Crash aérien dans le ciel de Rixheim

 

Il y a tout juste 50 ans, le 13 septembre 1966, deux avions de chasse F-100 « Super Sabre » immatriculés 42210-11 MR et 42236-11 MC, appartenant à la 11ème Escadre de Chasse de la base aérienne 136 de Bremgarten (RFA)1, décollent pour une mission de routine dans le ciel alsacien. Aux commandes, on trouve deux pilotes expérimentés sur ce type d’appareil, le sergent-chef Claude Simonetti et le lieutenant Bernard Robert.

Mais à peine ont-ils franchi la frontière franco-allemande, qu’au-dessus de la forêt de la Hardt, dans un ciel brumeux, vers 16 h 45, les deux Jets se touchent. Dès ce moment, les pilotes n’ont plus qu’une solution pour sauver leur vie, c’est d’actionner leur siège éjectable, tout en espérant que leur appareil ne s’écrase pas sur une zone habitée. Leur formation initiale exigeante, leur expérience et leur professionnalisme les sauvent tous les deux, puisqu’ils touchent le sol alsacien en étant quasi indemnes. Le premier atterrit sur le ban de Petit-Landau et c’est un habitant de Habsheim, Monsieur René Baumann qui, en suivant le parachutiste involontaire, récupère le lieutenant Robert. Au même moment, un autre Habsheimois, Monsieur Grad suit la trajectoire du deuxième pilote, le sergent-chef Simonetti, qui se pose sur l’aérodrome de Habsheim, où l’attend déjà une ambulance militaire détachée de la BA 132 de Meyenheim, et en poste sur le terrain militaire de Habsheim.

Si les deux pilotes sont sains et saufs, il n’en va pas de même de « leur monture » ! Les deux avions s’écrasent sur le ban communal de Rixheim, à l’opposé l’un de l’autre, l’un des aéronefs sur les hauteurs de la rue de l’Etang, au lieu-dit « Kalchofen », avant le Buchwald, et le second, dans l’aire de la gare de l’Ile-Napoléon, après être passé dans un enchevêtrement de lignes électriques. Heureusement, leur chute n’occasionne pas de gros dégâts, mais suscite une grande frayeur auprès des habitants des secteurs concernés.

Sur la colline près du Buchwald, Monsieur Biddidino croit sa dernière heure venue lorsque l’un des appareils passe juste au-dessus de sa tête, fauche plusieurs arbres et va percuter le sol du champ voisin avec ses 10 tonnes, creusant un cratère de 5 mètres de profondeur, tout en éparpillant des morceaux de la carlingue, sur une centaine de mètres à la ronde. C’est dans sa grange que sont entreposés le siège éjectable, retrouvé le long de la route Mulhouse-Zimmersheim, et le canopy (la verrière au-dessus du poste de pilotage), jusqu’à l’arrivée des Gendarmes de l’Air, venus enquêter et récupérer les restes du F 100, aidés par les services techniques de l’Armée de l’Air.

Du côté de l’Ile-Napoléon, les habitants du quartier des cheminots ont également un bon ange gardien à leurs côtés, puisque le second appareil épargne les maisons et va s’écraser dans l’aire de la gare, éparpillant lui aussi sa carcasse à 200 mètres à la ronde, en causant quelques dégâts aux infrastructures. Plusieurs wagons ainsi que les murs de la gare sont endommagés, mais surtout une ligne de haute tension est coupée, provoquant une coupure d’électricité. Au moment du crash, deux CRS, Messieurs Têtu et Scheubel, en patrouille dans le secteur, donnent l’alerte, de sorte que les sapeurs-pompiers de Mulhouse sont rapidement sur place, une intervention placée sous les ordres du commandant Fuchs (inspecteur départemental du Haut-Rhin) et de son adjoint, le capitaine Dollinger. Ils sont rapidement rejoints par du personnel venu de la base aérienne 132 de Meyenheim mais aussi de la base aérienne 136 de Bremgarten, sous les ordres du commandant Bonnefond et du capitaine Pécastaing, délégué sur place par la BA 136. Après inspection des munitions encore actives, il est procédé aux opérations de sécurisation, de contrôle et enfin de déblaiement des restes de l’avion. Les témoins oculaires, qu’ils soient originaires de Rixheim ou de Habsheim, se souviennent certainement de cet événement inhabituel.

D’après les conclusions de l’enquête, la faute de pilotage fut attribuée au lieutenant Robert, mais comme toujours dans ces circonstances difficilement définies, ne jetons pas la pierre à qui que ce soit. Ces deux hommes, pilotes aguerris, avaient la vocation de défendre notre espace aérien pour préserver notre liberté.

Pilote de chasse est un métier merveilleux, mais difficile qui demande des capacités physiques et intellectuelles hors pair, et qui présente aussi des risques, au péril de sa vie.

Sergent-chef Simonetti, lieutenant Robert, l’un de vos collègues, ancien pilote de F-100, Denis Turina a dit en 1968 : « Il existe deux familles de pilotes de chasse : celle de ceux qui ont fait du F-100, et celle de ceux qui regrettent de ne pas avoir pu en faire ! ».

Messieurs, pour votre passion, votre courage et votre abnégation qui ont permis de sauver vos

vies et celles de nos concitoyens,…..un grand merci !

1. En 1950, dans la zone d’occupation dévolue à la France, les autorités militaires décident de construire une base aérienne française dans la région de Fribourg-en-Brisgau, sur le territoire du petit village de Bremgarten, au bord du Rhin en face de Fessenheim. Commencée en 1952, la base est opérationnelle en 1954 et accueille d’abord la 4éme Escadre de chasse, puis après son départ pour Luxeuil, la base de Bremgarten héberge la 11 ème Escadre de chasse jusqu’en 1967. Après le départ des Français, elle accueille une escadre allemande jusqu’en 1992, puis l’escadron d’instruction de la brigade franco-allemande, jusqu’en 1998, date de son transfert à Milllheim. L’ancienne base héberge aujourd’hui un aéro-club et une zone industrielle.

Frédéric CASARIN

Cet article m’a été proposé par F. Casarin “vieux Cne cocoï de la 132 , passionné d’histoire et plus particulièrement de celle de sa commune de Rixheim”. Il a repris l’article paru dans le journal “l’Alsace” de l’époque. Quand il m’a envoyé les documents, il m’a demandé d’insister sur la dernière phrase  de l’article “Merci à vous Robert et Simonetti pour avoir sauvé des vies au péril des votre dans un métier merveilleux mais oh combien difficile pour son professionnalisme! “

Cratère d'un F100
Cratère d’un F100
Gendarmes emportant une verrière
Gendarmes emportant une verrière
Siège éjectable
Siège éjectable
Restes d'un réacteur
Restes d’un réacteur

2 réponses sur “Crash aérien dans le ciel de Rixheim”

  1. Salut la 11,

    C’est presque par hasard que j’ai découvert votre site, et plus particulièrement l’histoire du crash de Rixheim.
    Etant né dans une famille pour qui l’aviation tenait une place plus qu’importante, c’est tout naturellement que ce fameux jour, je levais le s yeux au ciel en entendant un bruit de réacteur qui venait dans ma direction.
    Je me souviens très exactement que je me trouvais derrière l’usine de volets roulants DAKO qui se situait entre Masevaux et Lauw, suivant la Doller pour une partie de pêche.
    Donc en regardant le ciel, je vis deux F100 qui sortaient de la vallée de Masevaux sur un cap Ballon D’alsace/Mulhouse, en faisant des manoeuvres serrées , a basse altitude.
    Spectacle que j’ai vraiment apprécié, sauf qu’en lisant le journal le lendemain je vis que mes deux acrobates avaient percuté la planète. Plus tard sur la base, les anciens se souvenaient biens de cette anecdote, car l’un des avion avait eu la bonne idée d’éparpiller ses pièces et obus, sur un tas de charbon de la SNCF, et qu’ils avaient dû trier ledit tas (gros) à la main pour en extraire les munitions .
    Voilà j’espère avoir apporté un peu d’eau au moulin, et je précise que j’ai passé vingt années à la 13, au Germas et à l’escadron 2/13 en tant que mécano avion.
    A la Chasse…..

    Jean-Luc Marbach

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