur militaire de la Guadeloupe.

Mercredi l5 avril : Lever 3h00 locales pour l’étape la plus longue : Pointe à Pitre – Mac Dill AFB dans un premier temps. A Mac Dill, l’accueil est bon (peut être suite à certains messages envoyés à nos ambassades).

Après le repas, nous enfilons « babygros » et combinaisons étanches sous un soleil de plomb. On mijote.

Départ pour Gander ou ailleurs car la MTO là-bas est incertaine. Voyage sans histoire. Atterrissage également car la MTO n’était pas aussi mauvaise que le croyait la météorologie.

Au cours du repas du soir nous remettons un souvenir Red Flag au général Forget.

Jeudi l6 avril : Faux départ.

Le Boeing décolle. Pas les Jaguars. Stall sur un réacteur de l’avion du Cdt Amarger.

Le départ est reporté au lendemain.

Vendredi 17 avril : Après moult cogitations des chefs, il est décidé de faire les deux dernières étapes dans la journée, contrairement au planning.

Lever 3h00 locales et décollage à 5h45 au point du jour.

Atterrissage à Gander. Restauration au mess. Redécollage à 14h00 locales direction la France.

Les Jaguars nous quittent travers Cazaux pour se poser à Toul. Le Boeing lui se pose à lstres.

A 21 h00 locales, tout est en place pour rapatrier hommes et matériel vers la douce FATAQUIE

Le général nous a accordé une semaine de récupération. L’épopée est terminée.

Ltt FERRANDO

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