PRÉSENTATION BRAVO DE LA 11°EC EN JAGUAR

 

Dès l’arrivée du Jaguar en Escadre, c’est tout naturellement que la FATAC désigne la 7éme Escadre pour la présentation “A”. Les événements africains imposent un rythme élevé de missions à la 11 et la 7 gardera la présentation “A” jusqu’en 1980. En 1981, la 11 est désignée pour reprendre le flambeau de la présentation “A” et c’est la compétence de Jacques Deltrieu qui est retenue, il sera le premier présentateur “A” de la 11EC.

Pendant 2 ans “Trieu” montrera avec tout son professionnalisme les qualités d’évolutions du Jaguar, dans un volume très serré, en basse altitude (parfois bas, même très bas…). Les missions africaines reprenant de l’ampleur, la FATAC désigne un deuxième présentateur “A” pour pallier les absences de notre bon “Trieu”, Patrick Huet est désigné et ce fut un excellent tremplin pour rejoindre sa future affectation : la Patrouille de France.

En 1983, c’est notre regretté Michel Tani qui sera le présentateur “A” pour la 11, avec un programme aussi dynamique et encore plus “osé” que Trieu.

A la Grande FATAC, les chefs de Bureaux et les conseillers changent, les mentalités et les compétences aussi… Après le traitement de la 5C (principale préoccupation) et entre  deux examens ECAG2, les têtes pensantes de l’Etat Major  rôdent dans les couloirs et trouvent, d’un coup, que les présentations “A” du Jaguar sont dangereuses… Et puis il y a le Mirage 2000 qui est quand même plus porteur à leurs yeux !!!

En 1984, finalement c’est toujours le Jaguar qui effectue des vraies missions opérationnelles et le public des JPO s’étonne de l’absence du “félin” et en redemande. La présentation “B” renaît, moins dangereuse car les figures dans le plan vertical sont interdites. Le 3/11 Corse est désigné pour cette nouvelle mission. Une présentation à deux avions est même acceptée par les bureaucrates de la FATAC.

Après plusieurs entrainements en biplace, bien conseillé par Michel Tani, il ne me reste plus qu’à choisir un équipier fana et compétent qui accepte de “morpionner”. Tout naturellement je propose Alain Dupont que je connais bien pour ses talents de pilotage mais aussi parce que nous sommes très proches dans la vraie vie ; comme un équipage de guerre, il faut bien se connaître pour faire ce type de mission. Il accepte de suite, satisfaction !

Engie Dupont
Engie Dupont

Nous élaborons, ensemble, un programme de présentation basique pour montrer les possibilités de ce bel avion : beaucoup de patrouille serrée, de la grande vitesse, de la basse vitesse avec et sans le train sorti, des oreilles mais aussi des simulations d’attaque canon, une figure avec le leader train sorti passant devant le public qui se fait doubler par l’équipier en grande vitesse, un bel exercice de style et de timing (mais on en reparlera plus bas…). Sont ajoutées quelques figures ou morceaux de figures (je rappelle que les évolutions verticales sont interdites) ainsi que des effets de perspective sont copiées sur les arabesques des solos de la PAF pour donner encore plus de dynamisme à notre présentation. Le programme est présenté aux “dinosaures” de la FATAC, grands spécialistes Mystère IV, Ouragan, SMB2, F100 ou Mirage IIIC (qui n’existent plus), et c’est non sans mal que la présentation est validée.

Les entrainements s’enchainent et ce n’est que beaucoup plus tard que nous faisons, enfin, une présentation devant du public. Grâce à la ténacité des commandants d’escadrille qui obtiennent des autorités de la base de Cazaux que nous puissions faire les deux derniers entrainements lors de la campagne de tir du 3/11, nous sommes prêts pour la JPO de Rochefort deux jours plus tard et Bordeaux le weekend suivant. Lors de ces 2 weekend, de précieux conseils nous sont donnés par les pilotes de la PAF, notamment en esthétique et correction des perspectives ; l’équipier doit oublier les repères habituels de la patrouille serrée et corriger son étagement et son retrait en fonction du public. Pour exemple, une figure, pas très compliquée à réaliser, est basée uniquement sur l’effet visuel : la patrouille arrive face au public, l’équipier est en colonne au dessus du leader assez loin et se rapproche du leader pour masquer le public, les spectateurs ne voient donc qu’un avion puis c’est l’effet de surprise d’en voir 2 lors de l’éclatement. Le nom de cette figure, le “Y” venait de faire sa première apparition dans les présentations et sera souvent reproduite par la suite.

Ndlr : cette figure n’a pas été soumise à la FATAC, trop compliqué à leur faire comprendre…

Notre présentation est au point et chacun connait son boulot, il y a peu de messages radio. Les figures s’enchainent à merveille et ce n’est que du plaisir d’évoluer ainsi. Et puis le grand jour arrive… nous sommes conviés à Salon de Provence pour la JPO je crois. Toutes les grandes patrouilles européennes sont présentes, il ne faudra pas se rater Tout se passe super bien et nous aurons même les félicitations de plusieurs pilotes chevronnés dans ce type de mission. Satisfaction encore !!!

Nous ferons encore bien d’autres présentations lors de JPO ou de fêtes aériennes dont une double présentation “B” lors d’un même vol : décollage de Toul, présentation à Contrexéville (donc avions bien lourds), petite navigation basse altitude, deuxième présentation à Brienne le Château (encore un peu trop lourds), retour en moyenne altitude à Toul avec respect des minimas pétrole, ou presque…!!!

Nous sommes en septembre 1986, la saison des présentations se termine et cette dernière présentation de l’année restera dans nos esprits, Alain et moi s’en souviennent encore. Nous venons de rentrer d’un long DETAM au Tchad et de quelques jours de vacances quand l’ordre tombe, nous pensons d’abord à une plaisanterie du commandant d’escadrille puis à une aberration comme seule la FATAC sait faire… mais c’est bien réel, il faut aller faire une présentation “B” à Varennes sur Allier pour la journée “portes ouvertes” du dépôt de munitions. En sortant la 1/100.000 du coin et la photo OM40 du site, il n’y a pas beaucoup de repères visuels à part un hangar perdu dans la forêt et une petite ligne téléphonique qui peut servir d’axe de présentation. Deux jours avant, nous effectuons une reconnaissance du site et un petit entrainement, effectivement la ligne téléphonique sera le seul repère visuel d’alignement, la partie sud-ouest sera pour le leader et nord-est pour l’équipier. Le dimanche de JPO, nous effectuons un premier passage pour étalonner les radiosondes entre nous et c’est parti pour les passages en PS, les oreilles et tout se déroule bien jusqu’à l’éclatement face au public, “pine dans le ciel” et renversement du leader pour un passage basse vitesse train sorti et simultanément large oreille et accélération de l’équipier pour venir me doubler à grande vitesse. 300 ft – 130 kts – I8 – train et volets sortis – phare allumé, j’ai visuel de ma ligne téléphonique et du public devant le hangar, tout va bien, je suis à 20 secondes du passage et j’attends l’annonce “visuel” de l’équipier tout en regardant à l’arrière droit dans mes rétros sauf que cette fois son annonce est différente… “visuel ton phare, en face à face, ne bouge pas…”. J’ai confiance en lui, je passe travers le public et lui me croise à grande vitesse, pile poil au même moment. Une nouvelle figure est inventée et réussie du premier coup. Nous terminons la présentation comme si de rien était et retour à Toul. Le lendemain, un message du commandant de base de Varennes nous félicitait pour la qualité de notre présentation. L’anecdote fut racontée, en guise de “retour d’expérience”, le soir au bar et un fût de bière fut percé comme il se doit dans la pure tradition des escadrons de chasse de l’époque en compagnie des purs produits de la race des pilotes de chasse…

En janvier 1987, je quittais Toul pour les cieux plus ensoleillés du sud-ouest et Alain m’y rejoindra quelques mois plus tard. Par la suite, deux patrouilles de présentation “B” évoluaient dans les cieux nationaux, une à la 7°EC et une à la 11°EC. A partir de 1994, une seule patrouille de la 7°EC évoluait, les fameux Raffin Mike bien connus en Europe et vainqueurs en 1996 de la coupe “Lockeed Martin Cannesta Trophy” les récompensant de leur prestigieuse prestation. Pendant ce temps, Alain a rejoint la 7°EC et, en tant qu’ancien présentateur “B”, a été DV pour les Raffin Mike, la boucle est bouclée…

Alain et moi sommes fiers d’avoir eu la chance de pouvoir faire évoluer cette patrouille “Vanoir O” et porter haut les couleurs de la 11°EC et finalement, d’être un peu les ancêtres des Raffin Mike.

Patrick Engel (Engie) et Alain Dupont (Ponpon) – 3/11 “Corse”

Une série (magnifique) de photos des Raffin Mike.

NDLR : si un Raffin Mike veut raconter, le blog lui est ouvert

La Bravo 1
La Bravo 1
La Bravo 2
La Bravo 2
La Bravo 3
La Bravo 3
La Bravo 4
La Bravo 4
La Bravo 5
La Bravo 5
La Bravo 6
La Bravo 6

7 réponses sur “PRÉSENTATION BRAVO DE LA 11°EC EN JAGUAR”

  1. Un grand merci pour ces souvenirs émouvants de deux grands pilotes dont la modestie et la gentillesse vont de paire avec leur grand professionnalisme. RES NON VERBA.

  2. Salut Engie et Ponpon.
    De magnifiques souvenirs.
    La 7 ou la 11, c’est kifkif. On a fait les mêmes bètises et aussi quelques exploits…

    Amicalement, Ch. Seysset

  3. Chaque escadron possède un “nom” pour désigner les indicatifs patrouille d’avions auquel on ajoute une lettre de l’alphabet aéronautique. Exemple VELUM pour le 1/11, COCA pour le 1/3, VASCO pour le 2/11 et ALPHA, BRAVO,… Les premières lettres de l’alphabet sont attribuées au premier escadron (COCA CHARLIE) et ainsi de suite. Le 2/7 avait comme indicatif RAFFIN et comme c’était le 2 ème escadron de l’escadre, la première lettre est MIKE, d’où RAFFIN MIKE. En espérant avoir été clair

  4. Bonjour André.
    J’ai compris pour les codes escadron Velum Vasco Vanoir, ou encore Coca…
    Par contre, c’est pour la seconde lettre.
    Tu dis que les premières lettres sont pour le premier Escadron. Donc Coca étant le 1/3, pourquoi ce n’est pas Coca Alpha???? Je n’ai pas compris le rapport du 2/7 avec Mike (18e patrouille????) Ou du Vanoir O….
    Pourrais-tu m’éclairer un peu, s’il te plaît???

    Sinon, par là-dessus il y avait un Num pilote, c’est ça? Comme Tonio c’était Vasco 17. C’est ça?

    Merci d’avance.

  5. Pour nommer une patrouille d’un escadron, on prend l’indicatif escadron (Velum, Coca, Rafin,…) et on ajoute une lettre de alphabet aéronautique (alpha, bravo, …). Les premières lettres sont réservées au 1 er escadron ; on aura ainsi Velum Alpha, Coca Charlie, Rasoir Delta,… et les suivantes pour le deuxième escadron Vasco Hotel, Rafin India,.. et idem pour le 3 ème escadron Ratier Oscar, Vanoir Roméo,… Donc Rafin Mike est bien une patrouille de l’EC 02/007.
    Chaque pilote possède un indicatif qui lui est propre et qui est composé de l’indicatif escadron (Velum, Rafin,..) et d’un chiffre qui correspond à une qualification ou à un poste de responsabilité ; le commandant du 1/11 aura Velum 15 pour indicatif, son second Velum 16, les commandants d’escadrille 21 et 22. Les indicatifs des chefs de patrouille seront pris dans la vingtaine à partir de 23, les sous-chefs de patrouilles auront des indicatifs en quarante, les PO en soixante et les PIM en quatre-vingt. Ces indicatifs sont employés lorsque le pilote vole seul et permettent de le “situer” ; Velum 84 sera probablement le dernier PIM arrivé à l’escadron, et lorsqu’on entendait Maquis 1 (prononcer unité) ça filait doux car ça voulait dire que le grand YAKA (chef de la FATAC) était en l’air. Cet indicatif pilote changeait à chaque fois qu’on passait une Klif ou qu’on prenait un poste de responsabilité

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