Être chasseur bombardier aujourd’hui (1983). Partie 1/2 : le pilote

Être chasseur bombardier aujourd’hui (1983) : Partie 1/2 : le pilote

Cet article que je vous propose en deux parties a été écrit par le Capitaine Michel CROCI dont nous avons récemment commémoré l’anniversaire de sa mort, survenue aux commandes de son JAGUAR lors d’une mission dans la région de Torodum au Tchad. Ce même article a été publié dans le numéro 56 d’AIRFAN en Juin 1983 et repris dans la plaquette éditée pour célébrer les 20 ans du JAGUAR. J’en profite pour remercier Patrick MORVAN qui a eu la gentillesse de scanner la plaquette et de me la faire parvenir.

Michel CROCI évoque la vie d’un pilote de chasse “bombe” (comme disent nos amis Belges) ; il faut prendre en compte que ça a été écrit il y a maintenant 30 ans, que les choses ont changé, mais que pour moi les fondamentaux sont toujours les mêmes. Pour les anciens, l’article vous rappellera bien des choses et pour les plus jeunes vous pourrez comparez avec ce qui se fait aujourd’hui. Bonne lecture.

JAG vue cockpit
Pilote de chasse sur JAGUAR

Le paysage défile très vite à 25O m/seconde et à environ 200 pieds d’altitude. Les détails s’estompent : une route, une rivière, un coin de forêt … à peine entrevu le repère est déjà dépassé. Il faut regarder partout : devant, derrière, sur les côtés, en bas, en haut car la chasse ennemie est active dans le secteur sans compter tous les missiles sol/air et la DCA légère équipant les troupes au sol.

Le chronomètre défile : 3O secondes… 2O secondes… voilà le point de repère choisi lors de la préparation de la mission. Top verticale. Maintenant il faut tenir le cap. Encore une colline à passer et apparaît, là-bas au fond de la vallée, une usine. L’objectif qu’il faut détruire. Encore quelques secondes pendant lesquelles les pilotes stabilisent l’épée  (repère du viseur) sur l’objectif. Dès le tir effectué, libérés de leur charge, les post combustion allumées, les avions basculent et rejoignent très vite la proximité du sol alors que se déchaîne toute l’artillerie sol/air des environs. Tout est réflexe, instinctif, chaque fraction de seconde compte. Il n’est plus question de regarder dans la cabine pour voir si ” la bille est au milieu “. Tout ce qui a été acquis à l’entraînement, parfois pendant des heures, va décider ici, en un instant de la réussite ou de l’échec de la mission. Utopie !  Non, simplement une possibilité mais peut-être que dans la réalité cela ne sera pas aussi facile et tous les pilotes de chasseur-bombardier en sont parfaitement conscients. Aussi l’entraînement n’est-il pas un vain mot, tous s’y adonnent avec ferveur et n’espèrent qu’une seule chose: être à la hauteur mais ne pas avoir à le démontrer. Au fait, quel est le travail d’un pilote de chasseur bombardier ? Que fait-il donc cet inconnu pendant toute sa carrière, comment est-il fait et où peut-on le trouver ? Vous en avez sûrement croisé dans la rue, mais vous ne l’avez pas reconnu parce que finalement c’est un homme comme tout le monde qui aime son métier, y sacrifie beaucoup de choses et de temps mais ne voudrait pour rien au monde en changer. Prenons un jeune pilote sortant d’école et arrivant dans un escadron de chasse pour la première fois. Appelons-le : Jean. Il vient de passer un bon nombre de mois pour emmagasiner le contenu de nombreux bouquins et effectuer environ 3OO heures de vol. Il a appris à piloter un avion sans avoir ” le nez dans la cabine “, faire un peu de voltige, poser un avion de nuit, voler aux instruments dans les nuages (VSV), tenir sa place en patrouille serrée, naviguer en haute altitude (HA) et en très basse altitude (TBA). Il a également touché du doigt la formation de combat et fait ” parler la poudre ” en Air/Air et Air/Sol. Maintenant notre ami Jean connaît aussi son avion d’armes (tout au moins en théorie) puisque la transformation initiale se fait dans un escadron spécialisé.

Un beau matin, l’allure fière et avantageuse, coupe de cheveux réglementaire et en grand uniforme, notre jeune premier débarque dans SON ESCADRON. Au secrétariat, il dépose ses pièces matricules et demande à être reçu par le commandant, un peu surpris malgré tout par les bribes de conversation qu’il peut entendre çà et là et qui tendraient à prouver que le chef serait plutôt “vache “, son second ” pas terrible “, la mécanique “peu sûre ” et que l’escadron tiendrait ses traditions d’un établissement réputé de Cayenne et non des Glorieux Anciens qui firent la Grande Guerre. Jean commence à se poser des questions : tout ce qu’il peut entendre ” par hasard ” le laisse très perplexe. Le chef étant très occupé, il a le temps de méditer. Enfin, il est introduit dans le sanctuaire: présentation réglementaire, un mot de bienvenue du patron qui lui pose une ou deux questions anodines :

– Faites -vous de la planche à voile ?

– Oui, mon Commandant.

– C’est pour cela que vous avez demandé à être muté dans MON ESCADRON ?

AIREX 1984
Accueil qui pouvait être réservé aux jeunes pilotes arrivant en escadron. On est en plein exercice à Toul au début du printemps.

– Euh … ben, non… mon Commandant.

Et la machine est lancée. Notre homme si fier tout à l’heure courbe l’échiné sous la vindicte supérieurement hiérarchique et se voit accablé de tous les maux de la terre et du ciel.

Il se retrouve dans le couloir ne sachant plus que penser. Joie ! Voilà un pilote sympa, vieux militaire qui se propose de lui faire l’honneur de cette p…. de boîte où l’on ne sait pas rire (ça, il s’en est aperçu !) et où l’on est plus souvent en déplacement ou de service qu’à la maison (grimace de la fiancée). Jean croise des gens ” très occupés “au regard condescendant, soupçonneux, voire un peu louche. Voilà même un soldat du contingent, râleur à souhait et un vieil adjudant-chef mécano qui refuse de dépanner un avion parce que les pilotes ne veulent pas l’aider à ” tomber ” un réacteur. Où va-t-on ? Là, le doute s’insinue dans l’esprit de notre jeune chevalier du ciel. Et si tout était faux. Oui bien sûr… Tout ou seulement un peu… Cruel dilemme qui restera ancré dans sa tête toute la journée. Ce lieutenant affable est-il ainsi d’ordinaire ? Ce commandant d’escadrille que tout le monde a l’air de détester, est-ce la vérité ? La visite faite dans les différents services de la mécanique n’apaisera pas ses tourments, au contraire. En prime, il se retrouve avec une chaussure peinte en rouge. Mais où est-ce arrivé ? Et cette poudre dans la casquette qui le blanchit généreusement lorsqu’il la met sur sa tête pour aller au bureau du colonel à qui il doit être présenté ? Même, et surtout, autour du pot de bienvenue traditionnel qui lui est offert après la fin du travail, Jean ne sait plus du tout s’il a envie d’être là,  d’être pilote ou garde barrière… qu’a-t-il fait pour mériter cela ?

cropped-Jaguar-neige-.jpg
Photo d’époque. Le A82 a moins de 50 heures de vol !

Après une nuit plus ou moins agitée, la deuxième journée commence plutôt mal. En effet, le soldat d’hier est maintenant lieutenant, le commandant est adjudant-chef mécano, le ” vieux mécano ” est commandant… Mais non, il ne rêve pas, tout le monde a le sourire et même le fou-rire avec la tête qu’il doit faire en ce moment. C’est mieux ainsi, tout est à sa place maintenant, le vrai travail peut commencer. Jean entre aussitôt en phase d’instruction (encore) et il va entamer sa progression de pilote de combat. Le pilotage pur, le vol sans visibilité, le vol de nuit sont maintenant des choses acquises qui se développeront et s’entretiendront au cours de tous ses vols à venir. L’aboutissement, le but de tout cet entraînement sera d’aller délivrer un armement donné sur un objectif donné avec le maximum de réussite et dans les meilleures conditions possibles. C’est là la finalité de toutes les missions d’assaut. Après un ou deux vols pour se familiariser avec son terrain et ceux des environs où il peut être dérouté en cas d’aggravation de la météo, il se retrouve très vite dans le vif du sujet. Il faut maintenant naviguer en très basse altitude ou en profil ” haut-bas-haut ” (HBH), à une altitude de 500 pieds (150 m) et une vitesse d’environ 400 kt (720 km/h ou 200 m/s) avec des repères de plus en plus petits. Il doit rester au plus près du trajet tracé sur la carte et respecter son ” timing ” à plus ou moins 10 secondes (minutage de la navigation). Les agglomérations, aéro-clubs, zones d’aérodromes, élevages divers, zones réglementées, interdites, dangereuses… sont autant de pièges qu’il faut éviter.

DIA-28-04-68-05
Le ravitaillement en vol : un exercice toujours délicat et jamais gagné d’avance.

La sécurité doit être en permanence un de ses soucis majeurs. C’est regarder continuellement dehors pour éviter une collision possible avec un autre aéronef; savoir faire demi-tour à temps quand la météo se dégrade; savoir résorber une panne mécanique en vol ou tout au moins adopter les bonnes mesures pour se poser en toute sécurité. Pour cela, il ne volera jamais seul pendant cette période. Il aura toujours ” sur le dos ” un leader qui contrôlera son travail en vol, lui annoncera des pannes fictives pour lui apprendre à bien réagir, le déroutera volontairement de son trajet pour lui  apprendre à naviguer en impromptu, sans préparation. Toujours accompagné, il va commencer l’apprentissage de l’attaque au sol. Cela commence par le tableau noir, puis sur une carte par le choix du meilleur axe d’attaque en fonction de l’objectif (pont, tunnel, gare, usine, écluse, aérodrome, etc…), du relief, du soleil, des points caractéristiques au sol et évidemment en fonction de l’armement (canon, roquette, bombe lisse ou freinée). Il faut aussi calculer les éléments de tir : vitesse, angle de piqué, distance de tir, hausse, éléments pour le calculateur de tir. En un mot : il apprend la mise en œuvre du système d’armes de son avion au sol et en vol. Toutes ses attaques seront enregistrées par la caméra de restitution qui filme au travers du viseur; le film sera visionné et ” débriefé ” avec le leader au retour de chaque mission. Notre jeune pilote apprend donc à se servir de son avion comme il doit être utilisé : UN VECTEUR POUR DÉLIVRER UN ARMEMENT SUR UN OBJECTIF. Il doit pouvoir analyser correctement les pannes mécaniques en vol, adopter les mesures prévues et au retour du vol, restituer ses ennuis à ” la Mécanique ” qui se chargera du dépannage. Parallèlement à toutes ces missions, il effectue des vols en équipier où on lui demandera seulement de tenir sa place, de ” mordre le coussin ” que ce soit en manœuvre basse altitude, en poursuite ou en mission de combat en moyenne altitude. Il va apprendre (encore et toujours) à connaître les marges de manœuvre de son avion et les limites à ne pas dépasser, soit en monoplace, soit en biplace, avec un ancien en place arrière. En solo, il effectuera seulement deux types de mission : la voltige et des vols d’entraînement au VSV (Vol Sans Visibilité). Il faut ajouter à tout- cela, le tir Air/Sol au canon, à la bombe et à la roquette. Les premières missions seront du tir fictif et après restitution des films pour contrôler la présentation sur les cibles, Jean va commencer le tir de munitions d’exercices (inertes) sur l’un des champs de tir réservés à cet effet. Chaque pilote fera régulièrement des tirs pendant toute sa carrière. Périodiquement, il fera une campagne de tir Air/Air. A cette occasion, tout l’escadron se déplace vers Cazaux ; la mission unique pendant cette période sera le tir. Notre pilote va donc se retrouver sur cette base qu’il connaît déjà pour y avoir séjourné au cours de sa progression. Il va effectuer du tir Air/Air sur panneau en ligne droite (la restitution se faisant au sol en comptant les trous faits par les obus colorés armant les avions) et sur cible acoustique (restitution instantanée) en virage d’abord et, plus tard, évolutive. A la fin de cette phase d’instruction, Jean va se voir décerner la licence de Pilote de combat opérationnel (PCO) après plusieurs tests en vol et au sol. Il est maintenant apte à effectuer, seul, la mission de son escadron : l’assaut conventionnel. Il va pouvoir faire des vols en solo : c’est un moment qui compte, surtout le premier vol où l’on part pour une ” Nav TBA “, un tir au sol ou même un ravitaillement en vol sans avoir un ancien derrière pour ” chouffer “. Oui, le ravitaillement en vol ; c’est en effet à ce moment-là que s’effectue la transformation à cette nouvelle technique. C’est là une discipline inconnue de Jean, sauf par ouï-dire auprès des anciens. Il va s’apercevoir que si la technique vient très vite et si le ravitaillement en vol est relativement aisé par beau temps, ce n’est jamais gagné d’avance. Il faut à chaque fois en être conscient, sous peine de faire une ” fausse-queue ” – et ce n’est là qu’un moindre mal -… mais qui n’en a pas fait ?!

Il faut vaincre l’appréhension du contact en vol de deux avions par le panier et la perche interposés. C’est le premier contact qui  au départ, rend nerveux et fait crisper la main sur le manche, ce qui entraîne automatiquement des corrections aux commandes trop fortes alors qu’il faut agir en permanence avec souplesse pour pouvoir contrôler la trajectoire de son avion… au centimètre près. Pas d’innovation ; il n’y a qu’une méthode (elle marche bien) et il faut savoir y revenir si l’on s’en écarte; en un mot: Jean doit, ici comme en toutes circonstances, agir avec rigueur et se ” botter les fesses ” pour ” enquiller ” dans de bonnes conditions. A sa première mission, en vingt minutes derrière le C-135 F, il a fait de nombreux contacts (et de bons) et revient tout guilleret à l’escadron, conscient de son exploit (il n’a pas vu le petit sourire amusé du moniteur). Aussi à sa deuxième mission il part tout confiant. En 20 minutes cette fois, il a réussi à faire péniblement un contact et un certain nombre de ” fausse-queues “. Le retour est moins triomphant, pourtant il s’est donné du mal; il suffit de voir les traces de sueur qui maculent encore son visage et ses traits tirés par la tension nerveuse pour le comprendre. Heureusement, son moniteur (le brave) va lui expliquer tout cela au débriefing, ce sera très court : c’est normal, tout le monde y est passé et pour tous il y a une mission où ” ça ne marche pas ” (généralement après une bonne). En effet, méthodique et rigoureux notre ami termine sa transformation sans problème. Tantôt en équipier tantôt en solo ou en numéro 1 d’une patrouille de deux avions, il va mûrir et participer à toutes les missions de l’escadron et acquérir une expérience indispensable pour la suite de sa progression. Après cette période de “vieillissement “, il va se retrouver une fois de plus sur le ” banc de l’école “. Maintenant il lui faut apprendre à s’occuper d’un équipier, à conduire une patrouille de deux avions en assaut alors que la difficulté de ses objectifs à traiter augmente. En même temps, il va découvrir d’autres disciplines qu’il n’avait fait qu’effleurer en tant qu’équipier. Jean va toucher un peu à tout : interception en très basse altitude d’un raid, à l’aide du calculateur ou sur une simple information de cap à un point de passage  (figurant un guet à vue) et aussi un peu avec ” son nez “, interception avec combat en moyenne altitude où il va pouvoir ” remuer ” son avion. Ce sera également l’appui-feu en coopération avec l’armée de terre, c’est-à-dire l’attaque d’objectifs au sol (véhicules, troupes, matériel militaire…) aux ordres d’un spécialiste, lui-même sur le terrain, qui va lui désigner le but à traiter. Là encore, deux méthodes : soit classique, c’est l’officier de guidage terre l’OGT qui construit l’attaque; Jean ” plotte ” l’objectif sur sa carte à grande échelle (et découvre comment on pilote en tenant le manche entre ses genoux) et suit les indications données pour se présenter au point de cabré. Soit à l’aide du calculateur de navigation pour arriver au même point, mais cette fois-ci en se débrouillant seul pour arriver au bon endroit.

A54 à Toul
JAGUAR au décollage en configuration 6J (2 bidons) avec mission de tir air / sol.

Dans les deux cas, il est ” pris à vue ” par l’OGT pour l’ultime guidage en finale pour ” détruire ” le camion au coin du bois. Facile ! Un rapide calcul permet de lever le doute. Prenons par exemple une passe canon où la distance de tir est la plus courte (1000 mètres) : au point haut de son cabré Jean dispose – à une vitesse moyenne de 200 m/s – d’une douzaine de secondes pour découvrir l’objectif, l’identifier, stabiliser sa visée et tirer, douze petites secondes, c’est tout. De plus, essayez de vous représenter la taille d’un camion vu à 3000 mètres… C’est déjà beaucoup moins évident. Nouvelle discipline également : la reconnaissance tactique. Jean participe à une recherche plus concrète du renseignement à l’aide de la caméra panoramique de bord (OMERA 40) et aussi ” à la vue “, les deux méthodes étant intimement liées. Le renseignement est primordial et fait partie intégrante de toutes les missions. Il apprend où et quoi regarder, à se servir de sa caméra et surtout à restituer au retour de mission tout ce qu’il a vu avant d’exploiter son film avec le concours de l’officier de renseignement (OR). On lui demande donc d’être un spécialiste en attaque au sol mais aussi de savoir-faire du combat (pour éventuellement se défendre), de rechercher le renseignement en ayant avec lui un équipier. Il devient responsable de la patrouille, c’est à lui qu’incombent toutes les décisions en particulier sur le déroutement du vol en fonction des ordres de départ, de la météo rencontrée en vol, des pannes éventuelles pouvant affecter l’un des avions et des règlements du temps de paix qui lui imposent un cadre qu’il ne peut pas franchir. Il doit en permanence concilier sécurité et efficacité… et le choix n’est pas toujours simple. Tout ceci sera sanctionné par la licence de sous-chef de patrouille.

La suite est simple : c’est l’entraînement et le perfectionnement dans toutes les disciplines à son profit et une chose nouvelle, l’instruction des jeunes pilotes. Il va devoir restituer de son mieux au jeune PIM qui est avec lui (et qu’il a été, s’en souvient-il ! ! ) tout ce qu’il a appris, toute son expérience et son savoir. En plus, durant toute sa carrière, son menu quotidien est fait d’instruction au sol : briefing sur une partie de l’avion, sur la sécurité des vols, la “récognition ” (avions et matériels au sol), la réglementation aérienne, la circulation aérienne, etc…, l’activité aérienne (avec préparation, briefing, vol, débriefing) et aussi de travail plus terre-à-terre. Chaque pilote a une tâche annexe comme officier de tir, mise à jour de la documentation opérationnelle, des cartes de navigation, etc… Le sport aussi fait partie de la vie d’un pilote et il le pratiquera pour son hygiène personnelle mais aussi pour conserver la forme. Ce n’est pas une vue de l’esprit mais bien une nécessité. La fatigue due aux vols est de deux sortes :

– physique bien sûr, car les ” g ” sont vite pris et s’ils sont encaissés sans broncher il y a fatigue musculaire ;

Décollage pour une mission de tir réel
Décollage pour une mission de tir réel

– nerveuse et c’est certainement la plus insidieuse ; pour une mission ” pointue “, la tension nerveuse est présente durant tout le vol et si un pilote se relaxe un peu après un vol, vous pouvez être certain que ce n’est pas par fainéantise. Certaines missions sont plus fatigantes aussi du fait de l’équipement particulier ; comme ces combinaisons étanches pour le survol maritime qui sont des petits saunas individuels et portatifs. Bien sûr, Jean a aussi des examens au sol à préparer qui portent sur la météo, la circulation aérienne, la guerre électronique, le NBC, l’appui-feu et aussi la connaissance de la langue anglaise. Notre pilote a donc de quoi s’occuper, sans oublier les vols de nuit (très tardifs à la belle saison), les manœuvres nationales qui demandent une très grande disponibilité, les manœuvres et exercices particuliers en coopération avec l’Armée de Terre ou la Marine et même avec les armées de l’air étrangères, la pratique régulière du simulateur de vols et les exigences du métier de militaire (tours de service, permanence…) : voilà de quoi varier le menu et agrémenter quelques soirées et week-end. Après avoir bien ” vieilli “, il se retrouve une fois de plus sur le ” banc de l’école ” pour la qualification supérieure. Pour cela il aura la responsabilité d’une patrouille de quatre avions et son entraînement portera sur toutes les disciplines déjà citées ; le cadre des missions sera beaucoup plus complexe. Il devra faire la preuve de sa compétence et de son efficacité, de son esprit de jugement et de décision. La sanction en sera l’attribution de la licence de chef de patrouille. Pendant toute sa carrière, le pilote de chasse est un ” potache “. Il a toujours quelque chose à apprendre et chaque mission est une remise en cause de son savoir, de son expérience. Aucun pilote n’est à l’abri de se ” bâcher ” au cours d’un vol. Maintenant Jean est un ” vieux briscard ” et son expérience sera précieuse au sein de l’escadron. Ce petit tour d’horizon sans prétention serait totalement incomplet si nous ne parlions pas d’une race obscure, travaillant sans compter les heures pour ” sortir ” les avions nécessaires à l’accomplissement des vols, je veux parler de ” la Mécanique ” avec un grand ” M “. Sous le terme de ” la Mécanique ” sont regroupés tous les spécialistes indispensables pour la mise en œuvre, le dépannage et l’entretien des avions. La complexité des avions modernes a nécessité ce cloisonnage en spécialités. En effet cette machine que l’on peut voir sur le parking où en vol renferme dans ses flancs le dernier cri de la technologie que ce soit en électronique, en motorisation (le réacteur est très simple de par son principe mais très élaboré dans sa conception mécanique), en mécanique (commande de vol, train, volets), en équipements de survie (siège éjectable, parachute). C’est pourquoi, sous les ordres d’un officier et de son adjoint, la mécanique se compose d’un certain nombre de ” services ” : piste (mise en œuvre des avions), système de navigation armement SNA (électronique), électricité, sécurité sauvetage, armement, etc… Chacun dans sa spécialité reçoit une formation très poussée et continue. Le travail peut se résumer en trois expressions : mise en œuvre des avions, dépannage et entretien. La mise en œuvre consiste en la vérification du bon fonctionnement des différents systèmes de l’avion, le remplissage des différents réservoirs (kérosène, huile moteur, hydraulique) et le chargement des avions (montage et démontage des pylônes, bidons supplémentaires, lances roquettes, armement des canons, etc…). Dès le retour au parking, ces mêmes spécialistes vérifieront l’avion même si le pilote n’a signalé aucune panne, avant de le passer ” dispo ” pour le vol suivant. Si une panne est signalée au retour de mission, le dépannage est aussitôt entrepris. Cela commence par une discussion avec le pilote pour essayer de cerner au plus près l’organe défectueux (symptôme, action du pilote et résultats) ; la pièce ou l’appareil incriminé est démonté et changé puis son fonctionnement vérifié selon des procédures bien établies. Rien n’est laissé au hasard. Un écrou mal serré, une vis oubliée dans l’avion peuvent être à l’origine d’une catastrophe.

C’est un travail qui demande compétence, rigueur et méthode. Un dépannage peut durer de quelques minutes à plusieurs jours. Si l’avion fait défaut, le travail sera poursuivi quel que soit l’heure de la journée et parfois de la nuit. De même la mise en œuvre des avions sera faite quel que soit le temps : froid, pluie, glace, soleil n’arrêtent pas pour autant le travail. L’entretien des avions comporte la révision systématique des différents organes.

Les heures de vol de chaque avion sont comptées et périodiquement toutes les 25 heures, 50 heures… de vol des vérifications sont faites suivant un programme bien défini. Certaines pièces sont changées à priori en fonction de leur vieillissement. Plus les avions accumulent les heures de vol et plus les visites seront approfondies, d’où la nécessité d’établir un calendrier pour échelonner et le travail des mécaniciens et la ” dispo max ” de la flotte aérienne. Bien évidemment, le mécanicien n’échappe pas aux impératifs militaires : lui aussi prendra les mêmes tours de service que le fourrier ou le secrétaire. Comme l’a dit un officier mécanicien pour un reportage effectué par FR3 : ” chacun dans sa spécialité est fier d’effectuer le travail qui lui incombe “. J’ajouterai que lorsque le pilote part en vol, il ne se pose pas de question sur la qualité du travail effectué par sa Mécanique : il lui fait totalement confiance.

Fin de la première partie

Qui, Quand et de Quoi s’agit’il ?

Les histoires de la 11EC, de la 7EC et de l’EC 3/3 ont le Jaguar en commun. Souvent ils se sont retrouvés, croisés ou bien éloignés. C’est un peu ce que traduit cette photo que je vous propose dans le but de retrouver les acteurs ainsi que les circonstances dans lesquelles elle a été prise.

3.3
Manifestation : 3 participants selon la FATAC, 50 selon les organisateurs

 

Rafale au dessus du Mali

rafale

Aujourd’hui, je vous propose un récit qui n’a pas un rapport direct avec la 11EC mais qui rappellera bien des choses à beaucoup d’entre vous.

La mission conduite à partir de Saint Dizier entrera dans l’histoire de l’Armée de l’Air et mériterait à mon sens, une diffusion beaucoup plus importante que celle dont elle a fait l’objet. Je remercie l’AEA qui m’a accordé l’autorisation de publier cet article parut dans le “Piège”, le bulletin des anciens élèves de l’Ecole de l’Air.

9h41…la durée du vol s’affiche sur l’un des écrans latéraux du Rafale, quelques instants après l’atterrissage sur la piste de N’Djamena. Ce vol m’a pourtant paru presque bref tant il a été intense. Quelques minutes plus tard, mes trois équipiers sont posés. Nous remontons désormais la piste à contre-QFU en direction du parking militaire. Nous sommes le dimanche 13 janvier, il est un peu plus de 17h00, notre première mission au Mali arrive à son terme. Le Task est rempli, plus d’une vingtaine d’objectifs ont été détruits ou gravement endommagés. Je repense aux événements qui se sont enchaînés depuis 48 heures.

Vendredi 11 janvier, 16h30 : fin de l’activité aérienne, je consulte les mails accumulés sur ma messagerie au cours de la semaine … coup de fil d’un capitaine du centre national des opérations aériennes à Lyon : « Il faudrait nous donner une estimation du pétrole nécessaire à une mission de quatre Rafale, au décollage de Saint-Dizier et à destination de N’Djamena, via le Mali… réponse pour hier ». Je ne suis pas surpris. Ce genre de question ne peut arriver qu’un vendredi après-midi à 17h00… 18h30 : tout s’accélère. Un décollage de quatre Rafale est prévu dans la nuit de samedi à dimanche. En parallèle, une équipe restreinte de pilotes, officiers renseignement et mécaniciens, doit embarquer à bord de l’un des avionsravitailleursC135qui accompagneront le dispositif à partir d’Istres. Départ prévu du bus à 3h00 du matin… juste le temps de faire un sac. La mission telle qu’elle m’est alors présentée par le conseiller militaire du commandant de la défense aérienne et des opérations aériennes (COMDAOA) consiste en un raid sur des objectifs tenus par les terroristes au Mali. Décollage prévu de Saint-Dizier, destination : N’Djamena au Tchad. Les pilotes embarqués dans le C135 doivent quant à eux assurer la même mission, en sens inverse, le lendemain de notre arrivée. Les patrouilles pour les deux missions sont constituées.

Le choix des pilotes n’est pas simple : tous sont prêts et volontaires. Tandis que les pilotes désignés se rendent au service médical pour les derniers vaccins, les préparatifs de la mission commencent. Chaque cellule de l’escadron est mise à contribution : “préparation mission”, “renseignement”, “tir”, “opérations”… 23h00 : retour à la maison pour le personnel indispensable à la préparation de mission du lendemain, afin de prendre un minimum de repos et préparer l’indispensable BV. Pour ma part, je garnis mon sac du strict minimum – une combinaison “sable” et une trousse de toilette – afin d’assurer la mission dont je pense alors qu’elle ne durera que quelques jours.

Samedi 12, 14 h 30 : après une matinée de repos pour les membres de la patrouille, nous nous retrouvons tous en “salle de guerre” de l’escadron. Les dossiers d’objectifs nous sont parvenus : des installations, camps d’entraînement, centres de commandement utilisés par les groupes terroristes à proximité de Gao, ville qui m’est alors parfaitement inconnue mais qui deviendra familière au cours des semaines à venir. Nos configurations se précisent : deux des quatre Rafale seront équipés de munitions guidées GPS “AASM”, les deux autres de bombes guidées laser “GBU12”.

18h00: briefing téléphonique avec le conseiller juridique du COMDAOA. Les règles d’engagement me sont présentées. L’escadron tout entier participe à la préparation de mission. La cellule “renseignement” est présente au grand complet. Je constate avec satisfaction la sérénité avec laquelle chacun travaille. Un véritable esprit de corps anime notre équipe, qui dépasse d’ailleurs les frontières de l’escadron. Deux pilotes du2/30 nous ont en effet rejoints au cours de la matinée, tandis que le 1/91 a mis à notre disposition quelques-uns de ses équipages, en prévision d’un raid ultérieur. Tous œuvrent comme un seul homme à la préparation alors que la nuit commence à tomber. La base aérienne tout entière s’active à la préparation des avions. Les containers munitions encombrent les abords du parking témoignant de la nature de la mission qui se prépare.

20 h 00 : briefing avec le “Bretagne” et le commandant de bord du premier C135 ravitailleur. Les points de séparation et de rejointe au moment de l’attaque sont fixés. La question du carburant disponible demeure, elle, largement en suspens. Nous ne savons toujours pas quel trajet nous emprunterons : Maroc ?  Algérie ? Lybie ? Les autorisations tardent à venir.

22h30 : nous laissons à l’équipe de nuit le soin de finaliser la préparation. Ni l’ordre particulier d’opération, ni le plan de communication ne nous sont encore parvenus. Nous verrons tout à l’heure, après quelques heures de sommeil. Je quitte les locaux et rejoins l’hôtellerie en zone “vie”. Avec cette montée en puissance subite, la base aérienne est animée comme en plein jour. Je croise les poids lourds qui ont transporté les munitions depuis les dépôts. À cet instant, la base aérienne “outil de combat” prend tout son sens.

03h00 : après une courte nuit, je regagne l’escadron. On m’annonce que l’ordre d’opération est arrivé et… que les objectifs ont changé. Le plan d’attaque a été revu de fond en comble par l’un des commandants d’escadrille. Il m’en expose les grandes lignes et me transmet les documents de mission. Ils se révéleront d’une aide indispensable en cours de vol, pour faire face aux aléas inévitables de la “conduite” : changement de mission en vol reçu du CPCO, absence du pod de désignation laser sur l’un des avions spare, pourtant chargé de GBU12… La lecture de l’ordre d’opération rédigé par le CDAOA répond aux ultimes questions. Je récupère les fréquences radio indispensables sur le plan de communication tout juste arrivé. Le travail accompli en quelques heures par l’escadron est remarquable. Tout est prêt : fiches de percées, terrains de déroutement, datacards (1) , plan d’attaque, dossiers d’objectifs,…

04h20 : briefing dans dix minutes. Les douze dernières heures m’ont prouvé, s’il le fallait, la pertinence de notre entraînement quotidien : les Revue des anciens élèves de l’École de l’air Le piège n° 212 – mars 2013 25 t préparations de missions en temps toujours trop contraint, les modifications de dernière minute imposées par le commandant d’escadrille, jusqu’aux séances d’instruction, parfois rébarbatives, à l’utilisation des moyens de survie, rien n’est superflu.

04h30 : début du briefing. La réflexion tactique, les choix, la préparation sont derrière nous. Je sens ma patrouille sereine lorsque nous passons en revue, les uns après les autres, chacun des points de nos briefings mission réalisés à l’entraînement. Nous sommes désormais en terrain connu. Seule différence notable : l’attention particulière accordée à la CSAR2 …

05h30 : Départ aux avions après avoir signé notre ordre de vol et enfilé nos combinaisons étanches. Les gilets de combat sont plus lourds ce matin, les pistolets qui les garnissent y sont probablement pour quelque chose. Un dernier mot d’encouragement du commandant de base et l’escadron rassemblé nous accompagne vers la ligne de Rafale disposés devant l’unité. Le tour avion est plus long qu’à l’accoutumée. La vérification de nos 24 bombes prend en effet un certain temps. Les actions vitales, cette musique apprise par cœur et maintes fois répétée au cours de l’installation cabine a quelque chose de rassurant. Seule entorse à cette “partition” : je ressens le besoin de serrer la main de mon pistard avant de refermer la verrière et me retrouver isolé du monde extérieur. Mise en route et tests au sol effectués, je demande le roulage. Un dernier salut à nos mécaniciens. Nous quittons l’îlot de lumière de la ligne Rafale et son activité, pour nous enfoncer dans la nuit, vers le seuil de piste. Dernières vérifications, nous nous élançons l’un après l’autre sur la piste. « Rasoir Alpha 4, airborne ».

Il est 7h17. À peine plus de 36 heures après le premier coup de fil du CNOA, nous sommes en route vers le Mali. Belle démonstration de réactivité. Nous montons en “trail 2 ” vers notre altitude de transit. Il fait encore nuit noire. À peine la couche de nuage traversée, nous apercevons les premières lueurs de l’aube. L’interception de notre premier ravitailleur est réalisée sans encombre au large d’Istres. Nous nous positionnons de part et d’autre et entamons notre périple vers le Sud. Les côtes espagnoles défilent à l’Ouest, puis le Maroc et la Mauritanie. Nous obliquons vers l’Est. Les ravitaillements tous effectués en point central s’enchaînent. L’indisponibilité temporaire du lance-bombes de l’un de mes équipiers, la modification du plan d’attaque, consécutive à l’absence de pod de désignation laser de mon numéro 3, ainsi que quelques problèmes mineurs se chargent de nous occuper l’esprit jusqu’à notre troisième ravitaillement en vol

Alors que notre trajectoire s’infléchit vers l’Est, à quelques centaines de nautiques des premiers objectifs, le CPCO nous gratifie d’une dernière adaptation du plan d’attaque, suite à la modification des priorités d’engagement des cibles assignées. « Rasoir Alpha 4, 5 tons, full, clear disconnect»…L’annonce ponctue la fin du troisième ravitaillement de mon numéro 4 au-dessus du Mali et signifie que le dernier “obstacle” à la réalisation de l’attaque est levé: nous disposons désormais du carburant nécessaire à la réalisation de la frappe. Nous laissons le C135 sur notre gauche et descendons, en accélérant, vers l’altitude prévue de l’attaque. Fence in (3) …ultime vérification du bon fonctionnement de mon système d’autoprotection. Nous allons évoluer dans le domaine d’engagement des missiles sol-air courte portée qui, selon nos officiers “renseignement”, sont présents dans les rangs des groupes terroristes. Notre vitesse, 440 nœuds, diminuera notre vulnérabilité. Mon équipier en charge de l’annonce éventuelle des départs missiles sera le dernier rempart, lorsque j’aurai le regard rivé sur la cible. Plus que 50 nautiques. Pour le moment, mon pod de désignation laser, pointé dans la direction de l’objectif, me permet seulement de distinguer le fleuve Niger. Bientôt apparaissent les formes caractéristiques d’une ville : Gao. Mes numéros 3 et 4 se séparent afin de se présenter sur l’objectif au cap prévu. In Hot (4), plus que 15Nm, moins de deux minutes de vol, je lève les dernières sécurités armement. À 30 secondes du point de tir, l’image du pod me permet de reconnaître mon premier objectif. Pas de méprise possible. Je presse la détente. Quelques longues secondes plus tard, une légère secousse, la conduite de tir du Rafale vient d’autoriser l’éjection de la première GBU12. Je lance l’illumination laser qui doit guider la munition vers l’objectif, reproduisant à l’identique la passe de tir répétée des dizaines de fois à l’entraînement. Tout en me concentrant sur la visée, je suis la décrémentation automatique du temps de vol jusqu’à l’impact. Plus que 10 secondes. Je suis désormais à la verticale de la cible. 5…4…3…2…le bâtiment visé disparaît subitement. Un flash blanc envahit l’écran. La munition a fait but. À mesure que je m’éloigne de l’objectif, l’image de mon pod me permet de distinguer le panache de fumée, à l’emplacement où s’élevait l’un des bâtiments principaux du camp d’entraînement terroriste, quelques secondes auparavant. Les premiers comptes-rendus radio de mes équipiers me parviennent : l’attaque se déroule conformément au plan prévu. Mais bientôt, l’inévitable “grain de sable” vient s’inviter dans la mécanique bien huilée du plan de frappe. Mon équipier, encore chargé de toutes ses bombes, consomme plus de carburant que je ne l’avais prévu. Sans un ravitaillement préalable, impossible pour lui de réaliser ses frappes. Même problème pour mon numéro 4. Nous interrompons donc prématurément l’attaque pour converger vers le ravitailleur à quelques dizaines de nautiques à l’Est de notre position. Au moment où nous le rejoignons, j’apprends que ce dernier peut nous offrir 24 tonnes de carburant. Je sais par ailleurs, après un rapide Fuel check, que 17 tonnes sont nécessaires à ma patrouille pour rejoindre N’Djamena. Le problème qui se pose alors à moi peut être résumé comme suit: «Sachant que le C135 consomme 4 tonnes de carburant à l’heure, que chacun de mes équipiers consomme environ 100kg de carburant à la minute en phase d’attaque, et que nos derniers objectifs sont situés à 50 nautiques à l’Ouest de notre position, puis-je réaliser les dernières frappes et disposer du carburant nécessaire à la poursuite de la mission vers N’Djamena? » Le Rafale, aussi perfectionné soit-il, n’apporte pas encore les réponses à ce genre de question et je remercie intérieurement mes instructeurs qui, il y a quelques années, se montraient inflexibles avec moi en matière de calculs pétrole. Moyennant un petit coup de pouce de notre C135 qui nous rapproche de notre objectif au cours du ravitaillement et nous autorise à lui prélever une quantité de carburant un peu plus importante que prévue, nous parvenons finalement à tirer nos dernières munitions sur les cibles assignées. Sécurités armements à peine abaissées, cap à l’Est en direction du Tchad. Un cinquième ravitaillement et deux heures plus tard, nous parvenons à destination. À peine posé, le colonel commandant la base de N’Djamena m’apprend que notre séjour s’annonce plus long que prévu. Nous renforçons dès à présent le dispositif aérien de l’opération “Serval”. Il n’est plus question désormais de retour le lendemain, mais d’un détachement de quatre à cinq semaines. Je repense un instant au contenu de mon sac… la mission risque en effet d’être long.

1- N.D.L.R.: Feuille au format A5 recueillant les données spécifiques à la mission.

2- Combat Search and Rescue

3- N.D.L.R.: À environ 2 à 3 nm l’un derrière l’autre, en accrochage radar.

3- N.D.L.R.: Dernières actions à effectuer avant l’entrée en territoire hostile.

4- N.D.L.R.: Annonce correspondant à l’arrivée sur l’axe de tir Bingo! A

Départ mission MaliRVT Mali

Les 4000 heures de la Fouine sur F100

6000h la Fouine

Les 4000 heures de la Fouine sur F100

Une fois n’est pas coutume, je vous propose aujourd’hui une vidéo trouvée sur Youtube.

Tous ceux qui sont passés à la 11EC à cette époque connaissent bien le LTT HAY qui a réussi l’exploit inégalé à ce jour ( pour ce que j’en sais) d’effectuer 4000 heures de vol sur un chasseur du même type. Il faut quand même savoir que d’une manière générale, c’est plus que ce que fait un pilote de chasse durant l’ensemble de sa carrière !

J’ai entendu dire que l’avion sur lequel il avait réalisé son vol était le même que celui de son lâché, qu’il n’y en plus eu derrière, qu’il n’avait jamais engagé de barrière,…

Si certains veulent ajouter des commentaires….

 

L’Armée de l’Air, c’est super !

L’Armée de l’Air, c’est super !

Il y a 3 semaines il y a eu 10 fois plus de visiteurs sur le site, qu’un jour normal ! Notoriété subite? Non, puisque c’est retombé. En fait les connexions venaient de la page officielle de l’Armée de l’Air sur Facebook, Armée de l’Air qui avait eu la gentillesse de faire un “post” (comme disent les jeunes) au sujet du site ; j’en ai eu la confirmation ce weekend en rencontrant un ancien de la 11EC qui est à l’origine de cette initiative (merci JP).

Je vous laisse le lien Facebook de la page officielle de l’Armée de l’Air ainsi que la photo qui y figure. Je vous invite à aller la visiter. Merci l’Armée de l’Air : c’est super !

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Page officielle armée de l’air

Un grand ancien du groupe 3/6

Gabard devant son Dewoitine 510Meknès 1939
Fin de stage à Meknes 1939 sur Dewoitine 510

Témoignage de Raymond GABARD, un “grand ancien” du groupe 3/6, dont je mettrai bientôt en ligne les mémoires qu’il a eu la gentillesse de m’envoyer. Sa réponse fait suite, à l’envoi de plusieurs photos qui m’étaient parvenues par l’intermédiaire de l’Amicale de la 11EC.

Plus bas, les 2 photos que je lui ai envoyées et pour lesquelles il m’a répondu.

1945_CREMADEILS.Robert_Treves
Photos de pilotes du groupe 3/6 prise à Trèves en 1945. Voir les commentaires plus bas.
1945_CREMADEILS.Robert.Treves.1945
Texte au dos de la photo qui est à gauche

Merci pour votre envoi de photos anciennes. Malheureusement malgré mes efforts de remémoration des personnages, je n’ai reconnu des anciens du 3/6 que sur la photo prise à Trèves en 1945. Le 2ème personnage accroupi à gauche de la photo doit être le sous lieutenant MEQUET , pilote de P.47 à la 1ère escadrille du 3/6 (Masque de tragédie) . Le personnage assis un verre à la main près de Mequet semble être le Sergent pilote ESPARAC (2ème escadrille masque ailé de comédie) , une vedette dans son comportement. En effet fin mai 1945, alors que nous étions logés dans un hotel d’Entzheim et que je me trouvais un après midi dans ma chambre, j’entends dans la cour de l’hotel, sous ma fenêtre, un bruit de sciage de métal. C’était Esparac qui ayant trouvé sur la route proche un obus de 75 et sa douille intact. Il était en train de scier la douille, sous l’obus pour décorer sa cheminée à son retour chez lui.Je me souviens avoir pris les mesures de précaution qui s’imposaient.Il avait pu terminer son travail sans accident, bien qu’il avait par inconscience scier outre le métal, les baguettes de poudre qui se trouvaient à l’intérieur.Puis en 1965, muté de la Base hélico de Lorient à celle de Perpignan, je retrouve Esparac qui s’était marié avec une riche propriétaire de Torreilles (PO) et qui était devenu cultivateur et viticulteur. Il est décédé relativement jeune vers 1980.

Lors d’une visite à son domicile en 1965, j’avais revu sur sa cheminée la mémorable douille d’obus.

Je profite de ce courrier pour compléter mon document sur ma vie, car il me semble vous manquer quelques détails sur moi. Je suis né le 14 Octobre 1919 à Saint Benoit (86) Village près de Poitiers. Mes parents voulaient m’orienter vers la carrière d’instituteur, mais devant mon insistance à vouloir être “aviateur”, ils ont sans problème accepté mon choix. Je suis donc titulaire du Brevet de Capacité pour l’enseignement primaire.

 

QUI, quand, où ?

Cette fois ça se passe au début des Jaguars et que c’est la première mission CAFI. Je ne sais plus ce que veut dire exactement CAFI, mais ça signifiait que ça se passait en Afrique et que c’était une affaire 3/11.

Il y a des têtes plus connues que d’autres.
A vous maintenant

afrique pilote de la premiere mission cafi avec le jaguar (c

Le mot du président…

En tant que président, délégué général, trésorier, secrétaire,… du site (entièrement gratuit) des pilotes de la 11 ème Escadre de chasse, je voulais vous donner quelques nouvelles :

– après 3 semaines; il y a déjà plus de 400 photos

– nous sommes une grosse trentaine de membres, ce qui un début mais ça devrait augmenter petit à petit. J’avais un peu plus de 100 adresses mail et le ratio de réponses me semble correct.

Pour le moment, comme vous avez pu le constater, c’est plutôt années 70/80 (normal c’est mon époque) et je fais appel aux pilotes d’avant et d’après ; cherchez dans vos archives et essayez de m’envoyer les souvenirs de la période que vous avez passé à la 11.

Histoire de vous motiver, je vous joins les dernières que j’ai reçues ce matin.

Comme certains l’ont dit “Je compte sur vous” et à la chasse bordel !

PS : vous pouvez me mettre les noms dans l’espace commentaires juste en dessous

1-11 JPO 1982.aLe 2-11 en 1996