Poursuite de l’objectif unique

Poursuite de l’objectif unique

Je ne sais pas si cet article va déclencher l’enthousiasme des foules, mais la 11EC constituant une des escadres de Chasse de l’Armée de l’Air, elle était de par ce fait soumise au “Règlement d’emploi et de manœuvre de l’aviation de chasse”. Ce règlement se présentait sous la forme d’un document cartonné vert (chasse of course) que chaque pilote consultait au moins une fois dans sa vie lors de la préparation de l’ECAG2 (Examen de Connaissances Aériennes Générales N°2) et qui était assez difficile d’accès, puisque conservé bien précieusement dans le coffre du commandant de chaque escadron. Il comprenait 150 pages environ qui traitaient du rôle et des missions de l’aviation de chasse, de ses moyens d’action, de son organisation et de son commandement, du contrôle et de l’exécution des missions et enfin des règles d’emploi de l’aviation de chasse. Celui que je vous propose aujourd’hui accessible en suivant le lien suivant “Règlement d’emploi et de manœuvre de l’aviation de chasse” (part1, part2, part3, part4, part5, part6) date de 1966… Pour ceux qui le liront, vous verrez que malgré ses presque 50 ans, beaucoup de choses sont encore applicables aujourd’hui pour une raison simple : ce n’est que du bon sens. Il aurait besoin d’être actualisé, mais à mon sens, la seule composante qui n’est pas vraiment prise en compte est la capacité à ravitailler ; mais en 1966 (date de parution), il y a à peine 3 ans que l’Armée de l’Air est équipée de ravitailleurs C135F réservés alors à la mission nucléaire. Ceci explique cela. Une des règles de l’emploi de l’aviation de Chasse qui revenait le plus souvent dans les discussions, briefing ou débriefing, était celle de “la poursuite de l’objectif unique” ; pour sûr, on en a parlée et on l’a mise un peu à toutes les sauces. Histoire de recadrer tout ça, je vous la propose ci-dessous. Bonne lecture. L’emploi de l’aviation de chasse est soumis, comme celui des autres armes, à certains principes directeurs permanents : liberté d’action et économie des forces qui, étroitement conjugués, permettent de réaliser la convergence des actions dans la poursuite d’un but final unique. Toute action militaire doit tendre à satisfaire aux conditions exprimées par ces principes dont l’application à l’aviation de chasse engendre les règles d’emploi suivantes :
  1. Poursuite d’un objectif unique;
  2. Esprit d’offensive
  3. Surprise
  4. Concentration
  5. Coopération
  6. Mobilité
  7. Économie
  8. Sûreté
  9. Simplicité
Cet énoncé appelle les remarques suivantes : ces règles sont applicables à tous les échelons d’exécution d’une opération de quelque envergure qu’elle soit. Leur importance relative varie selon l’échelon considéré; elles forment un tout indivisible et non pas une série de règles indépendantes : soit qu’elles découlent les unes des autres, soit, au contraire, qu’elles s’opposent deux à deux, leur incompatibilité étant alors destinée à se résoudre par voie de compromis; c’est dans l’élaboration de ces compromis qu’interviennent les qualités de jugement et l’intuition du chef. Le présent titre se propose de commenter les règles d’emploi de l’aviation de chasse.  

1. POURSUITE D’UN OBJECTIF UNIQUE.

  1. Objet.
Assurer la continuité d’action requise pour le succès d’opérations d’ensemble.
  1. Application particulière à l’aviation de chasse.
La souplesse d’emploi propre à l’aviation de chasse risque de s’exercer aux dépens de cette continuité d’action et d’entraîner le commandement à disperser ses moyens dans l’exécution de missions de détail. La souplesse d’emploi de l’aviation de chasse concourt à la conquête et au maintien de la liberté d’action aérienne et de l’initiative des opérations. La continuité d’action est la garantie du succès final. Conséquences.
  1. Au stade du commandement :
  • garder le souci constant de l’action principale
  • rechercher constamment l’équilibre suffisant entre la liberté d’action nécessaire aux opérations et la poursuite de l’action principale;
  • combiner les opérations et fixer les priorités en fonction de cet équilibre.
1.3.2. Au stade de l’exécution :
  • s’efforcer d’atteindre le but fixé par la mission sans s’en laisser distraire par les circonstances du moment.