Le 17 Janvier 1991 une patrouille de 12 Jaguar attaquait la base de Al Jaber en Irak, réalisant ainsi la première mission française de la campagne aérienne de la Guerre du Golfe.
A l’époque, j’étais en stage de ski à Val d’Isère et le 16, comme tous les soirs après manger, on s’était retrouvés devant la télévision pour voir les « Guillaume Durand » des différentes chaines occuper l’antenne avec le peu d’informations dont ils disposaient. Mais ce soir-là, ils nous annoncent que depuis peu de temps les communications étaient brouillées et que l’activité aérienne était plus importante que d’habitude avec notamment le décollage de F15 et de F4. En allant se coucher, j’annonce que c’était pour cette nuit et que ça allait « cogner ». Ma réflexion est tombée à plat et ce d’autant plus qu’un de nos anciens généraux bien étoilés, consultant de la chaine TV, avait dit que toute cette activité n’était qu’agitation destinée à énerver les gens d’en face ; ceux qui me connaissaient m’ont regardé avec crédulité et les autres se sont demandés : « c’est qui celui-là ? ». Celui là était un ancien pilote qui avait passé toute sa carrière opérationnelle sur Jaguar et qui lors d’un stage guerre électronique chez les Américains à Ramstein (car j’étais aussi spécialiste GE) s’était vu exposer le plan d’intervention d’une campagne aérienne : brouillage des communications avec les C 130 « Compass Call », mise en place des avions de supériorité aérienne (F 15 principalement) des supports GE (A6 Prowler et F4G) puis en final les avions d’attaque air / sol ; à quelques détails près, c’est ce que nous avait raconté le commentateur télé.
Sachant qu’en matière de défense sol / air, la menace était bien plus importante que celle qu’on avait rencontré en Afrique, j’étais inquiet pour mes anciens collègues et j’avoue que je n’ai pas très bien dormi, mais très certainement plus et bien mieux que ceux qui allaient affronter les troupes de Sadam. Le lendemain vers 7 heures du matin, je me suis jeté sur la télécommande de la TV ; toutes les chaines ne parlaient que de cette première mission qui avait failli tourner à la catastrophe. La campagne aérienne avait bien démarré dans la nuit et plusieurs Jaguar français avaient été touchés au cours de l’attaque de la base d’Al Jaber. Mais tous confirmaient l’information principale : « tous les avions étaient rentrés ! ».
La guerre du Golfe ne peut pas se résumer uniquement à cette mission, mais il faut reconnaitre que ce fut un moment vraiment spécial pour les participants. Quelques mois après, un des pilotes de la patrouille m’a fait lire le récit de la mission (qui à ma connaissance n’a pas été publié) et un passage m’avait particulièrement marqué. C’était au plus fort de l’attaque ; il volait à 100 ft, devant lui il voyait les traçantes des projectiles des défenses aériennes et il racontait que pour les éviter il était passé dessous et ainsi avait poussé sur le manche malgré le peu de hauteur entre son avion et le sol !
Sur le site j’ai déjà mis en ligne le récit de plusieurs pilotes de la 1ère patrouille :
C’est passé tout prêt pour Charly
17 Janvier 1991 ; attaque du terrain d’Al Jaber
La guerre du Golfe ; c’était il y a 25 ans
Je ne peux m’empêcher d’avoir une pensée pour Jean Luc MANSION dit « Schnappy », leader de la patrouille qui nous a quitté l’année dernière et auquel j’avais aussi consacré un article. Tous les ans, à la date anniversaire les pilotes de la première patrouille ont pris l’habitude de se retrouver et cette année pour le trentième anniversaire, Schnappy va leur manquer.