Au début de 1970, une seule idée trotte dans la tête de tous : la coupe AIRCENT. Le 2/11 se doit d’être brillant, aussi les « pims » et les « poms » sont répartis dans les deux autres escadrons. Un entraînement sérieux et musclé débute. Il est d’autant plus sérieux que l’année précédente, l’EC 1/11, sous les ordres du Cdt Letty avait participé à ce concours, et en avait tiré bon nombre d’enseignements qui allaient servir de base de travail. Le Cdt Letty terminait en ces termes : « il faut payer le prix, si l’on veut figurer dans ces concours internationaux ». Les résultats prouvent que nos méthodes sont bonnes, que nous tirons aussi bien que les autres. Il reste à parfaire tout cela l’année prochaine ». C’est ce que va faire le 2/11 « Vosges ».
Seuls les quinze derniers jours précédant le concours ont permis à certains de se régler. Grâce à un travail d’équipe, les mécaniciens réussissent à fournir un avion à chaque concurrent, appareil harmonisé par le pilote lui-même et maintenu disponible par l’établissement d’équipes de nuit au sein de la mécanique 2/11. Chaque appareil possède une cinquantaine d’heures de potentiel, et est équipé de canons et de lance-roquettes neufs, un mois avant le concours. Cette personnalisation parut nécessaire et particulièrement bénéfique à la victoire tant espérée.
Le concours AIRCENT consiste pour chacun des six pilotes, à effectuer sept missions : trois de navigation avec passage sur un objectif et un tir, et quatre missions uniquement de tir. La configuration est la suivante : 80 obus, 1 bombe de 50 kg et une roquette à tête inerte. Quant aux tirs, ils se déroulent de la manière suivante : une passe SKIP à une altitude 35′. Une passe roquette avec une altitude- mini 500′ et une ou deux passes canon au choix du pilote, ligne d’arrêt de feu à plus de 500 m. Tous les tirs se dérouleront sur le champ de tir de Suippes. Bien qu’invitée, la France pouvait prétendre donc concourir pour la coupe WALKER réservée à l’attaque conventionnelle. Trois mois avant l’épreuve, une première équipe de dix pilotes est formée. Ces derniers ne font pas de mission imposée, ne prennent pas la PO, n’exécutent pas de mission de défense aérienne, ni de vol de nuit. Ils s’entraînent uniquement au tir, à l’assaut et ils cultivent leur forme physique en faisant du sport. L’exploitation des résultats du 1/11 obtenus en 1969 prouvait à l’évidence que le concours AIRCENT se gagnait sur SKIP Bombing. C’est donc sur le bombardement que l’accent fut mis. Les méthodes de tir ayant été élaborées l’année précédente, il convenait de les adapter à la nouvelle altitude minimum autorisée. La météo réserva aux départements de l’Est des plafonds assez bas durant le mois de mars et avril. Peu gênant pour l’assaut, le SKIP, voire le canon, ces plafonds insuffisants ont considérablement gêné l’entraînement roquettes.
Le 1er juin 1970, six F100 se posent à Spangdahlen où une quarantaine de mécaniciens ayant rejoint par TRANSALL les attendaient. Accueil à l’américaine : efficacité et luxe de moyens. Dès la première semaine, la 2ème ATAF équipée de FIAT G91 se laisse décrocher et le combat se précise entre la France et la 4ème ATAF équipée de FIAT G91 et de 3 PHANTOM. La malchance éprouve le 2/11 ; une panne de freins au décollage fait perdre le bénéfice d’une mission entière puisque le règlement prévoit que chaque détachement est responsable de ses pannes et qu’il ne saurait être question de redonner un vol en cas de défaillance mécanique. Parallèlement, une bombe et deux roquettes refusent de partir et allègent d’autant le score du jour. En fin de semaine, la 4ème ATAF est en tête talonnée à 10 points par le 2/11. Rien n’est perdu, le moral est d’acier. La seconde semaine débute mal et l’écart se creuse jusqu’à 45 points. Le mardi matin, trois pilotes de l’escadron rentrent de vol la mine faussement carton ». Rush sur les résultats de la 4ème ATAF… le «day-off » a changé de camp, l’escadron a repris les 45 points plus quelques autres qui permettent de passer en tête, explosion de joie… cris de guerre… ces minutes sont la récompense d’une préparation intense. Dès lors tout va bien, chacun remplit son contrat et, plus jamais la 4ème ATAF ne fut réellement inquiétante. Pour signer la victoire, les six dernières missions s’échelonnèrent entre 17 et 22 points… score qui prend toute sa valeur quand on sait qu’une mission à 15 points est une très bonne mission.
Le palmarès de la coupe WALKER remportée par l’Escadron de chasse 02.011 «VOSGES» est de 586 points contre 540 à la 4ème ATAF et 393 à la 2ème ATAF. Par équipe, le 2/11 se classe premier en navigation, en tir canon et en bombardement. Individuellement, les pilotes se classent 3ème, 4ème, 5ème, 6ème, 8ème et 9ème en navigation, 1er, 3ème, 4ème et 5ème en tir canon, 3ème, 4ème 5ème, 7ème et 8ème bombardement.
Le 2/11 devient alors le meilleur escadron de l’OTAN.