L’année 1961, pour les deux nouvelles escadres de l’Armée de l’Air équipée du North American F-100 Super Sabre, va se traduire par des changements importants.
Entre le 1er et le 30 juin 1961, la 11ème Escadre fait mouvement vers la Base Aérienne 136 de Bremgarten en République Fédérale d’Allemagne où stationnait jusqu’alors la 4ème Escadre dotée de Republic F-84F Thunderstreak, cette dernière, ce faisant, venant s’installer à Luxeuil (base où elle se trouve encore aujourd’hui avec deux escadrons de Mirage 111E). Mais la “Onze” n’est pas la seule à s’expatrier dans la Zone française d’Allemagne. Le 40 juin, la 3ème Escadre quitte Reims pour aller s’installer sur la B.A. 439 de Lahr-Hugsweier où la 13ème E.C.T.T., équipée de F-86K Sabre, lui laisse la place en se repliant sur Colmar, de l’autre côté du Rhin.
Le “strike” atomique et l’OTAN
En 1963, ses qualités d’attaque en basse altitude valent au F-100 de devenir le premier chasseur de l’Armée de l’Air à assurer, dans le cadre de la 4ème ATAF de l’OTAN, la mission nucléaire tactique, dite mission “strike” avec la bombe atomique américaine MK 43. L’emport de ce formidable engin de 4 m de long et d’une puissance supérieure aux bombes atomiques de la 2ème guerre mondiale se fait sur pylône central en F-100F mais en configuration dissymétrique sur F-100D. L’avion a alors l’engin sous l’aile gauche, entre deux réservoirs de 200 US gallons, tandis que sous l’aile droite on accroche une “banane” de 275 US gallons et un seul 200 US gal. Cette disposition un peu spéciale, oblige les pilotes à beaucoup d’entraînement et à un perfectionnement de leur aptitude au vol en TBA (très basse altitude). Parallèlement, en même temps que les armuriers, ils reçoivent une instruction spécifique au matériel et missions nucléaires. En fait, si les armuriers des 3ème et 4ème Escadre seront initiés au maniement des bombes MK 43 par les Américains sur des engins factices, les pilotes français ne voleront (officiellement) jamais avec un engin réel accroché sous l’aile, et très rarement, d’ailleurs, avec une bombe factice, les missions appropriées se faisant toujours avec un pylône vide.
Le premier escadron assigné à cette mission “strike” est I’EC 2/11 “Vosges”. Il est opérationnel à compter du 20 mai 1963. Il s’agit pour cette unité, et celles qui la suivront, d’assurer l’alerte atomique 24 h sur 24 avec deux avions stationnés dans un enclos gardienné par une compagnie de personnels de I’U.S. Air Force et spécialement réservé aux seuls pilotes et mécaniciens français autorisés. C’est, en effet, l’époque du commandement intégré de l’OTAN ; Français et Américains travaillant en coopération étroite à la défense commune. Toutes les forces aériennes du 1er CATac sont au début des années soixante, rappelons-le, rattachées à la 4ème ATAF (QG à Ramstein AB, R.F.A.) composée aussi d’unités aériennes allemandes, canadiennes et américaines, et en temps de guerre c’est le rôle du commandement de la 4ème ATAF de prendre le relais du commandement français. Ce passage de l’option “paix” à l’option “guerre” oblige donc ces unités à de fréquentes manœuvres afin d’accroître l’efficacité de coopération entre les différentes aviations de l’OTAN, le point culminant de ces exercices étant atteint lors de compétitions tactiques amicales entre unités des Allied Tactical Air Forces (ATAF) des différents pays de l’alliance.
Ainsi, en 1963, est organisée, sur la Base Aérienne de Rhein Hopsten (RFA) la deuxième compétition annuelle pour armes tactiques (la première avait eu lieu en 1962 sur la base de St-Dizier), réunissant les Forces Alliées Centre Europe (AFCENT), opposant les Forces de la 2ème ATAF (RAF en RFA, Force Aérienne Belge, Forces Aériennes Néerlandaises et Allemandes), et la 4ème ATAF, sans les Canadiens, absents cette année-là.
La France a gagné ce deuxième concours grâce à l’équipe de F-100D du 1/3 “Navarre” composé des Ltt Chirouze, Ltt Labat, Cne Bonnet, Ltt Ollivier et Ltt Albert, ce dernier vainqueur du tir air-sol et surnommé “BigGun” (Gros canon) par les pilotes américains.
En juin 1964, c’est sur la base américaine de Chaumont AB (ex-base des “Tigres” du 366th TFW doté de F-84F) qu’est organisée cette compétition. Quatre pilotes français de I’EC 4/1 1 “Roussillon” participent à ce concours dans les rangs de la 4ème ATAF qui remporte aisément la rencontre : Cne Grenier, Cne Frapier, Ltt Gadan, S/C Léonard, Officier de renseignement Ltt Saillet. Les missions consistent en des navigations basse altitude (sans utilisation des aides à la navigation), avec attaque de différents objectifs et se terminent toujours par un tir réel sur le champ de tir de Suippe, dans les disciplines suivantes :
– Tir au canon ou tir au sol (4 passes)
– Tir d la roquette (1 passe)
– Bombardement en vol rasant (ou “skip bombing”) sur cible avec deux bombes de 25 livres, la meilleure étant retenue au résultat final.
– Bombardement en semi-piqué ou LABS (Low Altitude Bombing System) qui simule le bombardement nucléaire avec une bombe d’exercice. Le Ltt Gadan se distingue en remportant la coupe de tir roquettes, le S/C Léonard finissant second du bombardement en vol rasant précédé du Ltt Toussaint de la FAé Belge, sur F-84F. A cette époque, la 11ème Escadre comptait dans ses rangs de “vieux” pilotes chevronnés qui étaient de véritables figures : Ad/C Brie (“le bon bel”), Ad/C Bouscaren (“le chinois”), Cne Grenier, Cne Lécuyer (“Nicolas”), Cne Barbier (“Mike”), Cne Marsouin (“le kamikaze”), Ad/C Goigne (le boute-en-train de l’escadre), Ad/C Hay (“La Fouine”), pilote français qui avec 4000 heures totalise le plus d’heures de vol sur F-100 dans l’Armée de l’Air.
Deux faits marquent l’année 1966, année où la France quitte l’organisation intégrée de l’OTAN : la fin de la mission nucléaire pour le Super Sabre, due au départ des spécialistes américains sur les bases de Bremgarten et de Lahr, le 1er juillet, et l’évacuation des bases US et canadiennes situées dans le nord-est de la France. En janvier de cette même année, la 3ème EC a commencé à percevoir ses premiers Mirages III E à Lahr, appareils qui reprendront plus tard la mission nucléaire tactique à partir des installations de Luxeuil. Progressivement l’escadre lègue tous ses F-100D/F à la 11ème EC, qui regroupe ainsi tous les F-100 utilisés par l’Armée de l’Air. Cette dernière peut alors créer le 1er avril 1966, un troisième escadron : le 3/11 “Corse”. Cet escadron hérite de vingt F-100D de la 3ème EC et de quatre F-100F dont le premier est posé par le S/Lt Vernex. La “Trois” ayant fait ses adieux à Lahr vient s’installer en septembre 1967 sur la base de Nancy-Ochey en cohabitation, pour quelques mois, avec les Mystère IVA de la 7ème Escadre de Chasse. La base de Lahr restée vacante après le départ des F-100 est reprise en 1968 par les Canadair Sabre Mk.6 du 439e Squadron de la RCAF venant de Marville (France), puis, quelque temps plus tard, par les appareils des 444ème et 430ème Squadron.
Ayant perdu leur vocation nucléaire, les F-100 de la 11ème EC restent à Bremgarten encore quelques mois, mais pour le compte de la France. avant de venir s’installer sur la base de Toul-Rosière en Haye, construite par les Américains et laissée vacante après leur départ. Le déménagement dure trois mois, de juillet à septembre 1967, avec les seuls moyens mis en œuvre par l’escadre. Le 13 septembre 1967, se pose. sur cette nouvelle base, le premier F-100 D que pilote le Cdt Ghesquière, commandant l’Escadre. Les autres suivront au fur et à mesure. Le 3/11 “Corse” quant à lui, arrive à Toul quelques semaines plus tard que ses deux escadrons frères, après avoir été détaché pendant plusieurs mois sur la base de Colmar, avec comme compagnons les Mirage de la 13ème Escadre.
La 11ème EC se voit confier de nouvelles missions, cette fois dans le cadre de la FATac (Force Aérienne Tactique).
– Mission de défense aérienne haute et basse altitude, appui au sol des troupes, protection des bases FAS (Forces Aériennes Stratégiques).
– Dans le cadre des accords de Berlin : mission principale d’attaque au sol et mission secondaire de défense aérienne. Pour cela, elle participe aux manœuvres alliées et à la protection du couloir aérien au-dessus de la République Démocratique Allemande (R.D.A.).
Elle assure, par ailleurs, le mûrissement des jeunes pilotes qui viennent faire un certain nombre d’heures de vol avant de passer sur Mirage. Pour cela, I’EC 3/11 “Corse” tint pendant quelques mois le rôle d’Escadron de Transformation des pilotes de “Super Sabre” et, à ce titre, eut en compte la majorité des biplaces. C’est également au 3/11 que les pilotes s’initient à la technique du ravitaillement en vol et reçoivent leur qualification. En effet, certains appareils reçus en 1958 possèdent une perche sous l’aile droite. La France ne pratique pas le ravitaillement en vol à cette date et les perches devenant inutiles et s’usant, on les retire. Mais à partir de 1967, on s’intéresse aux possibilités jusqu’alors inutilisées du Super Sabre en montant sous l’aile droite non plus la perche droite mais la perche coudée dite “col de cygne”, offrant au pilote une meilleure visibilité lors des séances de ravitaillement. Après quelques essais sur Vautour et la technique bien mise au point, on passe sur le F-100 ou un tiers des avions reçoivent cette option.
Le Super Sabre est une vraie “bassine volante” et grâce à ce procédé sa distance franchissable passe à 6500 km. Sa capacité d’emport interne en carburant est de 4 500l et de 8 000l avec bidons (2 X1 000l + 2 x 750l). Rappelons qu’avant l’arrivée de son successeur, en l’occurrence le “Jaguar”, à partir de 1973, le F-100 fut le seul chasseur de l’Armée de l’Air ravitaillable en vol, donnant, de ce fait, à la 11ème EC le pouvoir de déployer en quelques heures et avec l’assistance des C-135 F des FAS (Forces Aériennes Stratégiques) acquis en 1964, la valeur d’un escadron sur un théâtre d’opérations extérieur. A ce titre, on lui confie la mission de participation aux plans de renforcement particulier d’un certain nombre de territoires francophones d’Afrique, dans le cadre de la CAFI (Composante Air des Forces d’Intervention), devenue plus tard la FAI (Force Aérienne d’Intervention).
– En 1968, un F-100 de l’EC 3/11 “Corse” effectue, pour la première fois, le raid Toul-Dakar avec deux escales techniques. Ce succès aidant, il amène d’autres raids dans les pays d’Afrique francophone (Abidjan – Niamey – Libreville. etc.) avec quelques manœuvres locales.
– 1969, l’activité continue intensivement en Métropole. En mars 1969, le 3/11 part en campagne de tir à Cazaux. Le 24 mai, lors des manœuvres de la FATac, la 11ème EC met en œuvre 32 avions dont 30 font un “super” défilé avec à leur tête comme leader le Lt/Col Bonneval.
– Octobre 1969, campagne de remorquage de cible au profit de la 5e EC sur la base de Solenzara (Coupe CAFDA).
– Décembre 4969, manœuvres Lafayette. avec attaque du porte-avions US SARATOGA avec huit F-100 au départ d’Istres ; le bâtiment se trouve à l’est de la Sardaigne, suite au mauvais temps, il n’attend pas les intrus (Phantom vent arrière, Corsair en finale, Corsair au catapultage). On ne vit jamais autant d’avions dans tous les sens et dans un volume aussi réduit. Bien sûr, la France gagna, tout comme elle gagna le concours AFCENT de l’année, monopolisant les trois premières places au tir canon.
– Avril 1970, la première grande manœuvre africaine avec déplacement des F-100 du 3/11 à Djibouti a lieu dans le cadre de la CAFI. Pour les pilotes non “lâché ravitaillement le voyage se fait en DC-6 (aller et retour).
– Décembre 1970, nouvelle étape en Afrique ou trois pilotes décollent d’Istres pour Djibouti et Tananarive, soit le plus long raid de l’histoire du F-100.
– Novembre 1971, trois F-100 participent à une évaluation opérationnelle de trois mois à Djibouti, évaluation rendue nécessaire par les conditions climatiques particulières en TFAI. Celles-ci posent, en effet, des problèmes d’adaptation non seulement pour les avions mais aussi pour le personnel au sol et les pilotes. Cette évaluation est positive et quelques F-400 privilégiés peuvent entamer une nouvelle carrière dans ce coin chaud de l’Afrique.
– En 1972, lors de la coupe Comète l’Ad/C Marmier du 3/11 remporte haut la main l’épreuve de voltige devant les autres concurrents ébahis par cette prestation. Il y avait 25 escadrons présents, le second vainqueur est un pilote de Mirage IIIE de l’EC 3/2.
Mais malgré sa robustesse et son âge, le F-100 s’use. Aussi, à partir de 1973, la firme North American propose à la France un programme de rajeunissement d’une trentaine d’avions par le renforcement du caisson central, l’épaississement de la voilure et du renforcement du longeron supérieur de fuselage. Les travaux sont effectués par les ateliers de la SNIAS de Châteauroux. Ainsi la durée de vie de l’avion se voit augmentée de 1 000 heures passant de 4 000 à 5 000 heures. Le dernier appareil en cours de modification en janvier 1975 était le plus ancien de la 11 EC avec un total de 4 200 heures de vol.
Parallèlement aux travaux de remise à neuf des avions, la SNIAS entreprend également le camouflage de ce “squale”, le rendant encore plus agressif. Les travaux durent de 1972 jusqu’en 1976 ou la totalité des avions reçoit ce camouflage inspiré du schéma américain à trois tons de couleurs en surfaces supérieures (ocre, vert et gris brun), et gris-bleu clair dessous. La taille du sérial, placé à mi- fuselage, devient plus petite ainsi que les cocardes, le drapeau tricolore de dérive disparaissant. Auparavant, les avions avaient gardé leur couleur métal naturel puis, par la suite, avaient été recouverts d’une couche d’argent mat acrylique anti-corrosion, sauf en partie arrière du fuselage où en raison de la chaleur émise par le réacteur P&W J57 de 4 650 kgp à sec et 6 250 kgp avec PC aucune peinture ne pouvait tenir. Le premier F-100D camouflé arrive à Toul le 23 juin 1972 et porte le sérial 54-2160, code 11-ET. Le janvier 1973, la 11 EC entame une nouvelle carrière avec la création sur la B.A. 188 de Djibouti de I’E.C. 4/11 “Jura” qui trouve ses pilotes au sein des trois autres escadrons. Equipé, à ses débuts de huit chasseurs F-100 (deux du 1/11, deux du 2/11 et quatre avions (ravit.) du 3/11 dont un F-100F), il succède aux six Douglas AD-4 Skyraider de I’E.A.A. (Escadron d’Appui Aérien) 04/024 “Aurès Némentcha” (cet escadron assurait, depuis 10 ans, la coopération avec les forces terrestres sous la forme d’exercices d’appui-feu et d’appui-renseignements). Le 29 décembre 1972, I’EAA 04/021 est dissous après avoir accompli 22 600 heures de vol.
L’EC 4/11 “Jura” reprend les traditions du 3/11 “Jura”, ainsi que ses insignes. Mais compte tenu de l’effectif réduit, seul l’insigne de la 1ère escadrille (SPA 158 “Serpentaire”) est porté sur la dérive, à gauche. La dotation passe assez rapidement à quinze avions en automne 1975 ce qui va permettre la création de la seconde escadrille en septembre 1976. Ainsi. à partir de janvier 1977, on voit apparaître à droite des dérives, l’insigne du “Sphinx” de la SPA 181. Unité de la FATac, appartenant à la 11EC basée à Toul, I’EC 4/11 est mis pour emploi à la disposition du Commandement “Air” en TFAI et ses missions principales vont de la défense aérienne et de l’appui-feu à la reconnaissance photo avec sa caméra P2 filmant vers l’arrière (prévue d l’origine pour restituer le tir de bombes),
La plupart de ces F-100 D/F sont des appareils rachetés aux Américains par la France et que l’on appelle “nationaux”. Les autres, les PAM, sont épuisés en priorité par le “Jura” avant d’être restitués, par les soins de l’Escadron de Convoyage 070 de Châteaudun, aux autorités américaines en Grande-Bretagne, sur la base de Sculthorpe où la plupart sont ferraillés sur place. Pour ceux restés à Toul, ils continuent de voler jusqu’à ce qu’ils atteignent le seuil des 4 000 heures de vol où ils sont conduits dans un hangar en attendant leur convoyage pour l’Angleterre. Quant aux “Nationaux”, ils partent pour Châteaudun pour y être mis en conserve par les soins de I’EAA 601.
Mais, tout comme le 1er mai 1958, le F-100 était venu prendre la place du F-84F, le 7 février 1975 son successeur se présente, dans le ciel de Toul en provenance de Toulouse escorté par trois F-100, le Jaguar E-29 (code 14-RA) que pilote le Cdt Eyraud, commandant la 11ème Escadre et le Cne Robert, commandant le 3/11 “Corse”. Le 13 juin 1975, quatre autres appareils arrivent portant sur la dérive les insignes des SPA 88 “Serpent” et SPA 69 “Chat”. Ils sont affectés à I’EC 3/11 qui reprend vie après 6 mois de silence pendant lesquels pilotes et mécaniciens s’étaient familiarisés avec cette nouvelle monture.
Le 31 décembre 1975. le 3/11 effectue son dernier vol F-100 après 36 704 heures. L’EC 1/11 “Roussillon” en fait de même le 10 octobre 1975 après 81 746 h 25. Les avions sont alors affectés au 2/11 “Vosges”. Le 1/11 reprend ses vols le 1er mars 1976 avec ses quatre premiers “Jaguar”. Le 2/11 “Vosges” doit également laisser la place au Jaguar et le 25 juin 1977, après 71 347 heures de vol, le dernier vol F-100 a lieu sur la base de Toul après une émouvante cérémonie, réunissant les anciens pilotes et mécaniciens de ce prestigieux avion.
Les F-100 de la 11 EC ont effectué 205 000 heures de vol au 25 juin 1977.
C’est également à cette date qu’un F-100D du 2/11 (codé 11-MR/55-2736) piloté par le Cne Zurlinden effectue son dernier vol à la tête d’une patrouille de neuf Jaguar, avant de se rendre au musée de l’Air du Bourget. Quelques semaines auparavant, le 11mai 1977, le Colonel Boichot, commandant la base de Toul, a effectué le dernier vol du F-100D 54-2431/14-MJ. (NDLR. Au cours de ce vol, le colonel BOICHOT a subi une extinction réacteur et au retour du vol, sans faire part de cet incident, il a inscrit sur la forme 11 d’une manière totalement naturelle « Rallumage OK »). Cet avion est maintenant érigé en monument sur la BA 136 de Toul. Quant au Colonel Boichot, signalons qu’il fut le premier pilote français à avoir tenu les commandes d’un F-100 en 1958 sur la base de Nellis (Nevada). Mais un événement marque une nouvelle étape dans l’histoire de I’EC 4/11 “Jura” avec la création sur la B.A. 110 de Creil, le 1er septembre 1970, de I’EC 3/10 “Vexin” (doté de Mirage III C) destiné à prendre la relève des derniers F-100, à compter du 10 décembre 1978. Quant au 4/11, il est dissous le 31 décembre 1978 à Djibouti après plus de 10 000 heures de vol sur F-100. La 10 0000 heure de vol étant réalisée le 24 mai 1978 par le Capitaine Croci sur le F-100D “14-YE” 54-2130, le dernier vol d’un chasseur-bombardier F-100 dans l’Armée de l’Air ayant lieu le 12 décembre 1978, après 20 ans pendant lesquelles il a dispensé à tous ses pilotes des joies immenses et, comme l’a dit un pilote de Jaguar du 4/11 “Il sera toujours regretté par ceux qui ont volé avec et envié par ceux qui n’ont pu voler dessus”…
Patrick BIGEL
Ci-contre, en haut, le F-100D-35NH 55-2734 de l’EC 3/11 “Corse” lors d’une séance de ravitaillement en vol avec un Boeing C-135F des FAS, capacité alors réservée au seul 3/11.
Ci-contre, dans une alvéole bétonnée de la base de Lahr (R.F.A.) en 1963, le F-100D-5NA 54-2156 “3-JD” de l’EC 2/3 “Champagne” avec sa livrée complète, soit : nez, trappe de train avant, saumons et cloisons d’ailes rouges.
En bas, à Toul-Rosières sur la marguerite du 3/11 en juin 1972, un des plus anciens biplaces utilisés par l’Escadre de Chasse : le F-100-15-NA 56-4017 “II-RW” qui servira plus tard à Djibouti avec le 4/11.
A droite, trois vues montrant des Super Sabre à nez jaune de I’EC 1/3 “Navarre” au début des années soixante.
Au centre, le F-100D-IO-NA “3-IS” 54-2171 s’arrache de la piste de Lahr. Après sept ans au 1/3, il sera affecté à la 11ème Escadre en 1965. En bas. quatre F-100D du 1/3 en attente de décollage à Lahr, dont le F-100D10-NA 54-2212 ”3-IK”. Cet avion, qui sera rendu aux Américains en janvier 1976, est aujourd’hui exposé à l’entrée de la base de réserve américaine de RAF Sculthorpe, en Angleterre, repeint aux couleurs de l’USAF.
La photo du bas, prise au-dessus de la Forêt Noire, laisse voir, sur le F-100F-15-NA ”3-IK” 56-4009, la configuration adoptée pour les missions de navigation à longue distance ou les convoyages : deux bidons de 200 US gallons sur pylônes internes et deux “bananes” de 275 US gallons sur pylônes médians. On note l’insigne d’escadron (jumelage des SPA 95 et 153) porté sous l’habitacle. Cet appareil volera plus tard à la 11ème Escadre avant d’être rendu aux Américains en octobre 197
Trois photos de Super Sabre de l’EC 2/3 “Champagne” photographiés au début et au milieu des années soixante dans leur livrée complète à finitions rouges.
En haut, le F-100D-15-NA 54-2265 “3-JR” vu côté SPA 67 “Cigogne” ; cet avion. restitué en mars 1976 à FIJSAF, est aujourd’hui préservé sur la base de RAF Wethersfield (Grande-Bretagne) repeint aux couleurs du célèbre “Triple Zilch” du Lt/Col R. Toliver (“FW-OW’, USAF serial number 56-3000).
Au centre. le F-100F-15.NA 56-4008 “3-JV” en configuration lisse, côté SPA 75 “Charognard”, avec la perche de ravitaillement droite montée en place. Cet avion sera rendu aux Américains en janvier 1975 après avoir servi dix ans à la 11ème Escadre à Toul-Rosières.
Ci-dessous, le F-100D-35-NH 55-2737 “3-JJ” au roulage sur le taxiway de Lahr. La configuration dissymétrique des réservoirs supplémentaires est intéressante (un bidon de 200 US gallons et une ‘banane” de 275 US gallons sous l’aile droite et deux 200 US gallons sous l’aile gauche) et permet de présumer que l’avion va décoller pour une mission de “strike” nucléaire ; le vide entre les bidons de gauche représentant la masse absente d’une bombe atomique MK.43.
Première partie de l’histoire des F100 français ; article paru dans AIR FAN, avec l’aimable autorisation de “Bibi”.
F 100 Français
L’épopée tricolore du North American F-100D “Super Sabre”, un avion de combat hors du commun qui fut le premier appareil de l’Armée de l’Air à être doté de l’arme atomique, à pouvoir pratiquer le ravitaillement en vol et à être capable du vol supersonique soutenu : trois particularités alors à l’avant-garde de la guerre moderne.
Le 12 décembre 1978, à plusieurs milliers de kilomètres de la France, étaient effectués les derniers vols opérationnels de chasseurs bombardiers North American F-100 Super Sabre dans l’Armée de l’Air. Réalisées par l’escadron de Chasse 4/1 1 “Jura”, détaché de la 11ème Escadre de Chasse de Toul Rosières en République de Djibouti, ces ultimes sorties sonnaient le glas de vingt ans de bons et loyaux services. Le Super Sabre entrait alors dans l’histoire des ailes françaises. De pilier opérationnel du 1er CATac, à ses débuts, jusqu’à sa mission finale de coopération armée outre-mer, le F-100 quittait la FATac la tête haute.
Lorsque le 1er Commandement Aérien Tactique (CATac) de l’Armée de l’Air est formé en juillet 1954, ses forces sont en totalité rassemblées dans l’est de la France et sur le sol de la République Fédérale d’Allemagne. En temps de guerre, son état-major et ses moyens sont destinés à être intégrés à la 4th Allied Tactical Air Force ou 4e ATAF de l’OTAN, seul commandement opérationnel interallié responsable de sa mise en œuvre et charnière du système de défense des pays du Pacte Atlantique en Centre Europe (AFCENT).
Le 1er Commandement Aérien Tactique, héritier du 1er Corps Aérien Français de 1945, est alors composé de sept escadres de chasse mettant en œuvre quelque dix-huit escadrons de chasse et de reconnaissance représentant, avec les réserves, presque cinq cents avions de combat ! L’état-major du 1er CATac est implanté sur la base de Lahr Hugsweier, en territoire allemand, à quelques dizaines de kilomètres de Strasbourg, de l’autre côté du Rhin. Les appareils qui composent ce “coin offensif” de l’Armée de l’Air ont pour noms : Republic F-84E/G Thunder jet et Dassault Ouragan, les seconds devant assurer la couverture des premiers, chasseurs-bombardiers tactiques type des forces aériennes des pays de l’OTAN largement éprouvés en Corée.
A partir de 1955, les Republic F-84E et G sont graduellement remplacés par les F-84F et RF-84F plus performants, tandis que les Mystère IVA succèdent aux Ouragan. Mais au milieu des années cinquante, également, l’ère du vol supersonique opérationnel vient d’être ouverte. C’est un nouvel avion, successeur du célèbre F-86 Sabre, de la Guerre de Corée, le F-100 Super Sabre, autre création de la firme North American, qui depuis quelques mois est devenu le premier avion produit en série capable de voler en palier à Mach 1. Les premières séries de F-100, les F-100A, donnent à I’U.S. Air Force son premier intercepteur supersonique de jour. Mais ce rôle n’est plus approprié au moment où les premiers chasseurs tout-temps supersoniques, les Convair F-102A, commencent à entrer en service dans l’Air Defense Command. Désireuse d’utiliser le F-100 dans la mission de chasse-bombardement, I’U.S. Air Force commande alors le F-100C, version du Super Sabre dotée d’un moteur plus puissant et optimisé pour l’attaque au sol. Exactement 476 F-100C seront construits et livrés à l’USAF.
Afin d’augmenter son potentiel d’attaque, cette même USAF décide, en 1956, de commander une nouvelle version du Super Sabre dérivée du F-IOOC. Ce nouvel avion, ravitaillable en vol et capable d’emporter une arme nucléaire ou thermonucléaire, est le F-100D. De toutes les versions du F-100, la version “D” sera la plus produite, 1274 exemplaires devant sortir des usines North American d’Inglewood (Californie) et de Columbus (Ohio). Sur ce total impressionnant, plusieurs centaines de F-100D cependant ne devaient pas être utilisées plus de quelques mois par l’USAF. En effet, à partir de 1958, dans le cadre du Military Assistance Program de l’OTAN, les Etats-Unis décident de relever le potentiel aérien de leurs alliés européens en leur fournissant, en remplacement d’une partie de leurs chasseurs-bombardiers Thunderjet et Thunderstreak subsoniques, des F-100D Super Sabre. Premiers récipiendaires de l’aide américaine, les Danske Flyvevaabnet danoises et l’Armée de l’Air reçoivent respectivement soixante et quatre-vingt-dix F-100D. Par la suite, la Türk Hava Kuvvetleri turque recevra également des Super Sabre, principalement en versions « D et F ». Le F-100F, est la version biplace du F-100D réservée à l’entraînement opérationnel mais également capable de missions de guerre. Ce modèle diffère par son fuselage rallongé de 0,91 m afin de permettre l’installation d’un second membre d’équipage en place arrière. Il perd cependant en capacité de carburant et il ne possède plus que deux des quatre canons Pontiac M39E de 20 mm présents sur le F-100D monoplace. Des F-100F seront livrés au Danemark et à la France en même temps que les F-100D : respectivement environ dix et quatorze. La plupart des North American F-100D et F qui vont être livrés à l’Armée de l’Air ont déjà effectué un certain nombre d’heures de vol au sein de I’U.S. Air Force. Avant leur transfert à la France, ils vont être révisés entièrement dans les ateliers de maintenance que la firme North American a installé à Barajas, près de Madrid en Espagne.
La “Onze”, première sur F100
La 11ème Escadre de Chasse de l’Armée de l’Air, qui stationne depuis le 12 juin 1953 sur la base aérienne de Luxeuil-St-Sauveur, est la première unité du 1er CATac à être désignée pour voler sur Super Sabre. Equipée, depuis 1956, avec des chasseurs bombardiers F-84F Thunderstreak, la 11ème Escadre assure à la fois la défense aérienne de la zone opérationnelle de la 1ère Région Aérienne et l’appui au sol des éléments de la 1ère Armée française stationnée par-delà le Rhin.
Fin 1957, les deux escadrons constitutifs de la 11ème Escadre, les Escadrons de Chasse 1/11 « Roussillon » et 2/11 « Vosges » (I’E.C. 3/11 « Jura » vient tout juste d’être dissous) se préparent à troquer leur vieux F-84F (dont certains ont participé à l’intervention de Suez d’octobre 1956) contre des F-100D tout neufs, à quelques éraflures près. A partir du 1er janvier 1958, un noyau de pilotes de I’E.C. 2/11 est dépêché aux Etats-Unis, sur ta base de Luke (Arizona), afin de se transformer sur F- 100. Peu après leur retour en France, le 1er mai 1958, en fin de matinée, apparaissent dans le ciel de Luxeuil les trois premiers F-100D pour l’Armée de l’Air, convoyés depuis Madrid par des pilotes américains. Quelques jours plus tard commence, pour les quelques rares privilégiés, l’entraînement sur cette nouvelle monture qui constitue, à cette date, l’avion de combat le plus puissant de l’Armée de l’Air. Ce faisant, les pilotes français découvrent vite les possibilités de la post-combustion (“la P.C”, en argot de pilote). Et ils s’en donnent à cœur joie. Cette innovation, encore récente à l’époque, leur apporte près de 60 % de puissance supplémentaire instantanée et leur permet ainsi d’intercepter, dans le ciel de l’est, tout ce qui passe à leur portée ! Il faudra attendre un an et demi pour voir la 11ème Escadre de Chasse atteindre le stade opérationnel sur F-100. Fin 1959, c’est chose faite.
La “Trois” en deux
Après la “Onze”, c’est au tour de la 3ème Escadre de Chasse de se voir attribuer des F-100D. Cette escadre, stationnée depuis le printemps de 1950 sur la base de Reims-Bétheny, été à l’origine la première de l’Armée de l’Air à percevoir des chasseurs bombardiers F-84E Thunderjet. La “Trois” est, en 1958, forte de deux escadrons : les E.C. 1/3 « Navarre » et 2/3 « Champagne » ; son troisième escadron traditionnel, I’E.C. 3/3 « Ardennes » a été dissous l’année précédente, au mois de novembre. Comme la 11ème Escadre de Luxeuil, la 3ème Escadre de Reims vole depuis 1956 sur F-84F Thunderstreak lorsqu’elle entame sa transformation sur F-100D Super Sabre à compter de septembre 1958. Comme pour la 11ème Escadre également, un important détachement des deux escadrons de la “Trois” a participé à l’intervention de Suez depuis la base britannique de RAF Akrotiri de Chypre.
Les premiers F-100D étiquetés pour l’escadre arrivent à Reims en janvier 1959 au terme d’un voyage sans escale au-dessus de l’Atlantique Nord réalisé par des pilotes américains ravitaillés, en cours de route, par des KC-97 du Strategic Air Command de l’USAF. Ils sont aussitôt attribués au 1/3 « Navarre ». Alors même que pilotes et mécaniciens de l’escadron se familiarisent avec le F- 100D, ils sont bientôt rejoints par un échelon précurseur du 2/3 « Champagne ». En effet, en attendant ses propres avions, le 2/3 a reçu l’ordre d’entamer sa « transfo » sur les appareils du 1/3. C’est seulement à la mi-juillet qu’il touchera ses avions en propre, avions qui font partie du dernier lot de base cédé à l’Armée de l’Air par l’USAF. Au début de l’année 1960, juste un peu plus d’un mois après la « Onze », la « Trois » est déclarée opérationnelle sur ses Super Sabre.
Dans la foulée, et pour ne pas perdre de temps, les deux escadres nouvellement équipées de F-100 se déplacent en escadrons constitués (un de chaque escadre) sur la base de Cazaux pour effectuer leur première campagne de tir officielle sur F-100. Menée de concert par I’E.C. 1/11 « Roussillon », avec treize avions, et I’E.C. 2/3 « Champagne », avec onze appareils, cette campagne se traduit rapidement par un très grand nombre de sorties opérationnelles. Pour donner une idée de l’activité déployée pendant cette campagne inaugurale sur F-100, citons seulement quelques chiffres pour les mois de mars et avril 1960 : 937 sorties aériennes, 681 heures de vol enregistrées, 611 tirs canons effectués pour 44 907 obus tirés en passes air-air, 164 tirs canons pour 13 054 obus en tir air-sol sans oublier 432 roquettes, 18 bidons de napalm et 10 bombes US MK 25 largués. Pour l’Armée de l’Air, ce premier contact avec les réalités opérationnelles commence bien. Confiante, elle aborde une nouvelle décennie avec un chasseur bombardier américain de loin supérieur à tout ce qui se fait de l’autre côté du « Rideau de Fer » à cette époque.
(à suivre) Patrick BIGEL
Ci-contre, dans le ciel d’Allemagne, au début des années soixante, deux F-100D de l’E.C. 2/3 « Champagne ». Le 54-2128 au premier plan est le « 3-JA » et le 54- 2166, au fond, le « 3-JH ». Ces deux avions volèrent sans incident durant seize ans avant d’être rendus aux Américains.
Ci-dessous, décollage de Lohr. “P.C.” allumée. en 1964, une mission de bombardement d’exercice.
La panoplie d’armement du F-100D présentée en 1961 à Luxeuil. On distingue un F-84F de la 1ère Escadre à l’arrière-plan.
Image de titre : en avril 1978, à quelques mois seulement du retrait définitif des deniers North American F 100 Super Sabre de l’armée de l’Air et virtuellement au terme de vingt ans de service. un F-100D (USAF serial 54-2154) de l’Escadron de Chasse 4/11 « Jura » basé en République de Djibouti, survole les étendues arides du Ghoubet el Kharob. Dernier avion de combat américain à voler sous couleurs françaises, sa carrière s’est déjà achevée en Métropole où un autre chasseur-bombardier, le Jaguar franco-britannique, le remplace déjà dans les trois autres escadrons de I’Escadre de Chasse de Toul Rosières.
Ci-dessus : un air nul autre pareil ! un F-100D de l’E.C. 2/11 « Vosges » dévoile son impressionnante entrée d’air tandis que des armuriers arriment une bombe de 500 lb sur le pylône intérieur droit.
En bas le début des F- 100 dans l’Armée de l’Air. Fin 1958, sur le parking de la base de Luxeuil, les Super Sabre de la 11ème Escadre (la première à recevoir cet avion dans le cadre de l’OTAN) font connaissance avec les frimas de l’Est. Aucun insigne ou marque d’unité n’est encore visible sur le fuselage des avions récemment transférés de I’lJSAF à l’Armée de l’Air et c’est peine si l’on distingue les restes de l’inscription “U.S. Air Force” effacée des flancs très brillants des avions.
Ci-contre, un North American F-100D Super Sabre de l’Armée l’Air dans la livrée des débuts. Les avions ne reçurent pas leurs indicatifs et insignes d’escadrons tout de suite. Le F-100D-15-NA illustré ici en 1959, alors qu’il était en service à l’EC 1 /3, porte toujours son « buzz-number” d’origine : “M-247”. Il deviendra, par la suite, le « 3-10 ».
Au centre, le F-100F-15NA 56-4014″ vu peu après son arrivée à la 3ème à l’Escadre de Reims à la fin de 1958. Il volera par la suite à la 11EC avant d’être rendu aux Américains en 1977.
Ci-dessous, moins chanceux sera le F100-15-NA 56-4013 « FW-013 » photographié détruit en janvier de 1959 à son arrivée à la « Trois ». Il sera détruit moins de sept mois plus tard.
Ci-dessous, les F-100 de la 11ème Escadre sur leur parking de Luxeuil en 1960, perches Pitot au garde-à-vous. Les « buzz number » américains d’origine ont disparu et les premiers insignes d’escadrons ont fait leur apparition ; ici, le “Masque de comédie” de la 1ère Escadrille de I’EC 1/11 « Roussillon ».
Au sein de la 11ème Escadre de Chasse, les North American F – 100 Super Sabre servirent jusqu’au bout de 1958 à 1978. d’un escadron à un autre comme le montre ces les photos de ces deux pages qui illustrent deux Super Sabre, les F 100D 5-NA numéros USAF 54-2148 et 54-2138 à deux périodes distinctes de leur affectation de cette escadre.
Vu à Toul en juin 1972 le « 148 » aux couleurs de I’E.C 1/11 « Roussillon », l’avion porte indicatif « 11-EM » et l’insigne de la 2ème escadrille sur la dérive.
Vu à Toul en juin 1972, le « 138 » porte les marques de l’E.C.3/11 « Corse » avec l’insigne de la 1ère escadrille peint sur la dérive. On note sur cette vue les réservoirs supplémentaires de 335 gallons US (dits “grosses bananes ») utilisés surtout par le « Corse » pour ses. déploiements tactiques grandes distance avec ravitaillement en vol.
Le même appareil (148) vu en avril 1975 armé de deux bombes freinées de 500 lb US. Lors d’une campagne de tir à Cazaux. Cette fois-ci, l’avion est camouflé et porte les marques de l’E.C. 2/11 « Vosges ». On note l’absence d’insigne d’escadrille sur la dérive, insigne qui apparait cependant sur la manche de la combinaison du pilote (SPA 91). L’indicatif « 11-MK » et Ie sérial” sont de taille nettement plus réduite.
On retrouve le « 138 » revêtu d’un camouflage sur le parking de la BA188 de Djibouti en mai 1976 avec cette fois-ci les marques et couleurs de l’E.C. 4/11 « Jura ». L’insigne de la 1ère escadrille est visible, en petits sur la dérive.
Remerciements : une fois n’est pas coutume, l’auteur tient à remercier dès maintenant les personnes qui l’ont aidé dans la réalisation de cette étude, tant par leur assistance technique que par leurs photos. En premier lieu, un très grand merci à Jean-Michel Guhl auquel l’on doit la forme de cet article et nombre d’illustrations, à Alain Crosnier, à Michel Cristescu, à Michel Fournier et à Thierry Cuq. Un grand merci également au Capitaine Croci, un vétéran des F-100, au Capitane Léonard de I’E.T. 3/60 et au Lieutenant Deltrieu, OSV 11 E.C. Merci, enfin, à Bernard Régnier pour nous avoir permis de publier certaines de ses photos et au Lt. Col Chenel sans lequel nous aurions eu quelques difficultés d’identification relatives de la vie des Super Sabre français et à leurs immatriculations successives au cours de leur carrière.
Les hasards de la vie m’ont fait rencontrer André BOISNAUD, un grand ancien puisque macaronné en 1951, passé par la 11EC et qui a bien voulu me laisser quelques souvenirs d’une époque lointaine et très peu abordée au sein de la 11EC, je veux parler de ce qu’on appelle “La Guerre d’Algérie”. A ma connaissance, hormis le numéro spécial de RNV (Res Non Verba) consacré à ce conflit, il n’y a que très peu d’articles, voire aucun, qui ont relaté cette partie de l’histoire.
Il est question de PGA, de Vampire, de JU 52,…., bref, c’était il y a (très) longtemps et André n’a pratiquement gardé (ou fait) de photos de cette époque.
La guerre d’Algérie a duré de la Toussaint 1954 jusqu’à l’indépendance de l’Algérie en juillet 1962. Mais le “cessez le feu” du 19 mars 1962 n’ayant pas donné lieu à la fin des combats, les morts des Forces Françaises et surtout des Harkis ont pu se compter jusqu’en 1964.
Des combats se sont également déroulés en Tunisie et au Maroc jusqu’à l’indépendance de ces deux pays, mais aussi, parfois, bien après… à l’exemple des émeutes de Meknès et de Bizerte.
Au Maroc, après une période de tension, les émeutes suivies des opérations de sécurité ont débuté le 20 août 1955. Arrivé sur la base de Meknès en novembre 1954, déjà moniteur de chasse (sous-chef de patrouille) après un court passage au 5ème escadron d’entraînement des moniteurs, j’étais affecté au 4ème escadron. Fin juillet revenu de permission en Oranie, j’étais sous les ordres du capitaine Rajau au 1er escadron, les quatre autres escadrons comme une grande partie de la Base étaient en permission.
Des heurts avaient eu lieu dans la ville de Moulay-Idriss : on sentait la pression monter. Le capitaine Rajau que j’avais connu comme commandant d’escadrille à la première escadre me fit désigner comme PGA (Poste de Guidage Avancé) auprès du Groupement d’Intervention numéro 2 (GMI 2). Je fus ainsi auprès de mes camarades de l’Armée de Terre le 19 août pour une intervention aérienne fictive sur la route de Fès. Tout se passa bien et j’étais de retour à la Base en début d’après-midi. Tard dans la soirée, il me fut ordonné de rejoindre le GMI le lendemain matin tôt à El Hajeb pour effectuer une manœuvre d’intimidation lors d’un “souk” sur la route de Khénifra. Je rejoignis donc une compagnie de la Légion avec mon chauffeur et deux radios. Nous avions aussi une Jeep radio avec remorque dotée d’un groupe électrogène. Arrivé au “souk”, déploiement de la compagnie de la Légion puis arrivée d’une patrouille de Vampires pour effectuer des passes fictives. Durant celles-ci le capitaine commandant la compagnie de la Légion m’avertit que la situation se dégradait sérieusement à Khénifra : « Continue avec les avions, nous, nous partons tout de suite » me dit-il.
Pris d’un doute après une ou deux attaques fictives, je préviens le chef de patrouille de ce qui se passe et lui demande d’aller voir. Après avoir plié bagages, nous partons sur les traces de nos camarades légionnaires et les ayant rejoints, je décide de m’intercaler au milieu de la colonne. Quelques minutes après, la patrouille de Vampire fait sur nous un passage à très basse altitude. Ayant compris qu’il y avait un message à recevoir, mes hommes et moi nous nous arrêtons pour mettre en route la radio ; puis j’arrête le dernier véhicule de légion qui avait une antenne :
« – Avez-vous la liaison avec le capitaine ?
– Oui, mon lieutenant
– Restez avec moi »…
Le chef de patrouille dès contact radio établi m’annonce :
– « Des émeutiers fortement armés sont aux portes de la ville européenne, dépêchez-vous ». Je retransmets aussitôt le message.
Peu après, aux portes de Khénifra le commandant de compagnie donne l’ordre d’engager les mitrailleuses. Nous encerclons la Médina et je place mon PGA sur une hauteur. Dans la soirée, le reste du GMI 2 nous rejoint : il y a là des éléments d’un régiment de Spahis sur auto-mitrailleuse Panhard, des Tirailleurs Marocains et un État-major aux ordres du colonel commandant le 12ème Régiment de Chasseurs d’Afrique. Nous sommes nous-mêmes encerclés par des cavaliers Zayans dont certaines tribus étaient encore insoumises en 1933. Le commandement Air au Maroc m’envoie des Vampire armés mais culasse à l’avant pour intimidation alors que je réclame une intervention armée. Le téléphone fonctionne encore. J’appelle les Ops d’Air Maroc et demande si on se moque de moi.
Le lendemain une intervention est programmée, mais l’Armée de l’Air n’a plus tiré au Maroc depuis la guerre du Rif (1925-26) et le colonel P… commandant la base de Meknès veut être là. Une patrouille de 4 Vampire armés d’obus inertes, aux mains de 4 officiers dont 2 qui ont dû être rappelés de permission, doit intervenir. Le PGA volant me contacte et j’entends ceci :
– « Où sont-ils ces fameux cavaliers ? », Je lève les yeux et voit très haut dans le ciel l’avion qui doit guider l’intervention,
« -A quelle altitude êtes-vous ?
– 3000 mètres
– Si vous descendiez vers 1000 mètres vous les verriez ! »
Les Vampires arrivent et doivent tirer au plus près mais pas sur les cavaliers Zayans. Heureusement le n° 4, un “chibani” de la guerre d’Indochine, tire vraiment plus près et les chevaux s’emballent… Il y a pas mal de victimes. Afin de renforcer notre dispositif, le grand commandement au Maroc décide de parachuter sur notre position des éléments du 6° BCP à l’aide de “JU 52” de la base 707. Cela fut exécuté tard le soir ! Nous avons pu récupérer environ 1/3 des parachutés au moment où la nuit tombait. Les autres Africains, redoutant la nuit, car encore très animistes à l’époque, se sont terrés et cachés dans des buissons jusqu’au petit matin où nous les avons retrouvés en totalité.
Un soir, je suis prévenu qu’à la nuit tombée, j’aurai à accueillir, sans contact radio, un hélicoptère Bell pour évacuation sanitaire. En guise de Drop Zone, je dispose donc 4 véhicules pour former un carré éclairé par les phares. Le pilote ne la verra pas et ira se poser à quelques centaines de mètres de là. Je l’ai rejoint et nous avons décollé pour la zone balisée : ce fut mon premier vol en hélicoptère !
Après plusieurs interventions, l’Aman (Trêve) est accordé. Normalement tout est fini, Cependant peu après j’aperçois un indigène qui en se cachant au fond d’un oued à sec se dirige vers la ville européenne. Je fais tirer sur lui non seulement un de mes radios mais aussi le chauffeur marocain qui est près du PGA avec un “poste 300” pour la liaison avec le PC. Le rebelle est entouré de plusieurs rafales mais il continue à avancer sur la route après s’être retourné. Je fais le tour de la hauteur où je suis stationné et pistolet au poing je le fais prisonnier. Des légionnaires arrivent, mais dès que l’individu les voit il refuse d’avancer… C’est là que j’ai vu le plus beau et le plus puissant “coup de pied au cul” de ma vie. L’homme était drogué au “kif” et muni d’un grand couteau à égorger les moutons, très affûté, allait en zone européenne pour assassiner quelqu’un. Ce couteau m’a été remis par le lieutenant B… commandant une des sections de la compagnie de la Légion ; lors d’un de mes nombreux déménagements j’ai perdu cette “arme”.
Peu de temps après, le lieutenant B… avec un chauffeur arrive pour me voir sur mon piton et me dit : « On va prendre un pot au quartier » et décide de passer par la médina, lui au volant, moi à droite dans la jeep et un légionnaire avec son PM (Pistolet Mitrailleur) en place arrière. Bien que l’arrêt des hostilités ait été proclamé, il y a, sur la Grand Place, de nombreux hommes en armes, nous passons à quelques mètres d’eux et l’ancien de Dîen Bîen Phu s’affole un peu et accélère très fort… Je vois arriver un virage à 90° à l’approche de l’oued… « Calme toi, on va se planter ! » Il ralentit… dans le virage, un fût de 200 litres d’huile a été répandu… Ouf on est passé ! Au même endroit la veille un jeune soldat sur l’aile d’une AML est tombé après avoir été blessé, son corps a été retrouvé calciné.
Au “foyer” le capitaine est là et me demande :
– « Que veux tu boire ?
– un Perrier !
– Alors tu crois, dit Monsieur Kronenbourg que je vais te payer de l’eau ?
– C’est moi qui vous offre un verre, dis-je
– Tu crois aussi pouvoir payer chez moi ?… ».
Monsieur Kronenbourg, c’est le capitaine S…. commandant la 1ère Compagnie Portée du 4ème Régiment Étranger d’Infanterie !
Durant les jours suivants, les opérations ont continué. J’ai eu régulièrement des avions armés qui ont fait leur travail et au bout de quelques jours j’ai été relevé par un camarade. En arrivant (par avion) sur la Base, je vais me présenter chez le colonel. Il n’est pas là. Je rentre chez moi puis je prends la décision d’aller voir le capitaine Rajau. Dès mon arrivée il me demande si j’ai vu le colonel. Ma réponse négative le rassure, puis il me demande de tout lui raconter.
Nous partons sur la Base voir le “grand chef” : je ne dois pas répondre aux questions, c’est lui qui répondra car il plane au-dessus de ma tête une demande de tribunal militaire pour insubordination. Face au colonel tout se passe comme prévu, le capitaine Rajau répondant aux questions…, on ne parla plus de tribunal militaire.
Quelques semaines plus tard, il me fut communiqué le contenu des notes qui me furent attribuées par le colonel commandant le GMI2 (la valeur militaire, déco pour remplacer la croix de guerre, ne fut créé qu’en 1956). Ces notes furent mises à la poubelle à la BA 708 de Meknès et donc non insérées aux miennes. Ce n’est que trois ans plus tard que, grâce au commandant de la 13ème escadre, elles réintégrèrent mon livret de notes.
Ce séjour aux environs de Khénifra m’a permis de découvrir la camaraderie et l’estime interarmes, mais surtout l’amitié et le respect des légionnaires, en particulier de quelqu’un qui m’a marqué jusqu’à ce jour : le lieutenant Henri Bonnet, ancien de Dîen Bîen Phu et de la Longue Marche (dans les camps de la mort du Viet Min) après trois séjours en Indochine.
Durant les opérations au Maroc je suis reparti en PGA dans les montagnes du Rif en octobre 1955… mais cela est une autre histoire…
Bernard Cayrier – Pilote de chasse – Pilote de course…
Être pilote de Jaguar à 32 ans avec plus de 2 000 heures de vol à son actif n’est déjà pas une mince affaire. Mais lorsque l’on sait que le même Bernard Cayrier, adjudant-chef, à la base de Saint-Dizier passe le plus clair de ses loisirs aux commandes d’une Fiat Abarth 1000, qu’il participe à des courses de côtes et qu’il remporte coupes après coupes, cela relève décidément d’un caractère très entreprenant.
Le pilotage d’un chasseur ou la conduite d’une dévoreuse de macadam ne demande certes pas les mêmes qualités, mais que ce soit en basse altitude ou dans les épingles à cheveux la volonté et la soif de réussir sont tout aussi intenses. Avant de se retrouver dans la cabine d’un Jaguar, la progression au sein des écoles de pilotage n’est déjà pas chose facile, tous les élèves pilotes sont là pour en juger. A bien des nuances près il en est de même pour les courses de côtes et d’une façon générale pour la compétition à “quatre roues”
Un cheminement semé d’embûches
Animé par la passion des courses, Cayrier commence par collectionner livres et revues spécialisées. “Afin d’être plus près de la course”, selon son expression il passe l’examen de commissaire de piste. Le vrai contact estpris, etle rêve devientpeu à peu réalité. Mais l’ambiance vrombissante des bords de piste fait de cet amateur éclairé un spécialiste chevronné, et naît en lui ce désir profond de n’être plus spectateur, de devenir l’un des acteurs de ces poursuites effrénées contre le temps… Ce temps matérialisé au creux de la main par le chronomètre contre lequel maintenant il va falloir lutter. Un pari tenu malgré les difficultés toujours croissantes qui règnent dans le monde du sport automobile. Ce n’est un secret pour personne, la compétition “auto” est la plus onéreuse des passions.
Bernard sur l’échelle de son Jaguar
“Mettez du “boost” dans votre moteur”
Il y a un an, pour quelques milliers de francs, il déniche une pièce rarissime : l’Abarth 850 TC que Claude Ballot Léna fait connaître au grand public plusieurs années auparavant en arrachant une victoire sans appel aux célèbres Mini Cooper à Magny Cours. Son engin, bien caché au fond d’un garage, il entreprend de transformer cette brave mais modeste voiture en une véritable “bête de course”, il refait le bloc moteur et monte un “Bialbero”… 105 chevaux à 8000 tours !
Légère et puissante la machine devient déjà apte au slalom “très spécial” qui est celui des courses de côtes. La boîte sera celle d’une 850 S. Premier de ses problèmes : trouver les bonnes pièces qui devront être aussi précises que les rouages d’une horloge helvétique ! Comme le veut la légende c’est en Suisse qu’il trouve tous les morceaux manquants du puzzle. Ce pilote du manche et du volant passe tout un hiver à préparer l’objet de ses rêves. La journée, il la vit à plusieurs milliers de mètres d’altitude, sous une bulle de verre, à des vitesses que seuls ses compagnons et lui-même peuvent estimer. Le soir couché sous le moteur de l’Abarth les doigts pleins de camboui, il dirige la métamorphose d’une banale voiture de série en une reine de la route.
L’Abarth 850 TC de Claude Ballot Léna
“Chasseur” de Sponsors
Aidé par un ami dont les connaissances mécaniques en font un partenaire précieux, Cayrier met au point l’Abarth et commence les reconnaissances. Chaque détail du parcours est enregistré, classé, chaque virage testé au maximum des possibilités de la voiture. Cayrier se met alors en quête d’éventuels sponsors. De leur bonne volonté dépend l’avenir d’un coureur et d’une écurie. Au stade de la compétition l’aide financière se fait indispensable. Les voitures sont d’excellents supports publicitaires, et les sponsors qui ne sont pas de mécènes en sont bien conscients. Les résultats ne se font pas attendre, toujours bien placé dans les courses de côtes régionales il remporte deux fois la victoire dans sa classe, et obtient en récompense de tous ses résultats pour l’année le challenge interarmées.
L’espoir en monoplace
Pour 1982 Cayrier a investi dans une formule monoplace moteur Talbot 1300. Cette fois-ci il espère se surpasser et pourquoi pas tenter la compétition nationale. Mais : “une saison régionale revient à 10 000 francs environ, pour le championnat de France il faut compter le double ou le triple au moins”. Pour l’instantje n’ai pas de sponsors et sans aide financière inutile de continuer, mais je garde le moral”. La chance qu’aide sa volonté, lui sourira une fois de plus, espérons-le.
Si le sport auto occupe tous les loisirs de ce pilote, l’aviation reste sa passion première : “Quand j’étais enfant, les pilotes étaientpour moi les symboles vivants de l’aventure et de l’héroïsme. Je regardais les avions de loin, puis j’ai commencé à voler à l’aéro-club de Montélimar”. Breveté pilote d’avion léger en 1970, Bernard Cayrier est entré dans l’Armée de l’air cinq ans plus tard.
Aujourd’hui, pilote de Jaguar, il est sous-chef de patrouille au 1/7 “Provence”
Un peu en retard pour la célébration du 80ème anniversaire du débarquement, mais cet article écrit par le Généra SIFFRE (le père de la GE) retrace le rôle de la Guerre électronique lors de cette opération.
Comme souvent, il est difficile de quantifier l’efficacité de ces moyens.
Quel est le rapport ave la 11 EC ? La GE (guerre électronique) a été la mission principale de l’EC 2/11 VOSGES qui a notamment vu arriver les premiers équipements (PHIMAT, BOA, BARRACUDA, BOZ, ….) au cours des années 70/80.
Cette photo d’un détecteur acoustique symbolise l’effort humain et technologique des Allemands pour surveiller leurs frontières. Leurs radars étant vulnérables au brouillage, ils conservaient et amélioraient des capteurs moins performants mais insensibles aux actions électroniques.
“Ad augusta per angusta” (On arrive au triomphe qu’en surmontant maintes difficultés,) Si le débarquement de Normandie fut le succès que l’on connaît, c’est sans aucun doute en partie grâce aux actions de guerre électronique menées par les Alliés.
La planification de l’opération Overlord comprenait un volet guerre électronique, parfaitement intégré avec la manœuvre globale. Les buts étaient clairement définis. Il s’agissait tout d’abord d’empêcher l’ennemi d’avoir un préavis d’alerte de l’arrivée de la force de débarquement et un suivi précis de sa progression. Il fallait aussi empêcher les batteries côtières d’effectuer des tirs contrôlés par radar contre la force navale. Ensuite, il s’agissait de soutenir les opérations aériennes par la dégradation et la confusion du dispositif de veille, les interférences avec les fréquences de contrôle de la chasse et la création de menaces de diversion. Enfin, il fallait retarder les mouvements des réserves des forces terrestres de l’ennemi, en donnant l’illusion de la menace d’assauts aériens et maritimes.
La planification débuta en décembre 1943.
Pendant les travaux préparatoires, des efforts considérables furent réalisés par les services de renseignement pour suivre l’ordre de bataille électronique de la défense aérienne et des défenses côtières. Par la fusion du renseignement en provenance de toutes les sources, une exploitation technique et des simulations réalisées sur les côtes de l’Écosse, ils firent également une assez bonne évaluation des capacités du dispositif de défense. Leurs sources de renseignement étaient de trois types : électroniques, « Imagerie » et humaines.
Les sources électroniques (« les écoutes » des communications et des radars) permettaient d’obtenir les caractéristiques techniques des signaux pouvant faire l’objet de mesures de brouillage. À cette époque, les localisations des émetteurs, données par ces sources, n’étaient pas très précises. Les sources « imagerie » étaient constituées par les avions de reconnaissance aérienne, qui identifiaient et localisaient les radars avec une grande précision. Enfin, les sources humaines, Résistance et « espions », donnaient une description parfois très précise des matériels et de leurs localisations.
Destruction et invention
Les actions préparatoires eurent lieu en France et en Grande-Bretagne. Sur le territoire français, il s’agissait de détruire par des bombardements aériens les radars, les réseaux de communications et les stations allemandes d’écoute et de brouillage électronique. Malgré leur caractère intense et systématique (environ 2 000 missions en 10 semaines), ces actions ne devaient pas donner d’indices aux Allemands sur le futur lieu du débarquement. Elles étaient donc généralisées depuis la Bretagne jusqu’à la Belgique. Un certain nombre de stations radar avaient été sélectionnées pour ne pas être détruites et servir de support aux opérations de désinformation de l’ennemi. L’importance de ces actions est à souligner. Les stations radar étaient bien protégées et les pertes alliées furent parfois très élevées. Les Américains estiment que sur les 92 radars identifiés et localisés sur les côtes de France et de Belgique, il n’en restait que 16 opérationnels à la veille du débarquement. Dans la nuit du 1 er au 2 juin 1944, pour la destruction d’une station radar située à proximité de Cherbourg, les équipages français des groupes lourds du Bomber command furent engagés pour la première fois. En Grande-Bretagne, il s’agissait d’un travail secret de développement, de production et de mise au point de matériels et de tactiques de guerre électronique. Les Alliés avaient en effet remarqué que l’efficacité d’un moyen ou d’une tactique GE décroît au fur et à mesure de la répétition de son emploi. Les premières utilisations de moyens et de tactiques étaient donc réservées pour des opérations majeures, et leur autorisation d’emploi était soumise à la décision des plus hautes autorités politiques. On peut citer : le premier emploi de brouilleurs aéroportés par les forces US à l’occasion du débarquement en Sicile dans la nuit du 9 au 10 juillet 1943, les premiers largages de leurres « windows » par le Bomber command pour les missions de bombardement sur Hambourg dans la nuit du 24 au 25 juillet 1943. Ces « windows » étaient dimensionnées pour agir contre les radars des chasseurs de nuit et les radars au sol, de tir et de poursuite. Pour le débarquement, de nouvelles « windows », adaptées aux fréquences des radars de veille, furent utilisées pour la première fois.
Il est probable également que les Alliés étudièrent avec beaucoup d’attention leur échec du 12 février 1942, lorsque le Scharnhorst, le Gneisenau et le Prinz Eugen échappèrent impunément à la Navy et à l’aviation qui attendaient leur passage dans la Manche. Une opération de guerre électronique, montée par les Allemands, avait totalement trompé le dispositif de détection, déployé sur les côtes et dans les airs. Pendant la nuit du débarquement, les Alliés craignaient le brouillage, par les Allemands, du système Eurêka de radionavigation utilisé par les avions de parachutage.
Dans la nuit du 1er au 2 juin 1944, pour la destruction d’une station radar située à proximité de Cherbourg, les équipages français des groupes lourds du Bomber Command furent engagés pour la première fois
Les contraintes à prendre en compte étaient nombreuses et complexes. Il fallait brouiller, leurrer, décevoir et détruire les radars et les réseaux de transmissions. En même temps, les radars, les moyens de radionavigation et les communications alliés devaient être préservés des interférences. Il fallait également ne pas brouiller un certain nombre de transmissions ennemies qui étaient indispensables aux services de renseignement, pour surveiller les réseaux allemands et reconstituer la vision de l’ennemi sur le déroulement de la bataille, ainsi que ses capacités et ses intentions. La coordination entre les actions de guerre électronique et celles de recueil de renseignement fut très complexe à réaliser. L’établissement de l’ordre d’opération des transmissions a dû être un travail de titan. Le volume, la diversité et la concentration des forces armes et ennemies, ainsi que le caractère secret des opérations ont dû poser des problèmes que même les ordinateurs d’aujourd’hui auraient des difficultés à résoudre.
De nombreuses actions
Les actions de brouillage étaient réalisées depuis l’Angleterre, avec des émetteurs de grande puissance, destinés à brouiller principalement les communications allemandes, des bâtiments en mer (brouillage des radars de veille et de conduite de tir, ballons réflecteurs pour simuler une flotte importante près de Fécamp…), et des avions contre les radars et les communications (largage de leurres « windows », manœuvres de déception par le suivi d’itinéraires de navigation spécialement étudiés, brouillage par bruit et déception…)
Ces actions ont souvent été décrites dans la littérature relative à la seconde guerre mondiale. Mais on parle peu de l’efficacité obtenue. Il est certain que, sans parler de la dégradation des écoutes par le brouillage ami, les centaines de brouilleurs et les millions de leurres utilisés ont obligatoirement eu une incidence sur les capacités du dispositif allié. Il y a peu de témoignages dans ce domaine. Dans les sources bibliographiques, on cite le brouillage fratricide du système Gee de radionavigation par les brouilleurs Mandrel.
Radar Seetakt au-dessus d’une casemate dans la région du Cap de la Hague
L’efficacité des mesures de brouillage contre les radars de conduite de tir des batteries côtières, est assez bien démontrée par le fait que sur les milliers de navires de la force, peu furent touchés et un seul bâtiment de combat fut coulé. Dans la zone de l’attaque fictive, des tirs furent observés contre les leurres.
L’effet sur la défense aérienne est plus difficile à estimer. La chasse effectua des missions contre les avions brouilleurs, qui simulaient la protection électronique d’un raid massif de bombardement transitant au-dessus du nord-est de la France. Un avion brouilleur fut abattu. Mais dans la zone des parachutages, là où plus de 1 000 avions et planeurs réalisèrent le débarquement, il n’y eut pas de pertes à cause de la chasse. Ce succès n’est que partiellement le fait de la guerre électronique. En raison des bombardements aériens alliés sur tout le continent, il y avait pénurie d’avions, de carburant, et les bases de déploiement étaient repliées loin des côtes. La Flak fut la principale victime du brouillage.
Sur l’efficacité des actions de guerre électronique contre l’ensemble du dispositif allemand, la lecture des travaux du Col Salles (voir bibliographie) est très instructive. À partir de recherches effectuées dans les archives allemandes, il présente les déploiements et l’organisation des sites de radars. L’analyse des messages échangés dans la nuit montre les limites de la confusion induite au niveau du haut commandement, qui ne savait pas déterminer si le débarquement majeur allait être réalisé au nord ou au sud de la Seine. Par contre, au niveau des responsables de secteurs réellement menacés, la situation était assez clairement suivie. Ainsi, dès 3 h le 6 juin, les stations radars d’Arromanches, La Percée et La Pernelle détectent au radar de nombreux navires faisant route vers la côte. Le nombre de radars détruits et l’efficacité des actions de brouillage étaient certainement inférieurs aux estimations.
Mais l’efficacité globale des actions de guerre électronique dans le succès du débarquement et la réduction des pertes alliées, est indéniable. Même si de bons renseignements étaient à la disposition du commandement allemand, ils étaient noyés parmi d’autres qui étaient faux. Hier comme aujourd’hui, le problème majeur n’est pas d’avoir la bonne information, mais de savoir l’extraire du fouillis des fausses informations. Souvent, l’arrivée d’un bon renseignement dans un ensemble cohérent de mauvais renseignements ne fait qu’ajouter à la confusion.
Pendant les opérations de débarquement en Normandie, comme pendant la guerre 14-18 et la guerre du Golfe, la guerre électronique a joué son rôle de réducteur des forces ennemies et de multiplicateur des forces amies.
Général Siffre
Bibliographie
The history of US electronic warfare (Alfred Price) Association of Old Crows.
Instruments of darkness (Alfred Price) Macdonald and Jane’s – Londres.
Confound and Destroy (Martin Streetly) Macdonald and Jane’s Londres.
La guerre ultra-secrète (1939-45) (R.V.
Jones) Plon (traduction de The most secret war).
Travaux non publiés du Col Salles (conseiller militaire du Mémorial du débarquement – Caen).
« Un jour, alors que j’étais écolier à Caen, un pilote est passé pour nous parler de l’armée de l’air. J’avais retenu tout son discours et, dès que j’ai pu, je me suis engagé. »
Je suis né le 29 avril 1934, à Annebault, près de Lisieux dans le Calvados.
Mon père Marcel était fonctionnaire géomètre et ma mère, femme au foyer. J’ai donc connu la guerre et, à 10 ans, j’ai vu le corps décharné d’un allemand qu’on avait laissé dans son char. Ça marque. Comme dans beaucoup de familles françaises, cette occupation avait laissé des traces. Mon grand-père paternel, boulanger du village, avait été dénoncé par un très jeune collabo et, avec d’autres commerçants, il a été fusillé la nuit même du débarquement à la prison de Caen. Ce n’est que quinze ans plus tard, qu’on a retrouvé leurs corps dans un charnier. Ces notions de courage, de liberté et de patrie, je les ai apprises et retenues dès ma première jeunesse.
Les martyrs du 6 juin 1944
De haut en bas et de gauche à droite. Mon grand-père, le maire de Montchamp et deux commerçant parmi les 70 hommes fusillés.
DEVENIR PILOTE DE CHASSE
Mon premier vol
Au mois d’octobre 1952, après mon BAC et un diplôme de mécanicien, j’ai donc voulu être pilote. Bien que j’aie été très bon élève, l’époque d’après-guerre, ne facilitait pas les engagements. J’ai passé le concours aux petites écuries à Versailles, dans des grandes pièces où pendant deux jours, nous étions 1 500 à subir des tas d’examens de calcul mental, littérature et autres tests psychotechniques, le plus difficile. Je me souviens que la visite médicale avait été particulièrement sévère. Sur les 1 500, j’ai fait partie des 35 qu’ils avaient sélectionnés ! Quelques mois plus tard, nous avons a été convoqués à Aulnat, près de Clermont-Ferrand, sur un terrain d’aviation où nous avons réalisé notre formation militaire de base. Nous sommes passés de caporal, caporal-chef puis sergent. A la fin de cette formation militaire nous avons été dirigés soit à Marrakech pour les pilotes de transports, soit au Canada pour les pilotes de chasse. Je parlais un peu anglais et je voulais la chasse ! Comme la France était pauvre en avions, nous avons été répartis, cinq par cinq, dans des aéroclubs en contrats avec l’armée de l’air pour la première phase de formation de 15 heures.
« Mon premier vol, 24 minutes, s’est effectué le 23 juin 1954 sur un STAMP biplan. J’avais ressenti une impression extraordinaire. Se retrouver là-haut ! Cela m’a fait penser à des vacances avec mes parents, au sommet du col d’Aubisque dans les Pyrénées à 1 700 mètres d’altitude. » Mais j’ai bien failli ne pas un mois plus tard, devenir pilote car, le 2 juillet, au bout de 6 heures de vol, nous nous sommes crashés avec mon moniteur, lors d’un exercice de « panne au décollage ». Mon moniteur m’avait encouragé à descendre trop bas et n’a pas hésité à donner un coup sur le manche qui a fait que l’avion a heurté un champ d’épis de blés drus. Nous en sommes sortis indemnes mais l’avion était détruit et le moniteur a été viré. Cela a été une excellente leçon d’humilité et de prudence, pour l’avenir. Je n’ai jamais oublié cette expérience. « Quand on est tout seul dans un avion et qu’on a vingt ans, on se croit le maître du monde ! »
Avec ses six ou sept cadrans donnant les informations principales comme les tours/moteur, l’altitude, une aiguille avec un gyroscope, le STAMP n’était pas impressionnant. Comme il n’y avait qu’un STAMP à l’aéroclub de Caen, après l’accident, j’ai dû me replier sur Grenoble où j’ai fait mon premier lâcher, à savoir, voler seul. C’était le 5 août 1954 : 27 minutes ! Je suis ensuite passé de cet avion rudimentaire à des avions beaucoup plus compliqués avec plusieurs dizaines de cadrans et autres instruments de pilotage. J’ai appris à faire des figures. J’ai poursuivi mon entraînement jusqu’à ce qu’il y ait une place dans les écoles de l’OTAN au CANADA.
En route vers le Canada (1954 — 1956)
J’ai débuté ma formation de pilote militaire au Canada en 1954. Les promotions étaient alors composées de délégations internationales de trente-cinq à quarante pilotes des pays membres de l’OTAN dont dix français. Je portais l’uniforme de l’armée de l’air française. La formation se déroulait alors en trois phases. Ainsi, je suis resté quatre mois dans l’Ontario pour les cours d’aéronautique au sol, neuf mois dans l’Alberta pour voler sur avion à hélices et enfin six mois dans le Manitoba sur avion à réaction. Le premier avion à hélice utilisé avait « une très belle gueule » le CHIPMUNK (écureuil). Après une vingtaine d’heures sur cet avion, nous sommes passés sur le T6 HARVARD que tout le monde connaît dans l’armée de l’air. Un biplace bien plus puissant. Plus tard, en Algérie, je piloterai à nouveau cet avion, cette fois-ci, armé pour la guerre. Puis, c’est sur le T33 « T.BIRD », que j’ai terminé mon cours au CANADA. L’avion à réaction a été une révolution. Sans lui, pas de Boeing ni d’Airbus. Mon premier vol de nuit sur cet avion à réaction s’est déroulé le 28 septembre 1956 et là, je me suis dit que, quand je rentrerai en France, je choisirai la chasse de nuit. La nuit, vous avez l’impression d’être seul au monde avec les étoiles. Et pourtant, j’en ai eu, des frayeurs, lors de ces vols !
PILOTE DE CHASSE
Stage de pilote de chasse au Maroc (1956)
« Un pilote de chasse ? C’est simple, c’est un pilote qui attaque les avions ennemis en combat aérien et qui protège ses troupes au sol, en tirant sur des cibles. C’est exactement ce que je voulais faire. »
Une fois breveté, je suis revenu en France. Je suis d’abord allé voir mes parents. Mon père était étonné car il pensait que je n’y arriverais pas et ma mère ne se rendait pas compte de ce que cela représentait pour moi. Puis je suis parti à Meknès, au nord du Maroc pour faire mon stage de pilote de chasse. Pourquoi j’ai choisi la chasse ? Parce que c’est se battre contre d’autres avions, à armes égales alors que les pilotes de bombardement, eux, ne font que larguer des bombes. J’ai volé pendant trois mois à Meknès, sur un avion anglais qui s’appelait le VAMPIRE. C’était un monoplace avec deux fuselages parallèles. On pouvait le mettre dans toutes les positions, lui faire faire toutes les figures acrobatiques qu’on voulait. Il était maniable et rapide. Il m’a tellement plu que j’ai terminé premier de ma promotion. C’est à partir de ce moment-là que j’ai pensé que j’étais un vrai pilote !
Ma guerre d’Algérie (juin 1957 à juillet 1958 et juin 1961 au 14 juillet 1962)
A mon retour en France, j’espérais être affecté sur une base métropolitaine mais, comme c’était la guerre d’Algérie, j’ai été envoyé dans ce pays sur la base française d’Orléansville (Chlef dans le nord du pays) sur T6, l’avion de mes débuts au Canada. J’y suis resté un an, jusqu’en juin 1958. La France a perdu pas mal d’avions en Algérie. Nous faisions beaucoup de protection de convois. Lorsque nous étions informés de la présence de fellaghas (combattant algérien) cachés au fond d’un oued, nous les délogions avec nos mitrailleuses et en utilisant des roquettes. Je faisais partie de l’armée de l’air et mon escadrille était parrainée par la base aérienne de Tours (30ème escadre de chasse de nuit). Après le confort du Canada, c’était spartiate ! On couchait sous la tente, sur des lits picot et il n’y avait pas d’eau courante. Je m’étais fait un ami, le capitaine Louchtchenko. Il sortait de polytechnique. Trois semaines après son arrivée, il s’est fait descendre avec ses mécaniciens. Les fellaghas leur avaient volé leurs chaussures, leurs montres et leurs armes. J’avais 23 ans et aujourd’hui, je m’en souviens encore comme si c’était hier. J’ai donné l’alerte et un hélicoptère est venu se poser pour ramener leurs corps à la base.
A ma connaissance, je suis l’un des seuls pilotes, et peut-être le seul, qui a demandé à passer huit jours avec les troupes au sol. J’ai crapahuté avec eux et ce n’était pas drôle. On marchait les uns après les autres, pour mener une embuscade. Alors que je participais à des opérations avec eux, je voyais les pilotes au-dessus et j’ai mieux compris combien l’aviation était nécessaire et combien de gars, nous avons pu sauver. Le plus difficile, c’était de trouver les endroits escarpés où se trouvaient les fellaghas. Nous avons fait des exercices en vol, où nous tirions devant les a troupes au sol, à 15 mètres, pour leur donner confiance en nous. La balle partait à 800 mètres/seconde et les étuis éjectés tombaient sur leurs dos. J’ai été touché quatre fois : une fois, dans un piqué, cela m’a couté un câble de commande du compensateur de profondeur et il s’en est fallu de peu que je percute une colline. Une deuxième fois, l’avion avait pris trois balles, dont une dans un circuit hydraulique, mais j’ai pu rentrer. La troisième fois, la balle a touché l’aile gauche pour se loger dans le montant du siège en aluminium, à 5 cm de mon rein gauche. La quatrième, c’était de face ; on pouvait voir la balle dans le capotage, qui est passée entre deux cylindres pour s’arrêter près de mon pied gauche (photo infra).
En Algérie, après avoir obtenu quatre citations, j’ai été décoré de la croix de la valeur militaire.
Retour en Métropole sur Vautour (1958 — 1961)
En juillet 1958, je suis revenu à ma base d’affectation : la 30ème escadre de chasse de nuit de Tours. J’attendais avec impatience que les VAUTOUR sortent des usines de Saint Nazaire. J’ai d’abord volé sur METEOR, biréacteur anglais. Puis j’ai été détaché à Cambrai sur MYSTERE IV, construit par Dassault. En piqué, il pouvait atteindre le Mach 1.3. Quand je suis revenu à Tours, j’ai enfin pu voler sur VAUTOUR (1959). Un avion formidable pour l’époque car il avait une autonomie de 3 heures, ce qui était rare pour un avion à réaction. Il pouvait monter jusqu’à 50 000 pieds (16 000 mètres). Il était assez bruyant mais quand-même moins que le Rafale aujourd’hui. Cet avion avait une puissance que je n’avais jamais eue dans mes avions précédents : chaque réacteur développait l’équivalent de 3 500 chevaux. Je disposais d’un radariste pour la chasse de nuit. En 1959, à 25 ans, j’ai obtenu ma licence de chef de bord, l’équivalent de sous-chef de patrouille dans la chasse de jour. J’ai effectué mon premier vol de nuit sur VAUTOUR en octobre 1959. Un premier vol dont je me souviens très bien car je n’ai pas pu atterrir à Tours, comme prévu, mais à Creil. La piste de Tours avait été endommagée par un accident au décollage d’un SMB2.
Mais moi, du moment que j’étais en vol et de nuit, j’étais heureux.
Gardien du ciel en VAUTOUR
« Pendant que les autres escadres dormaient, nous, on veillait. Aujourd’hui encore, des avions russes passent à la pointe de Brest pour photographier nos sous-marins. La nuit, les avions français les interceptent ; c’est comme ça qu’on le sait. »
Lors de cette époque, l’activité habituelle dans l’escadron consistait à s’entrainer à l’interception de jour et de nuit sur un avion hostile sous le contrôle d’un radar au sol (nom de code RAKI). La mission d’entrainement s’exécutait à deux appareils. Après un décollage et une montée sur la zone en patrouille, nous nous séparions sous les ordres de RAKI. Nous nous séparions alors d’une trentaine de nautiques (50 km environ). L’un des deux avions simulaient l’intrus ennemi pendant que l’autre simulait l’intercepteur. Une fois séparé, mon radariste me ramenait vers un point situé à 2500m à l’arrière de l’intrus. Le pilote prenait alors la finale de l’interception à son compte à partir de son propre écran radar et venait se positionner, à l’aide de l’écho radar en position de tir aux canons. Pour mieux comprendre, je vais présenter un cas réel d’interception d’un intrus en Algérie. Le FLN se faisait alors ravitailler en armes par un tas de monde, passant notamment par le Maroc. Un jour, des bateaux français avaient repéré un avion DC4 suspect, parti de Suède vers Oujda, au nord-est du Maroc, avec une escale à Nice. Un de mes amis, pilote de Vautour, a décollé de nuit d’Oran où il était en alerte pour intercepter ces avions.
Comment a t’il réalisé cette interception ?
Après son décollage, mon ami a contacté l’intrus sur la fréquence internationale de garde 119,7 (fréquence veillée obligatoirement par tout aéronef) en demandant de le suivre. En réponse, l’appareil a réduit sa vitesse de manière à gêner l’interception du Vautour, puis il a piqué vers la côte espagnole pour essayer d’échapper au radar du Vautour et fuir. Il s’est placé en arrière et en dessous de l’intrus. Après l’en avoir informé, il a tiré une rafale de semonce d’obus explosifs devant l’appareil, sans le toucher. Le message était clair : prochaine rafale, c’est pour vous ! ». L’avion a alors obtempéré et s’est posé sur le terrain de ORAN, escorté par mon ami. Cinq tonnes d’armes ont été récupéré et là encore, nous avons eu la confirmation que les Américains approvisionnaient le FLN en armes. En temps de paix l’Armée de l’air assure toujours une alerte permanente pour, par exemple, intercepter les avions de ligne lorsqu’ils dévient de leur couloir aérien ou des appareils en détresse. On se souvient très bien de la violente détonation qui a été ressentie le 30 septembre dernier, avant midi, à Paris et dans ses environs, et qui a suscité l’angoisse et l’interrogation de nombreux Parisiens. Il s’agissait simplement d’un RAFALE qui avait franchi le mur du son en interceptant, pour lui porter secours, un avion en difficulté dans notre espace aérien. Le tournoi de tennis de Roland Garros a dû s’arrêter quelques instants. « Pour un pilote, passer le mur du son, c’est d’une grande banalité ! De l’intérieur, on n’entend rien ! Mais à l’extérieur, ce n’est pas la même chose. Sur le VAUTOUR, par exemple, il y avait des parties de l’avion qui étaient déjà en supersonique alors que d’autres ne l’étaient pas encore. »
Nous effectuions également des missions de reconnaissance, notamment sur le territoire algérien. Voici un exemple réel :
– 1er février 1960 : mise en place à Oran depuis Tours (vol à 14 000 mètres d’altitude)
– 2 février 1960. Première mission : décollage de Oran et navigation à 100 mètres d’altitude (!) vers Tiaret (au centre de l’Algérie), Mecheria (au nord-ouest) et atterrissage à Colomb Bechar (près de la frontière marocaine) – 1 heure 15 de vol. Deuxième mission : décollage de Colomb Bechar vers Hassi Messaoud (au sud), Touggourt, puis atterrissage Telerghma, -1 heure 50 de vol.
– 3 février : retour vers Tours : 1 heure 15 de vol en haute altitude.
Ma valise était toujours prête !
C’est en 1960 que ma fille Patricia est née. J’étais si heureux d’avoir une fille ! Aujourd’hui elle est professeure de français à l’alliance française dans l’Arizona, après l’avoir été à Philadelphie. Par mon métier, je n’ai pas toujours été un père très présent, je le reconnais. Ce fut une année à la fois de bonheur et de chamboulements car la base de Tours était en plein déménagement sur Reims. En 1960, j’ai fait une campagne de tirs au camp de Ruchard, dans l’Indre et Loire.
« Le Vautour disposait de quatre canons de 30mm. Chaque obus pesait 820 grammes Lancé à 800 mètres par seconde, un seul suffisait à détruire un avion ou un véhicule. Avec une cadence de tir de 1 200 coups minute, c’était 4 800 obus qui étaient propulsés par minute, soit 80 obus à chaque seconde… Quelle puissance de feu En combat aérien, sur le VAUTOUR, le pilote appuyait sur la détente avant de voir l’avion ennemi. Il était guidé par son navigateur qui transférait les paramètres de tir à partir de 2500 m. A courte distance, quand le point de l’avion arrivait au centre du réticule de l’écran radar du pilote, les obus partaient automatiquement. Toujours en 1960, j’ai eu le plaisir et l’honneur de participer, avec six VAUTOUR, aux fêtes de l’indépendance de MADAGASCAR à TANANARIVE. Les seuls trajets étaient une aventure à eux seuls
– 24 mars 1960 : départ de Tours ;
– 25 mars : Tours — Reggan (2h50 de vol), coucher sur un matelas, plein de sable (peut-être contaminé car la première explosion nucléaire française avait eu lieu le mois précédent, février 1960, à proximité de la base de Reggan !)
– 26 mars : Reggan – Fort-Lamy, devenue Ndjamena (2h55 de vol)
– 27 mars : Fort-Lamy–Brazzaville (2H20 de vol), puis 24h de tourisme qui me permettent de traverser le fleuve Congo (4km der large) et de visiter Léopoldville la capitale du Congo belge, qui deviendra Kinshasa. J’ignorais alors, bien sûr que neuf ans plus tard je serai pilote à Air Congo qui deviendra Air Zaïre sous le règne du Président Mobutu
– 28 mars : Brazzaville-Kamina (1 h35 de vol). Nous sommes au Katanga, province minière du Congo, où les pilotes belges nous accueillent chaleureusement (mal la tête ! )
– 29 mars : Kamina-Salisbury (1 h40 de vol). Capitale de la Rhodésie, devenue Zimbambwé
– 30 mars : Salisbury-Tananarive (2h20 de vol), où nous séjournerons une semaine ; presque des vacances à l’exception d’un vol-défilé à 8 vautours le jour de l’indépendance, le 3 avril. En effet, quatre vautours B venus de Cognac nous avaient rejoints deux jours plus tôt. C’est là que j’ai connu mon ami, Jean-Marie TABLEAU qui se trouve être, aujourd’hui en janvier 2021, l’un deux porte-drapeaux du secteur 710 Guyenne de I’ANORAA !
Le retour, selon le trajet inverse, fût aussi agréable que l’aller et le 16 avril 1960 nous avions réintégré notre base de Tours. L’assistance technique pour cette mission était assurée par deux Nord Atlas, l’un précédent les avions de chasse et l’autre suivant les avions en convoyage. A la fin de cette année, j’ai été désigné chasseur de nuit pour un deuxième séjour en Algérie.
Deuxième détachement en Algérie (1961-1962)
J’ai effectué un deuxième séjour en Algérie de juin 1961 au 14 juillet 1962 et à la suite des accords d’Evian les avions n’étaient plus armés et nous n’effectuions que des missions de reconnaissance, même si la guerre était finie. Nos missions consistaient à détecter les passages de convois ennemis provenant du Maroc et de la Tunisie, via les barrages et les frontières. Une fois détectés, j’en informais les forces au sol qui effectuaient une interception. Le 14 juillet 1962, je suis rentré en métropole en DASSAULT 315. Le vol a duré 6h30 de Bône (Algérie) via Ajaccio, Orange pour atterrir à Reims.
Le Neu-Neu à Orange (1962 — 1965)
De retour en France, j’ai été affecté au fameux escadron Normandie-Niemen 2/30 de la 30ème escadre de chasse basée à Orange. C’est là que je suis passé chef de patrouille, c’est à-dire leader de plus de deux avions. C’est à Orange que j’ai commencé à participer à des manœuvres internationales. Par exemple, une des missions d’entrainement consistait à attaquer et détruire fictivement des bateaux sur le Rhin, au nord de Colmar. Les tirs étaient fictifs, bien-sûr… Je ne ramenais que les films de la tête de visée qui permettait de s’assurer de la qualité de la passe de tir ! Autre exemple de mission : détruire une entrée de tunnel dans le Massif Central (et Dieu sait s’il y en a, et des bien cachées !). Voici ce qu’on pouvait entendre à la radio à a l’approche de l’objectif : « Objectif dans 15 Kilomètres… armement vérifié …. Objectif dans une minute ! Objectif dans nos 10 heures… Objectif à 50 m à droite du petit pont sur la rivière est/ouest… » Je cabrais, puis piquais, suivi de deux ou trois avions, les uns derrière les autres. « A l’époque, il y avait 3 000 pilotes et aujourd’hui, 900 ! Il faut dire que, de nos jours, les avions disposent d’un plus grand pouvoir de destruction. »
Escadron 1/92 Bourgogne Bordeaux (1965 — 1969)
En 1965, j’ai été affecté sur la base de Bordeaux à l’escadrons 1/92 Bourgogne équipé de VAUTOUR B, bombardier biplace avec un navigateur installé à l’avant dans le nez vitré. L’avion avait un rayon d’action de 1 200 kilomètres. J’étais moniteur de ravitaillement en vol au profit des équipages de Mirage IV, l’avion qui assurait la mission de dissuasion nucléaire françaises et emportait la bombe atomique. J’obtiens mon diplôme d’aptitude aux fonctions de commandant d’avion le 1 er mai 1956.
Le ravitaillement en vol nécessite un avion ravitailleur, un Boeing KC 135 à mon époque, équipé d’un « boom » (perche rétractable manipulée par un opérateur couché à l’arrière du Boeing) avec à son extrémité un « panier » dans lequel l’avion ravitaillé devait introduire un « gland », constituant l’extrémité d’une perche creuse permettant au kérozène de couler vers le réservoir. L’exercice nécessitait un point de rendez-vous à 10 000 m d’altitude entre le ravitailleur et le ou les avions à ravitailler. Quand le pilote apercevait le BOEING ravitailleur (ce qui n’était pas toujours facile en fonction des conditions météorologiques), il annonçait « Contact visuel ». L’opérateur autorisait alors le rapprochement, puis le ravitaillement qu’il surveillait. Le premier ravitaillement a eu lieu en 1927, par gravité, à partir d’une cuve et d’un tuyau libre. Entre 1966 et 1968, toujours depuis Bordeaux j’ai effectué quelques missions particulières, notamment :
– couvertures photos « mapping » de DAKAR, ABIDJAN et FORT LAMY ». Ces photos ornaient les bureaux des présidents et tous les bâtiments officiels de ces pays.
– en Algérie, à nouveau, pour une mission photos afin de repérer des avions MIG livrés par les soviétiques ,
– en 1967, j’ai aussi servi d’interprète sur le porte-avions américain SARATOGA, pour l’amiral, commandant la 6ème flotte, pendant des manœuvres franco-américaines au sud de Malte. C’est le catapultage qui m’avait le plus impressionné,
– en 1967 également, suite à un essai nucléaire chinois, j’ai effectué une mission spéciale de récupération des poussières radio actives au sud de MALTE en vue de leur analyse par le commissariat à l’énergie atomique.
Le 08 février 1967 : une journée normale de travail
Ce jour-là, je suis réveillé à 6h00 du matin par un caporal qui vient me chercher à mon domicile en me disant : « il faut venir tout de suite ». A peine le temps d’enfiler ma tenue de vol et me voilà à l’escadron où c’est l’effervescence. Le tableau d’ordres m’indique un vol aller-retour vers HAMMAGUIF (Algérie) avec le Slt Hemmerlin, mon navigateur. Le commandant d’escadrille me précise notre mission : ce jour, à 09h30, la fusée Diamant 1 doit décoller du polygone de tir de Colomb-Béchar en Algérie. Le Général de Gaulle, qui couvait tout particulièrement le programme spatial français, avait décidé (probablement fort tardivement !) de faire diffuser les images du décollage de la fusée aux informations de 13h00 sur une des deux chaines, en noir et blanc, de l’ORTF, la télévision de l’époque. Nous étions alors bien loin des transmissions en direct ! Il fallait donc récupérer sur place les articles, photos et film du décollage et les ramener le plus rapidement possible à Brétigny ou un jeune journaliste, nommé François de Closet devait m’attendre au pied de l’avion pour récupérer les documents et les bobines de films et les ramener, encadré de motards sirènes hurlantes, à Cognacq Jay. Le décollage de la fusée était prévu à 09h30, heure locale. La durée du vol Bordeaux Hammaguir et Hammaguir-Brétigny était d’environ 02h30. Ça passait, mais ça passait juste… Et il ne fallait pas décevoir LE GENERAL !
Après une préparation de mission des plus succinctes, nous décollons de nuit sur le Vautour 627. L’atterrissage à Hammaguir (40 km au sud de Colomb-Béchar) se fait après un vol sans histoire de 2h20. Dès l’atterrissage nous montons à la tour de contrôle et assistons juste au décollage de la fusée. Pendant ce temps, nos mécanos s’activent à refaire le plein des 10 200l (!) de l’avion. Dès le départ de la fusée nous nous précipitons à l’avion, nous nous « rebrêlons » et nous nous tenons prêt à décoller. Après une vingtaine de minutes d’attente, les journalistes amènent articles, photos et films que le navigateur entasse dans un sac qu’il place entre ses jambes ! Le décollage est immédiat via ORAN, le cap Béar (le survol de l’Espagne était alors interdit bien que celle-ci fasse partie de l’OTAN), Clermont Ferrand et Brétigny. A partir de Clermont Ferrand, nous avons été mis en liaison directe avec François de Closet qui nous a interrogé sur le décollage de la fusée, les conditions météorologiques, la vitesse, l’altitude. L’interview se termina après s’être donné rendez-vous sur la piste d’atterrissage. A peine posé à Brétigny, à 12h30, nous apercevons François de Closet arriver à l’avion escorté de 2 motards. Il monte à l’échelle, récupère le précieux sac après nous avoir bombardé de « Bonjour Commandant », « Merci commandant » J’étais alors lieutenant ; ce qui nous vaudra le lendemain de payer un pot à toute l’escadrille qui n’avait rien manqué à la télévision de l’escadron). A 13h30, nous sommes au mess où nous voyons le décollage de la fusée, en différé, sans suspens quant à la réussite du tir. Nous redécollons vers Mérignac où nous arriverons à temps pour prendre le bus qui nous ramène à la maison comme si de rien n’était, vers 17h30.
Détachement au pacifique HAO (1968)
Dans le prolongement, en 1968, j’ai été détaché au Pacifique, pour sept mois, sur l’atoll de HAO. Ma mission consistait alors à récupérer des poussières radioactives provenant des essais nucléaires français dans des filtres spéciaux. Le vol se déroulait une heure trente après l’explosion et nécessitait de traverser le nuage radioactif. Les poussières étaient ensuite récupérées pour être analysées par les ingénieurs du commissariat à l’énergie atomique. Durant ces sept mois quatre essais ont eu lieu : trois bombes A (fission de l’atome) et une bombe H (fusion de l’atome). Mes quatre missions de tir missile sur une nuage radioactif lors des explosions atomiques de CAPELLA et POLLUX et des explosions thermonucléaires de CANOPUS et de PROCYON m’ont valu un témoignage de satisfaction à l’ordre des éléments air du C.E.P.
En 1968, j’ai été promu Chevalier de la légion d’honneur et décoré à bord du porte-avion Clémenceau par l’amiral commandant au Pacifique
A l’issue de cette campagne, fin 1968, j’ai rejoint l’escadron de Bombardement 1/92. A la fin de mon contrat, en mars 1969, j’ai quitté l’Armée de l’air avec le grade de Capitaine. Lors de mes 15 années de pilote j’ai effectué 3600 heures de vol, 389 missions de guerre N° 2 dont 75 de nuit. Grâce aux contacts noués auprès du Colonel DAUCHIER, commercial chez SUD AVIATION, lors du salon de l’aéronautique du Bourget en 1967, où j’avais été désigné comme interprète auprès de la délégation chilienne venue acquérir dix hélicoptères Alouette III, j’avais pu entrer en contact avec les opérations de la compagnie AIR ZAÏRE. Cette compagnie m’a embauché en octobre 1969 à l’issue d’un test en vol parfaitement réussi « Une fois ! » aux dires du chef pilote belge.
PILOTE DE LIGNE A AIR CONGO puis AIR ZAIRE II (1969 – 1978)
La Compagnie AIR CONGO deviendra AIR ZAÏRE en 1971 lorsque le Président MOBUTU débaptisera le CONGO pour l’appeler ZAIRE. La Compagnie comptait une centaine de pilotes de 19 nationalités différentes. Elle disposait de deux DC 10, trois DC8, deux CARAVELLES, sept DC4 et sept FOKKER F27. La compagnie avait des lignes régulières internationales. Tous les vols partaient de KINSHASA, la capitale du pays, aujourd’hui la RDC (République Démocratique du Congo), et se terminaient systématiquement à BRUXELLES après escale dans une capitale ou une grande ville européenne différente chaque jour de la semaine (Madrid, Paris, Rome, Zurich, Francfort). Elle assurait également des vols interafricains vers les capitales d’Afrique centrale (d’Abidjan à Nairobi et de la Zambie au Tchad). Certains de ces déplacements duraient jusqu’à 7 jours avec en moyenne 7 escales par jour (jusqu’à 11 escales !).
Ma valise était toujours prête !
Dans un premier temps, j’ai effectué 1500 heures de vol comme co-pilote sur l’appareil Fokker F27 avant d’obtenir, en 1970, ma licence suprême de commandant de bord à Forth Worth (Texas). J’ai été commandant de bord sur Fokker F27 puis sur DC4 où j’assurais également les fonctions de « chef pilote instructeur et examinateur » au profit de 21 pilotes et 7 aéronefs.
Missions spéciales : à la demande de la compagnie, j’ai effectué quelques missions en ANGOLA, alors en pleine guerre civile, où je livrais du fuel (avec tous les risques inhérents !) et des vivres à la population. Je volais alors au ras des baobabs pour me protéger des tirs de roquettes ou de missiles russes SAM 7 et me posais sur des terrains sommairement aménagés… Dans cet environnement complexe, mon expérience militaire m’a conduit aussi naturellement à recueillir du renseignement.
Avec un équipage AIR ZAIRE.
Avec Haroun TAZIEFF
Entre Haroun TAZIEFF et son épouse
C’est dans ce pays que j’ai rencontré le célèbre volcanologue, Haroun TAZIEFF. Grâce à lui, j’ai vécu des moments inoubliables comme pénétrer à l’intérieur du volcan Nyiragongo (Zaïre). Nous étions à 150 mètres au-dessous de la crête à 3 5000 mètres, avec les odeurs de soufre… Cela faisait le bruit de trois Boeing au décollage. J’ai gardé des contacts avec lui jusqu’à la fin de sa vie. Ces huit années à Air Zaïre furent pleines et passionnantes. Quand j’ai quitté la compagnie en 1978, j’ai repris la vie civile en France. J’avais 44 ans. J’ai alors acheté un hôtel bureau à MEGEVE à proximité de l’aéroclub où j’ai passé ma licence de pilote de montagne. Ma vie active d’aviateur s’est terminée en 1980 lorsque j’ai quitté pour raison familiale cette magnifique région et rejoint les Landes. La camaraderie a toujours été très importante pour moi. Dans l’armée de l’air, je me suis fait des amis indéfectibles. Dans l’air, on ne triche pas.
LA RESERVE – ASSOCIATIONS ET PORTE DRAPEAUX.
Au CAPIR de Bordeaux
Je profitais des récupérations compagnie (10 jours par mois) pour participer aux activités du CAPIR de Bordeaux et à celles de la SAT (Section Aérienne du Territoire), seule unité aérienne de réserviste à l’époque et j’en profitais pour m’envoyer en l’air.
Au CAPIR de Cazaux
Quelques années plus tard, quand je suis arrivé à Mios, j’ai contacté la base de Cazaux où, pendant neuf ans, j’ai effectué trois contrats, de trois ans chacun, en tant que collaborateur bénévole du service public (CBSP) : j’entrainais les futurs réservistes que j’accompagnais chaque année sur différentes bases aériennes lors de compétitions internationales, telles que « Air Raids » (Nancy, Cognac, Drachenbronn, Cazaux) avec des participations polonaises, canadiennes, allemandes, suisses, belges. A chaque fois, c’était moi qui étais le moins jeune !
2006 A l’entrainement des futurs réservistes de l’armée de l’air.
Porte-drapeaux
Je porte le drapeau depuis 55 ans ; la première fois en 1965, celui de la BA106 de Mérignac. En 1966, j’ai eu l’honneur de le porter sur le quai Louis XVIII à l’occasion du défilé du 14 juillet à Bordeaux. Après ma période militaire, je porte régulièrement le drapeau de I’ANORAA (Association Nationale des Officiers de réserve de l’Armée de l’Air), j’ai également porté régulièrement celui de Rhin et Danube, de la Société des Membres de la Légion d’Honneur (SMLH) et exceptionnellement le drapeau de la Légion étrangère de Parentis et celui de I’UNC (Union Nationale des combattants).
Porter le drapeau tricolore est pour moi une grande fierté.
Les associations
J’appartiens à un nombre certain d’associations : l’association des croix de guerre de Cestas et des Graves, l’association Union Nationale de Combattants (UNC) Arcachon, l’association Rhin et Danube (Arcachon), la Société des Membres de la Légion d’Honneur (SMLH) Arcachon, les associations de la Légion Etrangère de Parentis et de Bordeaux, l’association de la Légion d’Honneur décoré au péril de leur vie (DPLV) de Bordeaux et de la meilleure : l’association des officiers de réserve de l’armée de l’air et de l’espace (ANORAAE).
Opération “Rêves de gosse 2012” avec mon ami Jean Pierre ZAMMIT et des combinaisons rouges de l’organisation locale « Band ‘a Goss »
J’aime bien être avec des enfants et leur faire partager ma passion du pilotage et du monde aéronautique, en général.
Avec le colonel Sylvain BARET, président du secteur 710 Guyenne de I’ANORAA
Aujourd’hui, ma vie me semble paisible. Avec ma femme, nous avons une vie tranquille et je ne m’ennuie jamais. J’adore me promener avec mon chien car j’aime beaucoup les animaux, en général. J’ai été pilote de chasse pendant une époque palpitante. J’ai aimé tous les avions que j’ai pilotés, même si le VAUTOUR a été « mon avion », et j’ai eu aussi l’opportunité de beaucoup voyager, ce qui m’a permis de rencontrer des gens fabuleux, de toutes nationalités. L’aviation a été une grande chance dans ma vie et je suis certain que les jeunes pilotes français et étrangers d’aujourd’hui, partagent le même sentiment que moi.
« Voler me fait toujours autant rêver. Mon rêve serait de voler sur AIRBUS A 400. Moi, je me tiens prêt !»
Cet article est tiré de la revue “Aviation Magazine” et date du début de l’année 1975, soit près de 2 ans après la première mise en service du JAGUAR au sein de la 7° Escadre de Saint Dizier. Pour ceux qui ont connu cette époque je vous laisse apprécier les commentaires sur cet avion qui dans les 25 années à suivre allait devenir mythique.
Les débuts du ” Jaguar” dans l’armée de l’Air
C’est à la fin du mois de mai 1973 que les premiers « Jaguar » sont arrivés en unité. Aujourd’hui les appareils livrés à la 7e escadre de chasse stationnée à Saint-Dizier ont accumulé plus de 6 000 heures de vol. La dotation de l’escadre sera complétée dans les premières semaines de 1975. Un premier bilan peut être dressé.
A quelque niveau que l’on pose la question, la réponse est toujours la même : « l’armée de l’Air est satisfaite du « Jaguar » ». Cette satisfaction venant après tant de polémiques lors du développement du programme mérite qu’on s’y arrête un peu.
Où en est-on des livraisons ? La cadence de livraison à l’armée de l’Air est de 2,5 avions par mois. Ce rythme facilement compatible avec les capacités d’absorption des unités, permettra d’équiper complètement le premier escadron de la 11ème Escadre de Chasse basée à Toul actuellement dotée de F-100 avant la fin 1975. Au total la commande française notifiée s’élève pour l’instant à 170 avions avec une livraison étalée jusqu’au début 1979.
Ces chiffres sont à comparer avec les commandes britanniques et les livraisons à la RAF: total des commandes 202 unités, cadence actuelle de livraison, environ 5,5 avions par mois, dernier appareil à livrer en novembre 1977. Ce rythme très élevé ne va pas sans poser des problèmes de mise en route.
Après plus de dix-sept mois de mise en service, où en est-on du défrichage du domaine d’emploi opérationnel ?
En unité, à Saint-Dizier, la majorité des vols s’effectuent en configuration lisse, certains ont cependant lieu avec bidons. Dans quelques jours ou au pire dans un petit nombre de semaines, deux nouvelles configurations avec charges extérieures pourront être utilisées : l’une avec bombes de 400 kg, l’autre avec roquettes. Ces deux configurations n’ont pas amené de problème particulier.
Restent à délivrer les configurations suivantes
– bombes de 250 et 125 kg (pour lesquelles les essais sont à mi-course à Istres sur le A-04) et bombes d’entraînement ;
– engins anti-radar « Martel » (essais en cours à Istres également) ;
– lance-roquettes F-1,
– réservoirs spéciaux de napalm, conteneurs de contre-mesures électroniques ;
– nacelle de ravitaillement en vol ;
– configurations diverses : remorquage de cibles, panneaux, etc.
A noter que les essais d’emport d’engins air-air à courte portée « Magic » ont commencé, mais le domaine de tir n’a pas encore été étudié.
A la fin du premier semestre 1975, l’ensemble des configurations avec armement classique sera autorisé pour la 7ème Escadre.
Les essais avec charge ventrale accomplis jusqu’ici se sont déroulés sans problème majeur, ils ont montré l’efficacité des amortisseurs montés sur les trois axes.
Les équipements de navigation qui ont toujours donné satisfaction se révèlent au fil des vols d’une grande qualité, et affichent des performances légèrement supérieures aux spécifications. Ils méritent selon les utilisateurs la mention « très bien ».
La manœuvrabilité à basse altitude même avec un chargement de bombes de 400 kg — reste l’atout essentiel de l’avion. A basse vitesse, les dispositifs hypersustentateurs sont tels qu’ils permettent un pilotage facile en approche, avec atterrissage sans arrondi. Le taux d’accident — d’incident en fait — est très faible, il a été l’an passé le meilleur de toute la Force aérienne tactique. D’autre part la formule bimoteur s’est révélée payante à plusieurs reprises, les pilotes ayant réduit volontairement l’un des moteurs dont le fonctionnement se révélait défectueux en cours de vol.
La maintenance en piste n’a pas jusqu’ici soulevé de difficultés, l’effort fait au stade de la conception, pour la faciliter a porté ses fruits. La doctrine de maintenance aux autres échelons est en cours de définition.
Les points critiques, ou plutôt critiqués, de l’avion ne posent finalement aucun problème. La longévité du compresseur des réacteurs « Adour » théoriquement de 300 heures dans un premier temps doit passer progressivement au double. La stabilité en toute configuration est bonne grâce aux amortisseurs auto stables. La consommation élevée de la post-combustion à basse altitude n’est pas de l’avis des utilisateurs un lourd handicap, la manœuvrabilité dans la plage des vitesses moyennes constituant la meilleure défense. La complexité de l’appareil est compensée par la fiabilité du matériel et ta facilité de maintenance.
Tel qu’il est, le « Jaguar » donne incontestablement satisfaction à ceux qui l’utilisent en France, est-ce à dire que l’avion et son système sont figés ? Bien que présentant un intérêt dans l’absolu, le rétrofit des avions avec le réacteur « Adour » 26 qui doit équiper la version exportation —- n’est pas envisagé, bien qu’il ne soit pas non plus totalement exclu. L’opération serait d’autant plus délicate que la presque totalité des moteurs a été livrée.
La RAF s’intéresse à L’utilisation des becs de combat dans une plage de vitesse aussi grande que possible pour bénéficier le plus largement des qualités manœuvrières de l’avion.
L’armée de l’Air, qui a déjà réalisé, tant avec la version monoplace que la version biplace, des essais de ravitaillement en vol derrière C-135F, va étudier les possibilités offertes par le ravitaillement de l’avion par un autre « Jaguar » équipé d’une nacelle de ravitaillement.
Mais c’est certainement au niveau du système d’armes que les améliorations les plus spectaculaires pourraient être apportées. Sans qu’aucune décision n’ait été prise, il est question d’illuminateur laser et des armements associés pour les missions d’attaque au sol, cependant que pour les missions nucléaires essentiellement, est en cours de développement une série de matériels de contre-mesures électroniques qui devrait équiper les avions avant la fin de la décennie.
Ce bilan un peu idyllique sera remis en question avec l’arrivée du JAGUAR à la 11ème Escadre de Toul ; c’est une autre histoire que je raconterai plus tard, mais pour en donner un avant-gout, je joins ce dessin de CARRASCO tiré du cahier de marche de l’ETIS qui accueillait un premier groupe de pilotes du 1/11. Je pense que celui qui est représenté est facilement reconnaissable.
Cette vidéo est un souvenirs pour les personnels militaires de l’escadron 1/11 Roussillon. Il a été réalisé dans un but purement cinématographique et pas pour créer des revenus. Elle n’est pas monétarisée.
Elle relate la vie et les missions du détachement Jaguar du 1/11 au Sénégal du 1er janvier au 10 février 1983. Films renumérisés par le SHD (Service Historique de la Défense) La vidéo a été remasterisée par le Lcl Le Balle Jacques pour améliorer le rendu.
On a avait la belle vie à cette époque. Des jaloux diraient qu’on gaspillait l’argent du contribuable et qu’on s’amusait plus qu’on travaillait. C’est ce que la vidéo montre dans sa généralité mais derrière la bonne humeur, la bonne ambiance et le climat de vacances que cette vidéo montre, il y avait beaucoup de travails, surtout pour les mécanos, et les pilotes non plus de chômaient pas et faisaient des missions opérationnelles qui n’étaient pas toutes faciles.
On verra aussi dans cette vidéo que les contrôleurs sénégalais n’était pas très tendre avec nous, et nous répondait assez négativement à la radio! Il y avait beaucoup de sarcasmes dans leurs voix! Était ce des gens énervés de nous savoir là, où des racistes, ou des jaloux, ou else ? On n’a jamais su, mais on répondait toujours correctement.
Heureusement qu’il y avait le club Med et quelques locaux très sympathiques qui nous invitaient à dîner chez eux. Partie finale du film avant le foot.
Ce film a été réalisé à partir d’une caméra super 8 dans les années 1980.
On y voit les pilotes du 1/11 et des missions en vol lors d’une campagne de tir à Cazaux en octobre et novembre 1982.
Vous y verrez l’arrivée à la base aérienne de Cazaux, la présentation des ordres de vols et des pilotes qui briefe et débriefe les missions de tirs Air-Air et Air-Sol.
Il y a plusieurs vues des pilotes du 1/11 dans un hangar par contre, ces images sont de mauvaises qualité. Vues des pilotes allant aux avions, la visite pré-vol du pilote, le démarrage et le roulage.
Le décollage en Patrouille et des manœuvres acrobatiques en vol suivi d’un ravitaillement en vol derrière un Boeing C135-F et d’une navigation à très basse altitude dans des vallées du massif central, puis le retour vers Cazaux. Une petite séance de voltige avec une météo assez défavorables pour des prises de vue mais on ressent quand même la sensation acrobatiques du vol.
Un exercice de survie des pilotes sur le lac de Cazaux!
Le retour vers Toul par mauvaise météo à la Fin de la campagne de tir.
Pour finir: Atterrissage par mauvaise visibilité à Toul.
FINALE V4 VIDEO FULL Film MANTA-1984, Missions TCHAD Jaguar & Mirage F1.
SYNOPSIS : Cette vidéo est une reproduction du film super 8 réalisé par moi-même à Ndjamena (TCHAD) en janvier 1984 et relate la vie d’un détachement de l’armée de l’air en Afrique en 1984 et plus particulièrement de l’escadron 4/11 Jura qui était basé à Bordeaux Mérignac
Elle montre des vues aériennes rares et exceptionnelles prises à partir de Jaguar et Mirage F1 au Tchad en 1984, les détachements du 4/11, 1/5, 2/12, des Boeing ravitailleurs, C-160 Transall, Breguet Atlantic de la Marine, l’ALAT et les Légionnaires du 2eme REP. A cette époque, j’étais Capitaine, pilote de chasse et commandant d’escadrille sur Jaguar au 4/11. J’étais passionné par ce métier mais aussi par la création de souvenirs cinématographiques.
Vous y verrez le départ de France, l’arrivée à Ndjamena le 26 décembre 1983 et la vie de tous les jours là-bas jusqu’au 15 février 1984.
NOTE : Ce film S8 a été numérisé par le SHD, (Service Historique de la Défense) en décembre 2023, puis la vidéo produite a été remasterisée par mes soins de janvier à février 2024. Les images sont d’une qualité supérieure à celles des vidéos précédentes (d’avant 2022). Elles ne sont quand même pas en HD comme avec une GoPro mais elles sont excellentes pour des images prises avec des caméras équipées de pellicule Super-8 et qui ont 40 ans d’âge aujourd’hui (en 2024).
Cette vidéo est dédiée aux pilotes et mécaniciens du 4/11 et 2/11 (sur Jaguar) du 1/5 et du 2/12 (sur Mirage F1) et aussi aux équipages des Boeing C-135F, des C-160 Transall, des Breguet Atlantic de la Marine Nationale, de l’ALAT et des légionnaires du 2-ème REP et du personnel des cuisines & hébergement de Fort Lamy.
Elle est dédiée plus particulièrement au Capitaine Croci Michel qui était notre chef de détachement et qui, suite à des combats contre une troupe ennemie, a été touché et a trouvé la mort aux commandes de son Jaguar le 25 janvier 1984 à Torodoum (Nord de Ndjamena pour 550 km).
J’étais son équipier dans cette mission.
Il l’est aussi en la mémoire du Capitaine RAMADE et du Capitaine PRUNA, morts en service aérien commandé en France respectivement le 21 mars 1984 et le 2 juillet 1986.
Durée de la vidéo : 18 minutes 20’’ Commentaire de début sur la qualité des images à s’attendre d’un film des années 1980 prises avec une simple caméra super-8 Fujica bricolée.
Navigation manuelle à très basse altitude, (TBA) en FRANCE avec la carte sur les genoux. (Année 1985)
-NAV à TBA au-dessus du Massif Central enneigé, de lacs et de fleuves, et au Tchad.
-Les images sont instables à cause des turbulences générées par la navigation très près du sol et des reliefs.
-Tests de réacteurs de Jaguar au sol par les mécanos suivi de décollages de Jaguar au Tchad en 1984.
-Vues de face du pilote avec un jaguar biplace en patrouille sur lui.
-NAV TBA en Mirage F1 (CEAM année 1987).
-Attaques fictives de ponts
-Survol de la mer vers un navire de la Marine Nationale.
-Vols en patrouille serrée et arrivée à la Base aérienne de Toul, break, dernier virage, alignement sur la piste, puis atterrissage.
-Visuel du parking Tchadien sur l’aéroport de N’Djamena
Commentaire de début sur la qualité des images à s’attendre d’un film des années 1980 prises avec une simple caméra super-8 Fujica bricolée.
-Ravitaillements en vol (RVT) de Jaguar effectués en 1984 sur Boeing C-135F puis sur C-160 Transall.
-On se rendra compte que ce genre d’exercice n’est pas toujours facile surtout quand il y a des turbulences qui rendent le panier instable.
-On verra aussi quelques enquillages énergiques qu’ il faut éviter de faire dans la mesure du possible.
-Ravitaillements en vol de Jaguar, Mirage F1 et Mirage 2000 du CEAM effectués en janvier 1988 de jour et de nuit sur des tankers de la Royal Air Force (RAF) VC10 et Victor
Durée de la vidéo : 2 minutes 08’’ Interception d’un B-52 Stratofortress américain en 1987 par 2 avions de chasse de Escadron de chasse et d’expérimentation 05/330 Côte d’Argent (CEAM) de Mont de Marsan (un Mirage 2000 et un Jaguar): CEAM = Centre d’Expertise Aérienne Militaire
Une fois n’est pas coutume ; l’article que je vous propose traite de l’actualité et plus particulièrement du fait aérien de la guerre en UKRAINE. Tout comme Christophe CONY du magazine “AVIONS” je suis effrayé par l’hystérie antirusse qui s’est emparée de notre pays et de la censure qui a pour but d’interdire toute version qui s’éloigne un tant soit peu de ce que nous délivre nos médias nationaux. Il n’est pas question d’apporter un soutien à POUTINE mais simplement de savoir ce qu’il se passe réellement sur ce théâtre d’opérations. Les réseaux sociaux permettent d’avoir des versions différentes concernant les opérations terrestres (libre à chacun de se faire sa propre idée) mais il est quasiment impossible de trouver quelque chose concernant la guerre aérienne.
Je suis tombé par hasard sur cet article de Christophe CONY qui a eu l’amabilité de me donner l’autorisation de le publier sur le site et qui semble bien informé ; j’ai particulièrement apprécié l’introduction et la conclusion (très mesurées) que je vous invite à consulter même si vous n’avez pas l’intention de lire la totalité de l’article.
LA GUERRE EN UKRAINE
Le 24 février 2022, une semaine après la reprise des tirs de l’artillerie lourde de l’armée ukrainienne dans la région du Donbass, le président de la fédération de Russie Vladimir Poutine a pris la décision de lancer une opération militaire spéciale en Ukraine afin de protéger les populations de cette région, victimes selon lui d’abus et de génocide de la part du régime de Kiev. Soulignant que Moscou n’avait pas l’intention d’occuper les territoires ukrainiens, le dirigeant russe a déclaré que les objectifs de l’opération étaient la démilitarisation et la dénazification de l’Ukraine. Le 21 janvier précédent, Vladimir Poutine avait déjà reconnu la souveraineté des Républiques populaires de Donetsk (RPD) et de Lougansk (RPL), les deux provinces du Donbass.
L’ancien directeur de la DST Yves Bonnet et Éric Denécé ont coécrit le 7 mars un excellent article intitulé « Ukraine : comment en sommes-nous arrivés là ? dans lequel ils analysent les causes et les responsabilités de la guerre. Parmi leurs conclusions, l’une d’elles est sans équivoque à l’égard du rôle joué par les États-Unis en Europe depuis la chute de l’Union Soviétique. Cette crise nous renvoie à la prise en considération des données de la géopolitique qui nous rappelle qu’aucun État ne peut assurer sa sécurité au détriment de celle des autres, surtout quand l’un d’eux est surpuissant, et que les alliés sur lesquels il compte se dérobent. Lorsque l’on néglige ces principes et que l’on joue avec le feu, on finit immanquablement par se brûler : c’est ce que l’Ukraine a fait. Cet article dont je vous conseille vivement la lecture a été mis en ligne le 9 mars dernier par le magazine indépendant FILD.
Pour être clair, le fait pour les États-Unis de pousser L’Ukraine à entrer dans l’OTAN signifie que des missiles nucléaires placés sous l’autorité des Américains pourraient être stationnés à la frontière même de la Russie, ne laissant plus à cette nation le temps matériel de riposter en cas d’attaque. Une ligne rouge infranchissable pour les responsables russes, à l’image de celle qu’ont représentés pour les Etats-Unis les missiles nucléaires installés par l’URSS à Cuba en octobre 1962. Ceci n’excuse bien sûr en aucune façon l’invasion actuelle d’une partie de L’Ukraine par la Russie, mais si vous poussez à bout votre adversaire, vous devez savoir qu’il peut réagir de façon particulièrement violente…
La situation géopolitique
Condamnée avec raison par la plupart des nations mondiales, cette guerre lancée par la Russie a instantanément entrainé une pluie de sanctions économiques occidentales ; des sanctions cependant très peu suivies en Asie (la Chine et l’Inde n’ayant pas souhaité s’y associer) et pas du tout en Afrique, en Amérique latine et dans les États arabes du Golfe. Une autre conséquence a été la mise en place dans les médias européens d’une censure et d’une propagande phénoménales, du jamais vu depuis la Seconde Guerre mondiale… Les médias russophones ont par exemple été interdits tandis que les réseaux sociaux américains Facebook et Instagram autorisent désormais les appels à la violence et au meurtre visant les Russes. Cette désinformation à grande échelle, qui confine à l’auto-aveuglement, fait qu’il est devenu presque impossible pour un journaliste d’exercer son métier correctement en confrontant les sources. Le réflexe de pluralisme est pourtant essentiel à une information éclairée !
Le politologue français Éric Denécé, ancien officier de renseignement de la Marine nationale et actuellement directeur du Centre français de recherche sur le renseignement (CF2R), a été interrogé le 23 mars sur la chaîne israélienne d’information en continu i24NEWS. Il a livré une analyse de la guerre en Ukraine qui se démarque de l’hystérie antirusse des grands médias occidentaux. Je me permets ici d’en retranscrire l’essentiel : La souffrance, la terrible souffrance que rencontre la population ukrainienne est en partie de la responsabilité de l’OTAN qui, depuis trente ans, n’a cessé de provoquer les Russes et j’insiste sur un point, aussi de l’irresponsabilité du gouvernement ukrainien qui n’a pas respecté les accords de Minsk [1]. (…) Je dois avouer que je suis très choqué de l’ensemble des discours de Zelensky et de la propagande qu’il fait puisque cet homme (…) qui n’était qu’un comique il y a quelques années, qui est lui-même poursuivi dans les Pandora Papers [2] pour avoir dissimulé sa fortune et soupçonné d’avoir blanchi 40 millions de dollars, est en train de devenir une icône, voire un héros de la liberté dans l’Occident. (…) Le vrai enjeu aujourd’hui, c’est : comment aider la population ukrainienne et non pas comment sauver ce régime qui est aussi corrompu que les précédents.
[1] Les accords de Minsk, signés début 2015 pour mettre un terme au conflit qui avait éclaté un an plus tôt dans l’est de l’Ukraine, garantissaient entre autres que le Donbass, majoritairement russophone, demeurerait ukrainien en échange du maintien du russe comme seconde langue officielle, d’un statut spécial et de la tenue d’élections libres. Ces trois points n’ayant jamais été respectés par le gouvernement de Kiev, la guerre a alors repris. Entre 2014 et 2020, elle a causé selon l’ONU plus de 13 000 morts (dont 3350 civils) et le déplacement de près d’un million et demi de personnes.
[2] Publiés le 3 octobre 2021 par le Consortium international des journalistes d’investigation, ces documents révèlent des affaires de fraude et d’évasion fiscale mettant en cause plusieurs milliers de personnalités dans le monde.
(…) Il faut quand même rappeler (…) depuis 2014 les traitements inhumains et les attaques très importantes contre les populations du Donbass. Il faut toujours rappeler ça sans chercher à justifier quoi que ce soit. Moi je suis surtout très choqué par la manière dont Zelensky s’adresse à l’ensemble des parlements du monde entier. Il décerne des bons points et des mauvais points sur ce que devrait faire la France, sur ce que devraient faire les États-Unis. Également, j’ai vu ses réflexions sur Israël il y a quelques jours et j’ai été excessivement choqué par le discours qu’il a tenu devant la Knesset en faisant un lien entre (l’attaque russe,) la Shoa et la Solution finale. Je trouve cela tout à fait inadmissible.
Il y a surtout un point qui me choque (…), c’est qu’il y a effectivement des unités néonazies dans l’armée ukrainienne, ça c’est absolument insupportable. Tous les commentateurs disent « Oui, vous savez, ils ne sont pas aussi nombreux que ça. » Moi je dis souvent : on aurait (…) trois militaires néonazis dans l’armée française, cela ferait la une de l’actualité, ce serait un scandale sans fin et là on ferme les yeux sur le fait qu’il y a des ultra-nationalistes qui sont probablement 800, 1000, 1200 et on considère ça normal. Donc il y a vraiment un jugement qui est totalement faussé par l’émotion, par des éléments irrationnels sur cette crise.
Encore une fois, envahir l’Ukraine a été une très mauvaise chose pour Vladimir Poutine ; il faut le condamner mais nos pensées vont toujours aux populations ukrainiennes et pas du tout à ce régime de Kiev. D’ailleurs les oligarques russes sont aujourd’hui poursuivis à peu près partout dans le monde et il me semble indispensable que l’on poursuive aussi les oligarques ukrainiens, parce que sinon ces réseaux criminels vont s’installer dans l’Union Européenne.
L’ancien directeur de la DST Yves Bonnet et Éric Denécé on coécrit le 7 mars un excellent article intitulé « Ukraine : Comment en sommes-nous arrivés là ? », dans lequel ils analysent les causes et les responsabilités de la guerre. Parmi leurs conclusions, l’une d’elles est sans équivoque à l’égard du rôle joué par les États-Unis en Europe depuis la chute de l’Union Soviétique : cette crise nous renvoie à la prise en considération des données de la géopolitique qui nous rappelle qu’aucun État ne peut assurer sa sécurité au détriment de celle des autres, surtout quand l’un d’eux est surpuissant, et que les alliés sur lesquels il compte se dérobent. Lorsque l’on néglige ces principes et que l’on joue avec le feu, on finit immanquablement par se brûler : c’est ce que l’Ukraine a fait. Cet article dont je vous conseille vivement la lecture a été mis en ligne le 9 mars dernier par le magazine indépendant FILD :
Pour en savoir plus : n’hésitez pas à télécharger le bulletin de documentation n° 27 du CF2R « La situation militaire en Ukraine », par Jacques Baud (ancien colonel d’État-major général, ex-membre du renseignement stratégique suisse et spécialiste des pays de l’Est) :
Pour être clair, le fait pour les États-Unis de pousser l’Ukraine à entrer dans l’OTAN signifie que des missiles nucléaires placés sous l’autorité des Américains pourraient être stationnés à la frontière même de la Russie, ne laissant plus à cette nation le temps matériel de riposter en cas d’attaque. Une ligne rouge infranchissable pour les responsables russes, à l’image de celle qu’ont représentés pour les États-Unis les missiles nucléaires installés par l’URSS à Cuba en octobre 1962. Ceci n’excuse bien sûr en aucune façon l’invasion actuelle d’une partie de l’Ukraine par la Russie, mais si vous poussez à bout votre adversaire, vous devez savoir qu’il peut réagir de façon particulièrement violente…
Symbole de la brutalité de l’attaque russe en Ukraine : un hélicoptère d’attaque Mil Mi-28 survole un char T-90.
Vladimir Poutine, président de la fédération de Russie.
Volodymyr Zelensky, président de l’Ukraine.
Carte de l’Ukraine début février 2022
Les forces en présence
Je me bornerai ici à reprendre certains des chiffres cités dans le rapport « 2022 World Air Forces » du magazine britannique Flight International.
La force aérospatiale russe, dont la modernisation a été entamée il y a dix ans par Vladimir Poutine, dispose au début de l’année 2022 de 1435 avions de combat (chasse, assaut, bombardement) auxquels s’ajoutent 69 avions de reconnaissance et de guerre électronique, 20 ravitailleurs en vol et 408 avions de transport, plus 1424 hélicoptères de combat ainsi que – pour mémoire – 507 appareils d’entraînement. L’aviation navale russe a en compte 76 avions de combat, plus 63 avions et hydravions destinés aux missions spéciales (lutte anti-sous-marine, patrouille maritime, secours en mer et commandement aéroporté), 37 avions de transport, 119 hélicoptères de combat, 15 avions et hélicoptères d’entraînement. Soit un potentiel total d’environ 1500 avions et 1500 hélicoptères de combat, ce qui en fait la deuxième flotte aérienne de combat au monde derrière celle des États-Unis et devant celle de la Chine.
La Russie n’ayant évidemment pas dévoilé son dispositif, il est impossible à l’heure où j’écris ces lignes de dresser la liste complète des régiments d’aviation qu’elle a engagés dans le conflit. On peut malgré tout citer les unités suivantes, dont beaucoup étaient déjà présentes au début du mois de février 2022 à proximité des frontières de l’Ukraine. Les autres ont été déplacées à proximité du front depuis leurs bases de temps de paix. Réparties dans les districts militaires Ouest (6e et 11e armées aériennes) et Sud (4e armée aérienne), ces formations ne comprennent aucun régiment de MiG-29 :
6e armée aérienne
-14e GvIAP sur Soukhoï Su-30SM à Koursk-Khalino
-47e BAP sur Soukhoï Su-34 à Voronej-Baltimor
-159e IAP sur Soukhoï Su-35S à Petrozavodsk et Besovets
-790e IAP sur Soukhoï Su-35S, MiG-31BM/BSM et Soukhoï Su-27SM à Tver et Khotilovo
-4e ORAE sur Soukhoï Su-24MR à Chatalovo
-33e OTSAP sur divers avions et hélicoptères de transport à Saint-Pétersbourg-Levachovo
-15e BrAA sur Kamov Ka-52, Mil Mi-28N, Mil Mi-35M, Mil Mi-8MTV-5 et Mil Mi-26 à Ostrov.
-332e OVP sur Mil Mi-28, Mil Mi-35 et Mil Mi-8MTV-5 à Saint-Pétersbourg-Pouchkine
-440e OVP sur Kamov Ka-52, Mil Mi-24P et Mil Mi-8MTV-5 à Viazma
11e armée aérienne
-23e IAP sur Soukhoï Su-35S à Baranovitchi
-277e GvBAP sur Soukhoï Su-34 à Lida
-18e GvChAP sur Soukhoï Su-25SM à Tchernigovka
-266e ChAP sur Soukhoï Su-25SM à Domna
-35e OTSAP sur divers avions et hélicoptères de transport à Khabarovsk-Central
-799e ORAE sur Soukhoï Su-24MR à Varfolomeevka
-18e GvBrAA sur Kamov Ka-52, Mil Mi-28N, Mil Mi-35M, Mil Mi-8AMTSh/MTV-5 et Mil Mi-26 à Khabarovsk-Central.
-112e OVP Mil Mi-28N et Mil Mi-8AMTSh à Tchita-Tcheriomouchki
-319e OVP sur Kamov Ka-52 et Mil Mi-8AMTSh à Tchernigovka
-117e OVTAP sur Il-76MD à Orenbourg
-708e VTAP sur Il-76MD à Taganrog-Central
4e armée aérienne
-43e OMChAP sur Soukhoï Su-30SM et Soukhoï Su-24M/MR à Saki
-3e GvSAP sur Soukhoï Su-27SM/SM3 et Soukhoï Su-30M2 à Krymsk
-31e GvIAP sur Soukhoï Su-30SM à Millerovo
-368e ChAP sur Soukhoï Su-25SM/SM3 à Boudionnovsk
-559e BAP sur Soukhoï Su-34 à Primorsko-Akhtarsk
-11e SAP sur Soukhoï Su-24M/MR à Marinovka
-960e ChAP sur Soukhoï Su-25SM/SM3 à Primorsko-Akhtarsk
-37e GvSAP sur Soukhoï Su-24M et Soukhoï Su-25SM à Gvardeïskoe
-38e IAP sur Soukhoï Su-27SM/SM3 et Soukhoï Su-30SM à Belbek
-39e VP sur Kamov Ka-52, Mil Mi-28N, Mil Mi-35M et Mil Mi-8ATSh à Djankoï
-30e OTSAP sur divers avions et hélicoptères de transport à Rostov-sur-le-Don-Central
-16e BrAA sur Mil Mi-28N et Mil Mi-8AMTSh/MTV-5 à Zernograd
-55e OVP sur Kamov Ka-52, Mil Mi-28N, Mil Mi-35M et Mil Mi-8AMTSh à Korenovsk
-487e OVP sur Mil Mi-28N, Mil Mi-35M et Mil Mi-8AMTSh/MTV-5 à Boudionnovsk
14e armée aérienne
-2e GvBAP sur Su-34 et Su-34MR à Tcheliabinsk-Chago
Aviation stratégique
-121e GvTBAP, sur Tu-160 à Engels-2
-184e GvTBAP, sur Tu-95MS à Engels-2
-52e GvTBAP, sur Tu-22M3 à Tchaïkovka
-840e TBAP, sur Tu-22M3 à Soltsy-2
L’Ukraine, dont la majorité du matériel est ancien puisqu’il a été hérité en 1991 de l’ex-Union Soviétique, dispose début 2022 d’une soixantaine de chasseurs MiG-29 répartis dans trois brigades d’aviation tactiques, la 40e BrTA à Vasylkiv près de Kiev, la 114e à Ivano-Frankivsk et la 204e à Loutsk, ces dernières dans la partie ouest du pays. La 204e BrTA était basée en Crimée jusqu’à l’annexion de cette région par la Russie en 2014. Une trentaine de chasseurs Soukhoï Su-27 (en comptant les variantes biplaces) sont opérationnels au sein de la 39e BrTA à Ozerne, près de Kiev et de la 831e BrTA à Myrhorod, au nord-est de l’Ukraine. Douze autres monoplaces et deux biplaces sont stockés.
La 7e BrTA de bombardement et de reconnaissance tactique exploite près d’une vingtaine de Soukhoï Su-24M/MR depuis Starokostiantyniv, dans l’Ouest, où sont également basés les nouveaux drones armés Bayraktar TB2 achetés à la Turquie ; ces drones dépendent du 383e opDKLA (régiment indépendant de véhicules aériens sans pilotes).
Les 24 Soukhoï Su-25M1/M1K d’assaut restants sont regroupés au sein de la 299e BrTA à Koulbakino, près de Mykolayiv, sur les côtes de la Mer Noire.
Les principaux avions de transport, une quinzaine d’Antonov An-26 et sept Iliouchine Il-76MD, font partie de la 25e BrTrA basée elle aussi dans le sud du pays, à Melitopol sur les côtes de la Mer d’Azov. Deux autres unités emploient les transporteurs restants : la 15e BrTrA à Boryspil, près de Kiev (quelques avions et hélicoptères pour le transport de VIP) et la 456e GBrTrA à Vinnytsia-Gavrichevka, au sud-ouest de Kiev (Antonov An-24B, Antonov An-26 et Mil Mi-8).
L’essentiel des 135 hélicoptères militaires appartient à l’armée de Terre ukrainienne ; il s’agit de vieilles versions de Mil Mi-24 d’assaut et de Mil Mi-8 de transport (une soixantaine de chaque, plus quinze Mi-2 de liaison) qui sont réparties au sein de quatre brigades d’aviation de l’armée (OBrAA) : la 11e à Kherson-Chornobaïvka, la 12e à Novyi Kalyniv, la 16e à Brody (toutes deux près de Lviv) et la 18e à Poltava. Chacune de ces brigades opère avec une escadrille de Mi-8, une autre de Mi-24 et une section de Mi-2, sauf la 18e OBrAA dont les Mi-24 ne forment qu’une section. Une vingtaine de Mi-8 et une trentaine de Mi-24, retirés du service, sont stockés sur la 57e base d’aviation située juste à côté de la base de Brody. La Garde nationale ukrainienne, basée à Alexandria, utilise également dix Mi-8 (cinq Mi-8MT armés et cinq Mi-8MSB-V non armés) ainsi que deux Mi-2MSB et sans doute quelques Airbus H225.
La brigade d’aviation de la Marine ukrainienne dispose de quelques hélicoptères embarqués Kamov Ka-27PL et Ka-29 (ces derniers stockés depuis longtemps), les Ka-27PL opérant avec l’escadrille d’hélicoptères de la Marine basée à Koulbakino près de Mykolayiv.
RussieUkraine
Chasseurs 772 100
Assaut 616 44
Bombardement lourd 123 –
Transport 445 32
Hélicoptères d’attaque 544 60
Pour résumer, l’Ukraine dispose d’une force aérienne d’environ 300 avions et hélicoptères (hors les réserves) quand la Russie en possède 3000 ! La disproportion est énorme sur le papier, mais il faut garder à l’esprit qu’il ne s’agit pas pour la Russie d’une guerre totale. Cette nation n’engage donc pas toute son armée de 680 000 hommes (hors conscrits et réservistes) mais une sorte de « corps expéditionnaire » réunissant 150 000 soldats, à comparer aux 260 000 hommes de l’armée ukrainienne qui a depuis mobilisé plus de 100 000 réservistes.
Ukraine-2022-02-00-05
La Russie dispose d’appareils d’alerte aérienne avancée et de contrôle dont certains opèrent, comme le Beriev A-50U RF-94268 « 41 rouge », depuis Baranavitchy en Biélorus-sie. L’Ukraine n’en possède aucun, mais elle bénéficie des renseignements fournis par les États-Unis et l’OTAN.
Sur cette vue satellite de la base aérienne de Primorsko-Akhtarsk prise le 13 février 2022, on constate que les avions d’assaut Su-25 du 960e ChAP (en bas à gauche) ont été renforcés par des bombardiers tactiques Su-34 qui pourraient être du 559e BAP (en haut à droite, en livrée bleue).
Des Su-25 russes survolant le polygone de tir biélorusse d’Obuz-Lesnovsky le 19 février 2022.
Ukraine-2022-02-00-09
Un Mi-8MSB-V de l’armée de l’Air ukrainienne avec le nouveau camouflage digital introduit en 2014, après les combats de Crimée et du Donbass. Le taux de disponibilité des appareils ukrainiens est faible, la Russie ne fournissant plus de pièces de rechange depuis huit ans.
LES COMBATS AÉRIENS
Le jeudi 24 février 2022 vers 04h30, la Russie déclenche l’assaut, ses troupes franchissant la frontière ukrainienne au nord en direction de Kiev, à l’est vers Kharkiv (Kharkov en russe), au sud-est dans le Donbass et au sud depuis la péninsule de Crimée. Des frappes aériennes sont dans le même temps déclenchées à travers le pays à l’aide de missiles balistiques et de croisière, visant en particulier onze terrains d’aviation, des sites de défense antiaérienne, des stations radar, des centres de commandement et de communication. Contrairement à ce que l’on a cru un moment, l’état-major ukrainien n’est pas totalement surpris par cette attaque, les services de renseignement de l’OTAN l’ayant prévenu quelques heures plus tôt comme en attestent plusieurs témoignages de pilotes ukrainiens. Beaucoup d’appareils ont donc eu le temps d’être déplacés préventivement vers des bases secondaires, des aéroports civils ou des pistes de campagne. Seules demeurent sur leurs bases de temps de paix les machines non-opérationnelles, ce qui entraîne quand même des pertes conséquentes.
Le Soukhoï Su-27P « 37 bleu » de la 39e BrTA est détruit par un tir de missile sur la base d’Ozerne (près de Jitomir), causant la mort du lieutenant-colonel Eduard Vagorovsky. Le lieutenant Viatcheslav Radionov de la 40e BrTA est tué, de même que six personnels au sol, alors qu’il tentait d’évacuer un MiG-29 de sa brigade lors d’une frappe de missiles sur la base de Vasylkiv. Au moins deux Su-24MR stockés sur l’aéroport de Bila Tserkva, 85 km au sud de Kiev, sont également détruits tandis que sur la base de Tchouhouïv, au sud-est de Kharkiv, six L-39C Albatros et quatre vieux MiG-23 stockés étant réduits en ferraille par des tirs de missile ; un MiG-29 de la 114e BrTA qui tentait de fuir y est aussi endommagé au-delà de réparable en roulant dans un cratère. Deux Soukhoï Su-24M et six MiG-29 stockés à Starokostiantyniv sont détruits ou sérieusement endommagés. Quatre autres bombardiers Su-24M stockés à Loutsk disparaissent en fumée sous les tirs de missiles russes, parmi lesquels le n/c 715339. Les Su-25 « 12 bleu » et « 42 bleu » de la 299e BrTA stockés sur la base de Koulbakino sont détruits par des missiles Kalibr de même que deux biplaces d’entraînement L-39C Albatros. Deux quadriréacteurs Il-76MD de la 25e BrTrA sont également transformés en ferraille à Melitopol. L’un des deux était opérationnel (n/c 76697), l’autre (n/c 76322) était stocké depuis 2007. Sept Il-76 intacts pourront se réfugier dans la nuit du 24 au 25 à Deblin en Pologne. La base de Chornobaïvka, siège des hélicoptères Mil Mi-2, Mi-8 et Mi-24 de la 11e OBrAA à Kherson, est aussi prise à partie par des missiles.
Vue satellite de la base de Mykolaïev-Koulbakino prise le 21 février 2022. On peut y dénombrer sur la piste (en bas) treize Su-25 de la 299e BrTA plus un L-39 Albatros, ainsi que douze Su-25 stockés sur les alvéoles du haut. Les Su-25 opérationnels qui manquent sur le cliché ont déjà été déployés sur d’autres terrains. La base abrite égale-ment les appareils de l’aviation navale ukrainienne, des drones Bayraktar TB2 et des Su-24 stockés de la 7e BrTA. (Planet Labs)
Cette autre vue satellite de Koulbakino montre la base après les frappes de missiles le 24 février 2022. Il n’y a plus aucun Su-25 opérationnel sur la piste mais deux des douze Su-25 stockés ont été détruits sur le second parking en partant de la droite, plus deux L-39 sur le troisième
L’épave du Su-25 « 12 bleu ».
Le « 42 bleu » a été brisé en deux par l’impact.
Image satellite de la base de Tchouhouïv où six L-39C Albatros et quatre MiG-23 (à droite) ont été détruits par des frappes de missile le 24 février 2022. (MAXAR)
Les deux Il-76MD de la 25e BrTrA détruits à Melitopol le 24 février 2022. (DR)
Les deux Il-76MD de la 25e BrTrA détruits à Melitopol le 24 février 2022.
Les deux Il-76MD de la 25e BrTrA détruits à Melitopol le 24 février 2022.
Plusieurs combats aériens ont lieu dès les premières heures de l’invasion, alors que les Ukrainiens tentent encore d’évacuer vers l’arrière le plus d’avions possible. Le lieutenant-colonel Volodymyr Kokhanskyi [3] et le lieutenant Roman Pasoulko, à bord d’un biplace MiG-29UB de la 40e BrTA, sont tués au-dessus du village de Blotchchyntsy, au sud de Kiev. Le Major (commandant) Stepan Choban, de la 831e BrTA, est abattu au-dessus de Kanatovo mais il peut se parachuter de son Su-27. Il aura moins de chance quatre jours plus tard… Son vainqueur pourrait être le Major Viktor Doudine, du 23e IAP, qui est crédité ce jour d’un Su-27. Le Major Dmitry Kolomiets de la 39e BrTA est lui aussi abattu entre Khmelnitski et Ternopil aux commandes d’un Su-27 [4]. Le lieu de son « crash », très à l’ouest de l’Ukraine, pourrait indiquer un « tir ami » dans le chaos provoqué par l’attaque russe. Un second Soukhoï de la 39e BrTA, le Su-27S1M « 23 bleu » qui avait été déployé dans le sud du pays, se réfugie dans l’espace aérien roumain à 06h15 (heure locale) équipé de tout son armement : six missiles R-27 à moyenne portée et quatre R-73 à courte portée. Intercepté par deux chasseurs F-16, il est escorté jusqu’à la 95e base aérienne de Bacău où il se pose cinquante minutes plus tard.
[3] Kokhanskyi était pilote-inspecteur principal à la KhNUPS, l’Université nationale des forces de terrain de Kharkiv.
[4] Le gouvernement ukrainien mentionnera le 7 août 2022 qu’il était à bord d’un petit biplace d’entraînement Aero L-39 Albatros, ce qui parait très étonnant puisqu’il s’agissait d’une mission de combat.
Le Lt-Col Volodymyr Kokhanskyi (instructeur) et le Lt Roman Pasoulko de la 40e BrTA sont tués en évacuant un MiG-29UB le 24 février 2022.
Lt Roman Pasoulko de la 40e BrTA
Racé et puissant, le Soukhoï Su-35S (« Flanker-E » pour l’OTAN) est un appareil aussi beau qu’impressionnant. Celui-ci est le RF-93651 « 10 rouge » du 23e IAP.
Un missile air-air à courte portée Vympel R-73 est accroché sous l’aile d’un chasseur russe.
Le Major Dmitry Kolomiets, pilote de Su-27 à la 39e BrTA, est tué par un Su-35S russe le 24 février 2022.
Le Su-27S1M « 23 bleu » de la 39e BrTA qui a dû se réfugier en Roumanie le 24 février 2022.
En fin de matinée l’aéroport Antonov d’Hostomel (Gostomel), situé à 40 km au nord-ouest de Kiev, est pris d’assaut par un bataillon aéroporté russe amené par une vingtaine d’hélicoptères Mi-8AMTSh du détachement Klin-5, une unité d’opérations spéciales normalement stationnée sur la base aérienne de Torjok, à 200 km au nord-ouest de Moscou. Ces Mi-8 sont appuyés par des Ka-52 et des Mi-24, ainsi que par des Su-25. L’aéroport tombe aux mains des commandos russes au bout de quelques heures.
Des Su-25 de la 299e BrTA participent à la contre-offensive que la Garde nationale ukrainienne lance dans l’après-midi aux côtés des MiG-29 de la 40e BrTA, des Su-24 de la 7e BrTA et d’hélicoptères Mi-24 de l’aviation de l’armée. Au cours des combats, deux appareils de transport civil, l’An-74T UR-74010 et l’An-26 UR-13395 sont détruits sur le tarmac tandis que plusieurs autres sont endommagés, dont l’An-132D UR-EXK. Vers 21h00, les Ukrainiens sont parvenus à reprendre le secteur nord-ouest de l’aéroport mais l’Antonov An-225 UR-82060 Mriya, le plus gros avion du monde, est détruit dans son hangar durant la nuit ainsi que deux autres avions d’Antonov Airlines. Grâce à l’arrivée de nouvelles troupes, les Russes vont réussir le lendemain à sécuriser la tête de pont sur l’aéroport d’Hostomel, leur aviation ayant annihilé la colonne de renfort ukrainienne.
Si un MiG-29 de la 40e BrTA est abattu dans le réservoir de Kiev par des missiles sol-air portatifs (plus connus sous leur acronyme anglais de MANPADS), de même que le Su-24M « 20 blanc » de la 7e BrTA dont l’équipage est tué [5] dans les lignes russes près de Boryspil, les défenseurs réussissent à détruire cinq des trente-quatre hélicoptères utilisés dans l’attaque d’Hostomel. Le Mil Mi-24P RF-95290 « 04 rouge » de la 17e BrAA est abattu par un MANPADS au cours de l’approche à très basse altitude au-dessus du Dniepr près de Vyšhorod [6]. Un Ka-52 – peut-être le RF-91122 « 22 jaune » dont des photos sont apparues sur les réseaux sociaux – est contraint de se poser à proximité même de l’aéroport après avoir été endommagé par les soldats de la 4e brigade de la garde nationale d’Ukraine ; son équipage blessé est aussitôt évacué par un Mi-24. Touché par un missile sol-air portatif Stinger, un second Ka-52 codé « 18 bleu » de la 18e BrAA doit effectuer un atterrissage d’urgence au nord-ouest de Kiev ; on ignore le sort de son équipage, apparemment du 319e OVP, qui aurait pu rejoindre les lignes russes. Une quatrième épave d’hélicoptère a été repêchée début juin 2022 dans le réservoir de Kiev ; il s’agit du Mi-24VM RF-13024 « 29 bleu » du 112e OVP dont les trois hommes d’équipage sont décédés [7]. Sévèrement endommagé, un Mi-8AMTSh du détachement Klin-5, le RF-91285 « 52 rouge », devra être dynamité sur l’aéroport d’Hostomel au moment du retrait des troupes russes de la région de Kiev, fin mars. On peut signaler qu’à 10h30, l’état-major des forces armées ukrainiennes réclamait déjà la destruction d’au moins six avions, deux hélicoptères…
[5] Maj Dmitry Koulikov (pilote) et Maj Mykola Savtchouk (navigateur).
[7] Maj Roman Grovitch, Maj Nikolaï Bougaï et Cne Alexeï Belkov.
L’attaque de l’aéroport d’Hostomel est menée par des Mi-8 escortés par des « tueurs de chars » Kamov Ka52 au double rotor caractéristique, comme ici le RF-91332 « 48 blanc » équipé de quatre containers lance-roquettes de 80 mm.
Le biréacteur An-74T UR-74010 d’Antonov Airlines, détruit le 24 février 2022 sur le tarmac de l’aéroport d’Hostomel.
Les restes de l’An-26-100 UR-13395
Les restes de l’An-26-100 UR-13395 sur le tarmac d’Hostomel. Comme le précédent, cet avion appartenait à Antonov Airlines.
L’hexaréacteur An-225 Mriya, exemplaire unique du plus gros avion du monde, est détruit au sol dans son hangar au cours de la nuit du 24 au 25 février 2022 à Hostomel. Il constituait le principal atout de l’Ukraine dans sa collaboration avec les pays de l’OTAN, pour le compte desquels il était régulièrement affrété. Devant lui, l’épave calcinée d’un blindé léger BMD-2 des troupes aéroportées russe.
L’hexaréacteur An-225 Mriya,
Après le retrait des troupes russes fin mars 2022, un soldat ukrainien passe devant l’épave de l’An-225 Mriya à Hostomel. L’étendue des dégâts est telle que l’appareil est irréparable.
Vue aérienne du hangar de l’An-225 à Hostomel
Un MiG-29 ukrainien en camouflage pixélisé en vol dans le secteur de Kiev le 24 février 2022.
Cet extrait vidéo d’un appareil qui s’écrase le 24 février 2022 à l’extrémité sud du réservoir de Kiev a été présenté dans les médias comme un hélicoptère Ka-52 russe, mais il montre en fait la chute d’un MiG-29 de la 40e BrTA ukrainienne. On aperçoit à gauche le parachute du pilote qui a réussi à s’éjecter… Un Ka-52 a bien été abattu dans le Dniepr mais il est tombé plus au nord, à un endroit où les berges sont bien plus larges et sans produire la moindre fumée.
Des Su-24M ukrainiens larguent des bombes parachutées sur l’aéroport d’Hostomel le 24 février 2022. On aperçoit à gauche l’An-74T UR-74010 en train de brûler.
Le Su-24M « 20 blanc » de la 7e BrTA sera abattu dans les lignes russes au cours de la contre-attaque ukrainienne sur Hostomel.
Une épave d’hélicoptère russe sortie du réservoir de Kiev le 4 mai 2022 par les gardes-frontières ukrainiens. Le rotor de queue tripale montre qu’il s’agit d’un Mi-24 et non d’un Mi-35M comme annoncé sur les réseaux sociaux. Cet appareil est le Mi-24P RF-95290 « 04 rouge » de la 17e BrAA abattu le 24 février précédent.
Détail de la queue du Mi-24P « 04 rouge », sur laquelle le n/c 3532432825548 est bien visible à côté de l’immatriculation RF-95290.
Le Lt Renat Mankichev, pilote du Mi-24P RF-95290 « 04 rouge » de la 17e BrAA russe.
Le Ka-52 détruit à proximité de la piste d’Hostomel le premier jour de l’invasion pourrait être le RF-91122 « 22 jaune » identifié grâce au numéro constructeur 35382608007 inscrit au bas du gouvernail. L’étoile russe et le code ont été effacés.
Le Lt Alexandre Podchivalov, navigateur du Ka-52 « 22 jaune » le 24 février 2022.
Sévèrement endommagé par un missile Stinger lors des combats au-dessus de l’aéroport d’Hostomel, un Ka-52 de la 18e BrAA doit se poser en urgence au nord-ouest de Kiev. Les marques d’identification russes ont été recou-vertes pour l’opération et remplacées par le V blanc des unités opérant depuis la Biélorussie. La tache noire à l’avant des entrées d’air cache son code « 18 bleu ».
Ka-52 de la 18e BrAA doit se poser – 2
Ka-52 de la 18e BrAA doit se poser – 3
Ka-52 de la 18e BrAA doit se poser – 4
Lui aussi extrait du réservoir de Kiev, le Mi-24VM RF-13024 « 29 bleu » appartient au 112e OVP, plutôt qu’à la 16e BrAA comme annoncé dans un premier temps.
Mi-24VM RF-13024 « 29 bleu » – 2
Mi-24VM RF-13024 « 29 bleu » – 3
Hors service au moment du retrait des troupes russes de la région de Kiev, le Mi-8AMTSh RF-91285 « 52 rouge » sera dynamité sur l’aéroport d’Hostomel le 31 mars 2022. Toutes les marques d’identification ont été recouvertes d’un badigeon.
Mi-8AMTSh RF-91285 « 52 rouge » – 2
Mi-8AMTSh RF-91285 « 52 rouge » – 3
Précédés par des Su-24MR de reconnaissance chargés de détecter les défenses antiaériennes adverses, des bombardiers tactiques Su-24M et des avions d’attaque au sol Su-25 harcèlent durant toute la journée les forces terrestres ukrainiennes. À Kherson, les Su-25 russes détruisent ainsi, sans perte, plus d’une centaine de véhicules militaires sur le pont Antonovsky qui enjambe le Dniepr.
Les forces aériennes ukrainiennes font exactement la même chose pour repousser les colonnes russes qui approchent du pont, mais avec des résultats nettement plus mitigés. À 12h05, deux Su-25 de la 299e BrTA décollent de Kanatovo pour s’en prendre à des véhicules de transport lourd sur la route T2202 reliant Tchaplynka à Nova Kakhovka. Leur attaque se solde par la perte du lieutenant-colonel Oleksandr Jibrov, tué aux commandes du Su-25M1K « 19 bleu » qui s’écrase à Tchorna Dolyna. J’ai à peine eu le temps d’esquiver, se souvient son ailier. Nous avons largué les bombes, les tirs de missiles ont commencé, à ce moment-là, il y a eu un éclair et son avion n’était plus visible, transformé en flamme. Je n’ai rien vu après ça.
Une seconde paire arrive peu après sur le même objectif armée de lance-roquettes de 80 mm. Si trois camions KamAZ du génie transportant des ponts mécanisés lourds TMM-3M2 sont détruits, les MANPADS russes se révèlent cette fois encore terriblement efficaces. Le capitaine Oleksandr Chtcherbakov s’écrase au sol après s’être s’éjecté à trop basse altitude du Su-25M1 « 30 bleu ». Le Su-25M1 « 15 bleu » est quant à lui touché par un missile au côté droit ; son pilote le Major Rostislav Lazarenko (commandant adjoint de la 299e BrTA) réussit à s’échapper en lançant des leurres pour éviter d’autres MANPADS, mais les dégâts sont tels qu’il doit effectuer un atterrissage forcé sur un aérodrome de dégagement : Miraculeusement, l’atterrissage a réussi, j’ai freiné et j’ai même eu assez de carburant pour dégager la piste. J’ai soufflé un grand coup, je suis sorti de la cabine et j’ai vu que mon Su-25 était complètement détruit. La queue, les ailes, tout était perforé. J’ai regardé les ailettes du réacteur – pas une seule n’était intacte, toutes étaient cassées. Comment il avait pu m’amener là, c’est un mystère. Les techniciens de la brigade arrivés sur place ne pourront que constater que le « 15 bleu » est désormais irréparable…
Vers 15h00, le lieutenant-colonel Vyatcheslav Yerko de la 40e BrTA est lui aussi abattu en combat aérien à Volodymyrivka, au nord-ouest de Kiev, au cours d’une bataille féroce durant laquelle les efforts conjoints des pilotes ukrainiens ont permis d’abattre cinq avions ennemis. Il parvient à s’éjecter de son MiG-29MU1 « 05 blanc » mais s’écrase au sol, son parachute ayant été abîmé. Aucune épave de chasseur russe n’a été retrouvée. Une cinquantaine de kilomètres au sud de Kiev, un missile antiaérien – probablement ukrainien – touche le bimoteur de transport An-26 « 59 bleu » du Centre de recherches d’état des forces armées ukrainiennes qui s’écrase au nord du village de Joukivtsi ; cinq des quatorze personnes à bord sont tuées. La milice indépendantiste pro-russe de Lougansk (RPL) déclare avoir descendu au cours de la journée deux bombardiers Su-24 ukrainiens.
Un monoplace d’assaut russe Su-25SM photographié début 2022.
Le Su-25M1K « 19 bleu » de la 299e BrTA tirant des missiles R-60. Baptisé AA-8 « Aphid » dans le code OTAN, ce missile air-air à guidage infrarouge à une portée comprise entre 4 et 8 km, mais il est rarement utilisé par les pilotes de Su-25 qui effectuent essentiellement des attaques au sol.
Plusieurs transports lourds russes ont été détruits par les Su-25 ukrainiens sur la chaussée au nord-est de Kherson le 24 février 2022. Au premier plan les restes du Su-25 « 19 » du Lt-Col Jibrov.
Un aperçu de la colonne détruite par l’attaque de la 299e BrTA : un ponton remorqué
Les restes du Su-25M1 « 19 bleu » du Lt-Col Jibrov abattu le 24 février 2022 à Tchorna Dolyna. L’appareil s’est écrasé à proximité du convoi qu’il attaquait. Le logo du faucon en piqué sur une cocarde jaune et bleue est celui de l’usine ZDARZ « MiGremont ». Chaque Su-25 qui y passe en révision en est décoré, mais uniquement sur le côté droit de la dérive.
Les restes du Su-25M1 « 19 bleu »
Lt-Col Oleksandr Jibrov (9 juillet 1979-24 février 2022).
Un fantassin russe armé d’un redoutable 9K333 Verba, un MANPADS à guidage infrarouge de quatrième génération.
Le Su-25M1 « 30 bleu » qui a été abattu le 24 février 2022 près de Kherson.
Les derniers instants du Su-25 « 30 bleu » de Chtcherbakov le 24 février 2022.
Les derniers instants du Su-25 « 30 bleu »
UkraLe Su-25M1 « 30 bleu » du Cne Chtcherbakov a été pulvérisé à l’impact. On aperçoit au premier plan le tube du canon de 30 mm.
Gros plan sur le code 30 bleu peint sur le Su-25M1 n/c 25508110262 de la 299e BrTA.
Cne Oleksandr Chtcherbakov (25 février 1995-26 février 2022).
Les Su-25M1 ukrainiens « 15 bleu » et « 17 bleu » au décollage avant l’invasion russe. Ils sont armés de deux conteneurs B8M1 chargés chacun de vingt roquettes de 80 mm.
Rostislav Lazarenko, le miraculé du 24 février 2024.
Quelques extraits vidéo montrant un Su-25 ukrainien endommagé au-delà du réparable. L’examen des pixels peints sur le flanc du réacteur gauche montre qu’il s’agit du « 15 bleu » piloté par le Maj Lazarenko le 24 février 2022.
Su-25 ukrainien endommagé – 1
Su-25 ukrainien endommagé – 2
Su-25 ukrainien endommagé – 3
Le MiG-29MU1 « 05 blanc » de la 40e BrTA lors de l’exercice conjoint « Clear Sky 2018 », mené à Starokos-tiantyniv par les aviations ukrainiennes, américaine, polonaise et roumaine en octobre 2018.
L’épave du MiG-29MU1 « 05 blanc » de la 40e BrTA, tombé dans une forêt au nord-ouest de Kiev.
Le Lt-Col Vyatcheslav Yerko, abattu en combat aérien le 24 février 2022.
Cet An-26 ukrainien codé « 59 bleu » (n/c 50-03) a été abattu par un missile – vraisemblablement tiré par la DCA de Kiev – au sud de la capitale le 24 février. Il appartenait au Centre de recherches d’état des forces armées.
An-26 ukrainien codé « 59 bleu » abattu par un missile – 2
An-26 ukrainien codé « 59 bleu » abattu par un missile – 3
An-26 ukrainien codé « 59 bleu » abattu par un missile – 4
An-26 ukrainien codé « 59 bleu » abattu par un missile – 5
An-26 ukrainien codé « 59 bleu » abattu par un missile – 6
Un Su-25 russe tombe près de Karpylivka, au sud-ouest de Tchernobyl, mais son pilote est récupéré par son camp après s’être éjecté. Si Moscou attribue cette perte à une faute de pilotage, Kiev indique que l’appareil a été détruit par un tir provenant du sol. L’Antonov An-26 RF-36074 « 19 bleu », qui effectuait une livraison de fret et d’armes pour l’opération en cours, s’écrase sur le territoire russe en raison d’une défaillance technique. Tout l’équipage du pilote Rostislav Eremenko (six hommes) est perdu dans le « crash » survenu à Ostrogojsk, près de Voronej. L’état-major ukrainien revendique en soirée avoir abattu quinze appareils, dont trois Su-25 lors d’une attaque de l’aéroport de Poltava et cinq avions plus un hélicoptère dans la région de Lougansk. Ces affirmations – démenties par les Russes – sont à prendre avec précaution en l’absence de preuve de leur destruction. La seule perte certaine est celle du colonel Rouslan Roudnev, du 266e ChAP, dont le décès sera rendu public le 1er mars ; son Su-25SM « 29 jaune » a été abattu par un PLRK portable dans la région Irpin – Makariv – Kalynivka. Parmi les appareils russes perdus dans le Donbass figurerait un Su-24 descendu par un missile antiaérien près de Kramatorsk, équipage tué.
Grâce à l’arrivée par voie de terre mais aussi par hélicoptères de la 76e division d’assaut aéroportée de la Garde, transportée en Biélorussie par une vingtaine d’Iliouchine Il-76, les Russes peuvent finalement sécuriser leur tête de pont sur l’aéroport d’Hostomel le 25 février, leur aviation ayant annihilé la colonne de renfort ukrainienne. À 04h30, le chasseur Su-27P1M « 100 bleu » de la 831e BrTA est abattu par un missile Bouk-M de sa propre DCA au-dessus d’Osokorky (Oskorki), dans la banlieue sud-est de Kiev. Aux commandes se trouvait le colonel Oleksandr Oksanchenko, pilote de démonstration du Su-27 en Ukraine de 2013 à 2018 et commandant-adjoint de la 831e BrTA. Les autorités locales feront croire qu’il a été frappé par un missile russe S-400 tiré depuis la Biélorussie (soit à la distance incroyable de 150 km) alors qu’il a manifestement été victime d’une défaillance de communication entre l’aviation et l’artillerie antiaérienne ukrainiennes…
Deux Su-25 de la 299e BrTA partis bombarder un pont sur le Pripiat, à une quarantaine de kilomètres de la frontière biélorusse, sont interceptés vers 07h00 par des chasseurs russes à une vingtaine de kilomètres au nord-est de l’aéroport d’Hostomel. Touché par un missile air-air, le Su-25M1 « 39 bleu » prend feu au-dessus d’une base de loisirs ; pour éviter des victimes civiles, le lieutenant-colonel Guennady Matoulyak reste aux commandes de l’appareil qui s’écrase dans une forêt du village de Hlibivka (Glebovka), près du réservoir de Kiev. Son ailier, le lieutenant Andreï Maksimov, parvient à s’échapper. La 204e BrTA perd le MiG-29 « 35 bleu » qui s’écrase pour des raisons inconnues dans la région d’Ivano-Frankivsk, le pilote pouvant s’éjecter sain et sauf. Les Russes rayent de leurs effectifs le Mi-28N « 43 bleu » du 39e VP qui tombe près de l’aéroport d’Hostomel, à proximité du village de Blystavytsa, causant la mort du lieutenant-colonel Ayrat Safargaleev et du Major Dimitri Zlobin.
La DCA ukrainienne revendique un Su-25 qui se serait écrasé à 08h30 près de Voznessensk, au nord-ouest de Mykolayiv, mais aucune preuve n’en a été fournie. Résumant les résultats des deux premiers jours de guerre, le commandement ukrainien déclare que les Russes ont perdu quatorze avions et huit hélicoptères, dont deux Su-30SM abattus par un pilote de Su-27, le lieutenant Vitaly Molchan qui sera décoré à titre posthume. Si cette déclaration nous apprend qu’un second pilote de Su-27 ukrainien a été tué en combat aérien, il faut signaler qu’aucun Su-30SM russe n’aurait été perdu en combat ce jour-là. Un avion de ce type, appartenant au 31e GvIAP, est par contre incendié par un missile balistique Tochka-U lancé sur la base aérienne de Millerovo, dans la région de Rostov.
Profitant de l’émotion suscitée sur les réseaux sociaux par les quinze victoires qu’il annonçait la veille, le Ministère de la Défense d’Ukraine lance sur son compte Twitter la légende du « Fantôme de Kiev » : un pilote de MiG-29 aurait abattu six avions russes en l’espace de 30 heures, répandant la terreur chez ses adversaires ! Les médias se chargeront de préciser que deux Su-35, un Su-27, un MiG-29 [8] et deux Su-25 seraient tombés sous les tirs du premier as du 21e siècle, Vladimir Abdonov, dont le score sera même porté à dix victoires le 27 février. Cette Fake News grotesque, que l’on peut associer à une autre annonce du MDU faite le 25 février (sept hélicoptères ont été abattus par des missiles Stinger), a probablement été répandue pour tenter de masquer les lourdes pertes subies par les défenseurs dans les premières heures de l’attaque russe… Elle a été officiellement reconnue comme une fausse information par le gouvernement ukrainien le 2 mai 2022.
[8] Décompte forcément faux, puisque les Russes n’ont engagé aucune unité de MiG-29…
Un autre An-26, russe cette fois, s’écrase pour des raisons techniques près de Voronej : le RF-36074 « 19 bleu ».
Le RF-36074 « 19 bleu »..
Le Col Rouslan Roudnev, du 266e ChAP, est semble-t-il le seul pilote russe de Su-25 à avoir été tué le 24 février 2022.
Le pilote ukrainien Oleksandr Oksanchenko photographié en 2018 aux commandes du Su-27P1M « 58 bleu ».
C’est cependant à bord du « 100 bleu » qu’Oksanchenko sera tué le 25 février 2022.
L’impact de la DCA ukrainienne, peu avant l’aube du 25 février 2022, sur un « chasseur ennemi » qui s’avèrera être un Su-27P1M de la 831e BrTA…
L’épave du Su-27 « 100 bleu » ukrainien tombé dans un complexe résidentiel proche de Kiev.
Cockpit et radôme de nez du Su-27P1M de la 831e BrTA abattu par erreur par la DCA ukrainienne dans la ban-lieue de Kiev dans la nuit du 24 au 25 février 2022.
Le Su-25M1 « 39 bleu » de la 299e BrTA dont la carrière s’achèvera le 25 février 2022.
Trois vues de l’épave du « 39 bleu », tombé le 25 février dans une forêt au nord-ouest de Kiev.
Vue de l’épave du « 39 bleu » – 2
Vue de l’épave du « 39 bleu » – 3
Le Lt-Col Guennady Matoulyak, de la 299e BrTA, tué le 25 février 2022 à bord du Su-25M1 « 39 bleu ».
Le MiG-29 « 35 bleu » de la 204e BrTA s’écrase dans l’ouest de l’Ukraine le 25 février 2022, probablement sur accident.
Deux Su-30SM du 31e GvIAP à Millerovo. Un appareil de cette unité est détruit au sol par un missile balistique ukrainien dans la journée du 25 février 2022.
Le 26 février, les Su-25 ukrainiens armés de roquettes S-8 de 80 mm sont de nouveau lancés par paires à l’assaut des troupes russes qui progressent dans le Sud en direction de Kherson. L’avance des troupes russes dans le sud de l’Ukraine leur permet de rétablir l’approvisionnement en eau de la Crimée, en ouvrant les vannes du canal Nord-Crimée (alimenté par le Dniepr) qui étaient fermées depuis huit ans sur ordre du gouvernement ukrainien. Les « Gratch » de la 299e BrTA détruisent plusieurs ponts de bateaux sur le Dniepr au prix d’un nouveau tué, le capitaine Andreï Antykhovytch dont le Su-25M1 « 31 bleu » s’écrase à 17h55 près du village de Fedorivka.
D’autres ripostes aériennes ukrainiennes ont lieu dans la région de Gorodnia, près de la frontière biélorusse, pour un total général de 34 sorties. Un convoi de vingt véhicules aurait ainsi été entièrement détruit par un Su-24M. L’activité de l’aviation adverse conduit les Russes à poursuivre leurs frappes de missiles sur les bases ukrainiennes, six MiG-29 de la 114e BrTA étant ainsi détruits ou sérieusement endommagés par des missiles Kalibr tirés par des navires de la Flotte de la Mer Noire à Ivano-Frankivsk dans la nuit du 26 au 27. Ces avions stockés n’étaient cependant pas opérationnels, comme la plupart de ceux qui ont été perdus au sol durant les trois premiers jours du conflit. La base d’Ozerne est également frappée. L’aviation russe réclame la destruction de huit avions et sept hélicoptères de combat à l’issue de cette journée.
Craignant un débarquement aéroporté semblable à celui d’Hostomel sur la base aérienne de Vasylkiv, siège des MiG-29 de la 40e BrTA, l’état-major ukrainien semble multiplier les déclarations sans fondement. À 01h30, il déclare qu’un pilote de Su-27 vient d’abattre un quadriréacteur Il-76MD vers Vasylkiv ; on apprendra par la suite qu’il s’agit du colonel Oleksandr Mostovoy, le commandant de la 831e BrTA, qui sera décoré pour avoir également descendu deux hélicoptères Mi-24 dans le même secteur. Aucune preuve de ces « victoires » n’a jamais été apportée, ce qui est d’autant plus curieux que les batteries de missiles S-300 sont elles-mêmes créditées d’un Mi-8 et d’un Su-25 à Vasylkiv… Les forces russes n’ayant jusqu’à preuve du contraire lancé aucun raid aéroporté sur la base de Vasylkiv, il est possible que toutes ces revendications soient le fruit de la panique engendrée par des frappes de missiles balistiques au cours de la nuit.
Le bilan final de la journée indique que onze avions russes auraient été abattus. Parmi ceux-ci figurent trois Su-30SM, dont un au-dessus de la mer par la DCA de navires russes (!) et un autre par un missile antiaérien ukrainien ; un Su-24 ; deux Su-25 supplémentaires, l’un durant la nuit à Vinnytsia, l’autre tombant victime d’un système antiaérien S-300 dans le Donbass. La même batterie aurait descendu une heure plus tard un hélicoptère. Le MDU revendique avoir abattu depuis le début des hostilités la bagatelle de 27 avions et 26 hélicoptères ! La seule perte russe du jour qui soit certaine est celle d’un hélicoptère Mi-35M frappé par un missile sol-air à Sahy (Sagi), quelques kilomètres à l’est de Kherson.
Gros plan sur le Su-25M1 « 31 bleu » de la 299e BrTA, vu le 12 octobre 2018 pendant l’exercice « Clear Sky 2018 ». Les missiles blancs sont des Kh-25ML à guidage laser semi-actif destinés à l’attaque des points fortifiés
Mauvais cliché de la queue du Su-25 « 31 bleu » de la 299e BrTA abattu au nord-est de Kherson.
Ukraine-2022-02-26-03
Une partie des MiG-29 de la 114e BrTA ukrainienne touchés à Ivano-Frankivsk le 26 février 2022.
Tirées d’une vidéo destinées à lever des fonds à l’étranger en faveur de l’aviation ukrainienne « qui a perdu des centaines d’avions de combat », ce qui est vraisemblable-ment très exagéré, ces trois vues montrent les MiG-29 de la 114e BrTA détruits au sol à Ivano-Frankivsk dans la nuit du 26 au 27 février 2022.
Tirées d’une vidéo destinées à lever des fonds à l’étranger en faveur de l’aviation ukrainienne « qui a perdu des centaines d’avions de combat », ce qui est vraisemblable-ment très exagéré, ces trois vues montrent les MiG-29 de la 114e BrTA détruits au sol à Ivano-Frankivsk dans la nuit du 26 au 27 février 2022.
Tirées d’une vidéo destinées à lever des fonds à l’étranger en faveur de l’aviation ukrainienne « qui a perdu des centaines d’avions de combat », ce qui est vraisemblable-ment très exagéré, ces trois vues montrent les MiG-29 de la 114e BrTA détruits au sol à Ivano-Frankivsk dans la nuit du 26 au 27 février 2022.
Un quadriréacteur de transport militaire russe Il-76MD a été crédité le 26 février 2022 au Col Oleksandr Mos-tovoy, le commandant de la 831e BrTA. Il est à peu certain que cette « victoire » n’est qu’un des nombreux montages de la propagande gouvernementale ukrainienne
Deux vues du Mi-35M russe abattu le 26 février par un missile sol-air dans un parc à Sahy, près de Kherson.
Deux vues du Mi-35M russe abattu le 26 février par un missile sol-air dans un parc à Sahy, près de Kherson.
Le 27 février est une journée au cours de laquelle la force aérospatiale russe n’effectue aucune revendication aérienne, son adversaire ayant fortement réduit le nombre de ses missions. Le Su-24M « 77 blanc » de la 7e BrTA est abattu alors qu’il bombardait un véhicule de transport de troupes russe à Borodyanka, au nord-ouest de Kiev. L’équipage, composé du Major Rouslan Bilous (pilote) et du capitaine Roman Dongalyouk (navigateur), est tué. L’aéroport de Jitomir, 150 km au nord-ouest de la capitale, est frappé par des missiles balistiques Iskander mais l’étendue des dégâts demeure inconnue.
Quelques Su-25 ukrainiens, opérant seuls ou par paires, attaquent quand même des colonnes russes dans les régions de Kherson et Tchernihiv en compagnie de Su-24M, ce dernier type d’appareil bombardant aussi des convois vers Zaporojié. Le Su-25M1 « 49 bleu » du lieutenant Andreï Maksimov est abattu par un missile aux abords du pont Antonivsky à Kherson mais son pilote peut s’éjecter ; blessé aux deux jambes et à la colonne vertébrale, Maksimov tombe dans les lignes russes où il est capturé. Sur le front de la Mer d’Azov, des Mi-8 ukrainiens transfèrent des renforts dans la cité de Marioupol sur le point d’être encerclée, car Melitopol et le port voisin de Berdiansk sont sur le point de tomber.
Le MDU affirme qu’un bombardier stratégique Toupolev Tu-22M3 aurait largué depuis la région de Koursk (en Russie) seize missiles sur la ville de Kharkiv, mais les photos prises sur place ne montrent que les restes de roquettes d’artillerie. Un hélicoptère Ka-52 est revendiqué par les défenseurs ukrainiens, ainsi qu’un Mi-8 transportant des troupes aéroportées à Ivanivka, dans la banlieue de Kherson, ce qui n’empêche pas les troupes russes de s’emparer au cours de la journée de cette grande ville située à l’embouchure du Dniepr. Un Su-25 russe aurait aussi été descendu en fin d’après-midi près de l’aéroport d’Hostomel, pilote tué. Il s’agit sans doute du Su-25SM RF-93027 « 12 rouge » du 18e GvChAP dont les restes seront retrouvés entre Bouda-Babynetska et Blystavytsia, une dizaine de kilomètres plus à l’ouest.
Le Su-25M1 « 49 bleu » de la 299e BrTA en 2021.
Deux clichés de l’épave du Su-25M1 « 49 bleu » abattu dans le secteur de Kherson.
Deux clichés de l’épave du Su-25M1 « 49 bleu » abattu dans le secteur de Kherson.
Le pilote du Su-25 ukrainien, le Lt Andreï Maksimov, en traitement dans un hôpital militaire russe.
Deux systèmes radar ukrainiens, un 1L22 Parol sur camion Oural et un PRV-13 Nadejnost 2, détruits dans les faubourgs ouest de Marioupol lors d’un raid aérien russe au début du conflit.
Deux Su-25 de la force aérospatiale russe au décollage. La similarité des types d’appareils employés par les deux adversaires explique une partie des « tirs amis » constatés.
Portion de l’empennage du Su-25SM RF-93027 « 12 rouge » du 18e GvChAP probablement abattu le 27 février 2022 à l’ouest d’Hostomel. Comme sur la plupart des avions russes, le code individuel est répété en blanc en haut de la dérive.
Le 28 février, les revendications des deux camps sont une nouvelle fois contradictoires : du côté russe, le Major Viktor Doudine du 23e IAP intercepte deux Su-27 à 10 000 m d’altitude ; il abat le premier seul et le second en collaboration avec son ailier… Cet officier avait réclamé deux jours plus tôt la destruction d’une batterie antiaérienne Bouk-M1 à l’aide d’un missile Kh-31PM qu’il avait tiré après être descendu à seulement 400 m d’altitude. Du côté ukrainien, le lieutenant Andreï Gerous de la 40e BrTA se fait homologuer un Il-76 transportant près de 150 parachutistes qu’il descend à 03h20 au-dessus de l’aéroport Kropyvnytskyi de Kirovohrad, au centre de l’Ukraine. Or, la seule perte confirmée des belligérants est celle du Su-27S1M « 11 bleu » piloté par le Major Stepan Choban de la 831e BrTA, détruit en combat aérien au-dessus de Kropyvnytskyi… Aucune épave d’Il-76 russe n’ayant été retrouvée, il est donc logique de penser que Choban [9] a été descendu par un MiG-29 ukrainien ! Un hélicoptère Mi-8 de la 16e OBrAA est aussi abattu par un missile sol-air près du village de Makariv, dans le district de Boutcha, au nord-ouest de Kiev. Tout l’équipage est tué (colonel Oleksandr Grigoryev, capitaine Dmitry Nesterouk et lieutenant Vasyl Hnatyouk).
[9] Ou Chobanu, un pilote d’origine roumaine.
La force aérienne ukrainienne contre-attaque à plusieurs reprises. Les Su-25 de la 299e brigade tactique bombardent des colonnes de véhicules blindés dans les régions de Kiev et de Jytomyr, tandis que les Su-24M de la 7e BrTA frappent quatre chars et des colonnes mécanisées russes dans la région de Tchernihiv, à proximité de la frontière biélorusse et près de Berdiansk, au sud-est de Marioupol. Le Ministère de la Défense ukrainien signale que ses chasseurs ont intercepté et abattu deux avions au cours de la journée, tandis que trois autres ont été « liquidés » par des missiles sol-air S-300 lors d’un raid aérien sur Vasylkiv et Brovary, dans le secteur de Kiev. Tous ces appareils auraient été des Su-30 et des Su-35.
Les pertes russes se montent à un hélicoptère et trois avions : un Mi-35 tombé à Olechky près de Kherson, faisant deux tués, un chasseur biplace Su-30SM abattu au-dessus de l’aéroport d’Hostomel [10] et deux bombardier Su-34. Le premier est un appareil du 277e GvBAP qui s’écrase près de Borodyanka, à l’ouest de Kiev, après avoir été frappé par un missile sol-air ; l’équipage du RF-821251 « 31 rouge », composé du capitaine Artur Goubaïdouline et du Major Maxim Bogdan, est récupéré par les troupes russes après s’être éjecté. Le second est le RF-81259 « 05 rouge » du 2e GvBAP qui tombe sur l’aérodrome de Bouzova, utilisé par la section de planeurs de l’aéroclub de Kiev.
[10] Au moins un des membres d’équipage, le Lt Viatcheslav Maklagine (navigateur), est tué.
Dans la soirée du 28 février, le Ministère de la Défense russe proclame que son aviation a acquis la supériorité aérienne sur l’ensemble du territoire de l’Ukraine, les forces aérospatiales revendiquant la destruction de 311 blindés ainsi que celle de 42 avions et hélicoptères, dont 11 en vol et 31 au sol. S’il est impossible de confirmer ces affirmations, elles apparaissent cependant plus crédibles que le bilan annoncé le lendemain à 06h00 par le Ministère de la Défense ukrainien : 1007 blindés dont 191 chars, auxquels s’ajoutent 29 avions et 29 hélicoptères russes détruits depuis le début de l’attaque, des chiffres totalement invérifiables.
Le Su-34 « 31 rouge » du 277e GvBAP au temps de sa splendeur…
Et après avoir été frappé par un missile ukrainien près de Kharkiv le 28 février 2022. Son équipage a été récupéré par les troupes russes après s’être éjecté.
Et après avoir été frappé par un missile ukrainien près de Kharkiv le 28 février 2022. Son équipage a été récupéré par les troupes russes après s’être éjecté.
L’aérodrome de Bouzova, sur lequel s’est écrasé le Su-34 « 05 rouge » du 2e GvBAP le 28 février 2022.
Deux vues des restes du Su-34 RF-81259 « 05 rouge ». 1
Deux vues des restes du Su-34 RF-81259 « 05 rouge ». 2
Le Su-27P1M « 57 bleu » baptisé Ivan Babak de la 831e BrTA en octobre 2019.
À partir du 1er mars, l’aviation russe interrompt ses raids sur les bases aériennes adverses pour se consacrer en priorité à l’appui aérien des troupes terrestres. La « guerre éclair » de Vladimir Poutine, lancée par des forces limitées et confrontée à une résistance ukrainienne beaucoup plus forte que prévue, s’enlise dans toutes les directions opérationnelles, sauf au Sud où deux bases viennent de tomber aux mains des Russes : Chornobaïvka, près de Kherson, où un Mi-2, un Mi-8MTV et moins neuf Mi-24 non opérationnels de la 11e OBrAA sont capturés, ainsi que Melitopol où stationnait la 25e BrTrA de transport. L’Il-76MD n/c 76699, alors en maintenance, y est saisi par les troupes de Moscou.
Des hélicoptères ukrainiens attaquent un convoi à Snihourivka, au nord de Kherson. Le maire de Mykolayiv (Nikolaïev), autre grande ville du Sud, reconnait la perte d’un Mi-8 dont l’équipage est hospitalisé. Touché par un missile russe, un Su-24M de la 7e BrTA s’écrase à 06h50 près du village de Krasenivka, au nord-est de Tcherkassy ; l’équipage peut s’éjecter bien qu’il soit blessé. Les Ukrainiens récupèrent ce jour le Su-27S1M « 23 bleu » de la 39e BrTA qui était interné en Roumanie depuis le 24 février. Un missile balistique ukrainien Tochka-U frappe la base de Taganrog, à l’extrémité est de la Mer d’Azov, où il met le feu à un quadriréacteur de transport Il-76MD russe. À l’image d’un autre Kamov de sa brigade le premier jour de l’invasion, le Ka-52 RF-90304 « 14 bleu » de la 18e BrAA doit effectuer un atterrissage forcé près du village de Babyntsi, au nord-ouest de Kiev ; devant l’impossibilité de l’évacuer, il sera détruit à la fin du mois de mars par les troupes russes lors de leur repli.
Dans la matinée du 2, le commandement de l’armée de l’Air ukrainienne déclare sur son compte Facebook que deux de ses chasseurs MiG-29 ont livré dans la nuit du 1er au 2 une féroce bataille aérienne dans la région de Kiev à deux Su-35 russes ; un Su-35 a été abattu avec des missiles air-air, un autre par un système de défense aérienne S-300 mais l’un des MiG-29 s’est écrasé et son pilote est porté manquant. Quelques heures plus tard, le Ministère de la Défense russe niera toute perte dans ce secteur, en précisant que le chasseur ukrainien a été abattu par erreur par sa propre DCA ! Il est un fait qu’aucun exemplaire du « super-chasseur » Su-35S n’a jusqu’alors été perdu en Ukraine. Le pilote du MiG-29 est le Major Oleksandr Brinjal de la 40e BrTA dont le décès ne sera révélé qu’un mois plus tard, accompagné d’une nécrologie héroïque selon laquelle ce n’était plus deux, mais douze Su-35S qu’avaient dû affronter les deux pilotes ukrainiens, Brinjal abattant deux de ses adversaires avant de succomber tandis que son ailier en abattait un troisième. Par la suite, son camarade le capitaine Andreï Piltchchikov révèlera que Brinjal a été victime d’un missile air-air russe R-77-1 du type « tire et oublie » alors que les Ukrainiens ne disposent que de vieux missiles R-27 dont le radar embarqué doit illuminer la cible jusqu’à l’impact… Piltchchikov avouera que les pilotes ukrainiens n’ont rien pu faire, ce qui indique qu’aucun appareil russe n’a été descendu en retour… Le vainqueur de Brinjal doit être le Major Viktor Doudine du 23e IAP, qui remporte au même moment sa quatrième victoire homologuée en descendant d’un seul missile R-77-1 un nouveau « Su-27 » près de Kiev, ce qui lui vaudra trois jours plus tard d’être fait « Héros de la Fédération de Russie » par Vladimir Poutine.
Un reporter de la chaîne d’information en continu russe RT devant trois des Mi-24 capturés sur la base de Chor-nobaïvka le 1er mars 2022.
L’Il-76MD n/c 76699 de la 25e BrTrA, alors en mainte-nance, est capturé sur la base aérienne de Melitopol fin février 2022. Les troupes russes ont inscrit sur ses ailes Сила России в Каждом из нас, ce qui signifie « La force de la Russie est en chacun de nous ».
Le Su-27S1M « 23 bleu » de la 39e BrTA s’apprête à décoller de Bacău (Roumanie) pour regagner l’Ukraine. Ses missiles et ses munitions ont été confisqués par les Roumains, qui les renverront discrètement quelque temps plus tard.
Le Ka-52 RF-90304 « 14 bleu » contraint à l’atterrissage au nord-ouest de Kiev le 1er mars 2022. Le matricule et le code de cet appareil équipé de deux containers lance-roquettes et de deux réservoirs supplémentaires ont été masqués par de la peinture vert vif. Un mois plus tard, le Kamov sera incendié par les Ukrainiens et présenté comme un « nouvel hélicoptère ennemi abattu par les défenses antiaériennes »…
Le Ka-52 RF-90304 – 2
Le Ka-52 RF-90304 – 3
Le MiG-29 ukrainien « 16 blanc » vu en août 2021.
Le Su-35S RF-95475 « 29 rouge » du 23e IAP. Descen-dant direct du Su-27 qui date de l’ère soviétique, ce monoplace est équipé d’un radar à balayage électronique Tikhomirov NIIP N035 Irbis-E bien supérieur à tout ce que peut lui opposer la chasse ukrainienne.
Un pilote de Su-35S a filmé grâce à sa caméra tête haute (HUD) le tir d’un missile R-77-1 du type « tire et oublie » sur un appareil ukrainien engagé de face.
Le Maj Viktor Doudine (à droite) fait « Héros de Russie » le 4 mars 2022, en compagnie du Lt-Col Dimitri Litvinov, commandant-adjoint d’un régiment de Su-25.
Le 2 mars, l’état-major ukrainien signale que ses Su-24M et ses Su-25 ont détruit des colonnes d’équipement militaire et de personnel russe dans les régions de Kiev, Soumy, Tchernihiv et Kharkiv. Ces raids en soutien de l’armée de terre seront renouvelés le lendemain ainsi que le 5 mars. Les Russes revendiquent deux avions abattus en l’air et deux autres détruits au sol pour un total général, le 3 au matin, de 13 avions dans les airs et 49 au sol.
Le capitaine Oleksandr Korpan, qui avait été détaché avec un ailier sur la base de Starokostiantyniv où tous deux opéraient aux côtés des Su-24 de la 7e BrTA, est effectivement tué en matinée au cours d’une alerte aérienne. Alerté d’une possible frappe de missiles russes, le personnel présent sur la base fait décoller en urgence tous les avions déjà chargés en munitions et en carburant. Pour une raison encore inconnue, le Su-25M1 « 29 bleu » de Korpan prend feu peu après le décollage, alors qu’il survole à basse altitude des immeubles résidentiels. Plutôt que de s’éjecter, l’officier dirige son avion en perdition à la périphérie de la ville où il s’écrase, sauvant ainsi la vie de dizaines de civils. Son geste héroïque vaudra à « Sacha » Korpan d’être fait à titre posthume Héros de l’Ukraine le 10 mars. L’état-major ukrainien le créditera d’une centaine de véhicules russes détruit depuis le 24 février, un palmarès qui parait assez exceptionnel en à peine une semaine de combats… Les Ukrainiens subissent aussi la perte d’un Su-24M de la 7e BrTA descendu par un chasseur Su-35S russe dans une forêt entre Bilka et Dovbysh, à l’ouest de Jitomir ; tué dans le « crash », l’équipage était composé de deux anciens puisque le pilote, le colonel Mykola Kovalenko, avait commandé la 7e BrTA avant de devenir directeur adjoint de la KNUPS (l’Université nationale de l’armée de l’air de Kharkiv) et que le navigateur, le capitaine Evgueny Kazimirov, était retraité depuis dix ans.
Le Su-25M1 « 29 bleu » de la 299e BrTA en vol au-dessus de Koulbakino le 14 juillet 2017.
Cne Oleksandr Korpan (8 mars 1994-2 mars 2022).
Le Col Mykola Kovalenko, tué le 2 mars 2022 aux com-mandes d’un Su-24M ukrainien à l’ouest de Jitomir.
Le 3 mars, les revendications ukrainiennes se poursuivent avec un Su-30 abattu par l’artillerie antiaérienne à Irpin, au sud de l’aéroport d’Hostomel, un Su-34 à Volnovakha, au sud de Donetsk et un chasseur à Bilhorod-Dnistrovskyï (Belgorod-Dnestrovsky), au sud-ouest d’Odessa. Si l’on ne peut confirmer les appareils tombés dans les régions de Donetsk et d’Odessa, le « Soukhoï Su-30 » est en fait le Su-25SM RF-91961 « 07 rouge » du 18e GvChAP, qui tombe à Makariv après avoir été touché par un missile sol-air au-dessus d’Irpin. Son pilote peut s’éjecter et regagner les lignes russes. Un Mi-28 du 39e VP s’écrase pour une cause inconnue, entrainant dans la mort les Major Igor Markelo et Sergueï Emelyantchik. Du côté ukrainien, le capitaine Vadim Moroz de la 299e BrTA est tué en attaquant une colonne blindée à Novoaleksandrovka, dans la région de Mykolayiv, son Su-25M1 « 40 bleu » ayant probablement été victime d’un MANPADS russe.
Le Su-25SM RF-91961 « 07 rouge », abattu le 3 mars 2022, avait décollé de Louninets en Biélorussie.
Un soldat ukrainien examine la dérive du Su-25 RF-91961 abattu à l’est de Kiev.
La queue du RF-91961 exposée début mai 2022 devant le Musée national d’histoire militaire d’Ukraine à Kiev.
Le Cne Vadim Moroz, de la 299e BrTA, est tué le 3 mars 2022 sur le Su-25M1 « 40 bleu ».
Ces fragments de Su-25 ukrainien « abattu vers Kher-son » ont été révélés par le communiqué du Ministère de la Défense Russe daté du 16 mars 2022. Il s’agit d’un extrados d’aile gauche et d’une partie du train d’atterrissage gauche. C’est l’une des rares occasions où le MDR a rendu publiques les preuves d’une victoire sur un appareil adverse.
Fragments de Su-25 ukrainien – 2
Lors de la journée du 4 mars, l’aviation de Moscou continue ses frappes sur les bases adverses, l’état-major russe revendiquant dix-sept appareils ukrainiens détruits au sol et cinq en l’air (ces derniers par la DCA). La base de la 299e BrTA à Koulbakino, près de Mykolayiv, est brièvement capturée par les troupes russes mais elle est reprise par les Ukrainiens dès le lendemain. Sa tour de contrôle et ses soutes à munitions et à carburant sont touchées par des raids aériens, de même que les alvéoles de protection sur le parking.
L’aviation ukrainienne annonce que ses Su-24 et ses Su-25 ont opéré avec succès dans les régions de Kiev, Soumy, Tchernihiv et Kharkiv. Elle réclame la destruction de trois Su-25 et de trois hélicoptères, portant son total à 39 avions et 40 hélicoptères depuis le début du conflit. Des six revendications de Kiev, quatre sont pour une fois documentées. La première concerne le Su-25SM RF-91958 « 04 rouge » du 18e GvChAP descendu par un missile près de Tchernihiv et dont le pilote s’éjecte au-dessus des lignes ukrainiennes. Il semble que le Major Evgueni Osipov participe ensuite aux combats au sol, au cours desquels il est tué par balle selon les autorités ukrainiennes qui l’annoncent dans un premier temps capturé… La seconde est le Su-25SM3 RF-93026 « 08 rouge » du 368e ChAP tombé à Volnovakha, dans la province de Donetsk, après avoir été touché par les artilleurs de la 54e brigade mécanisée ukrainienne ; son pilote le Major Ivan Vorobyov peut s’éjecter mais il sera retrouvé mort. La troisième est le Mi-8MTV-5 RF-04525 « 57 bleu » baptisé Nikolaï Maïdanov de la 16e BrAA qui est descendu en tentant de récupérer le Major Vorobyov. Transportant huit commandos, l’hélicoptère s’écrase en milieu d’après-midi à Solodke près de Volnovakha. Des trois membres de l’équipage (Major Alexandre Tchevtsov, lieutenants Dimitri Taranets et Ivan Reutine), seul Reutine s’en sort vivant de même qu’un de ses passagers, le capitaine Anatoly Semikine du 31e IAP ; blessés, les deux hommes sont faits prisonniers. La quatrième est le Mi-8AMTSh RF-91292 « 83 bleu » du 35e OTSAP dont l’épave sera retrouvée près de Makariv, une trentaine de kilomètres à l’ouest de Kiev, avec les corps de son équipage (capitaine Gennady Ismagoulov, lieutenant Alexeï Trichine et capitaine Konstantin Kousov, de la 18e BrAA) ainsi que ceux de deux passagers. La Marine ukrainienne réclame pour sa part avoir abattu en début de matinée un Su-35S en Mer Noire, mais sans en fournir la moindre preuve… ce qui n’a rien d’étonnant car aucune unité russe ne dispose de ce type de chasseur sur ce front !
La queue du Su-25SM « 04 » du 18e GvChAP, un des trois Su-25 russes revendiqués par la DCA ukrainienne le 4 mars 2022.
La queue du Su-25SM « 04 » – 2
La queue du Su-25SM « 04 » – 3
Maj Evgueni Osipov (15/01/1989-04/03/2022).
Trois vues d’un Su-25 russe survolant à basse altitude la ville de Donetsk au début du mois de mars 2022. L’appareil porte deux grands « Z » blancs sur le nez et la queue.
Vue d’un Su-25 – 2
Vue d’un Su-25 – 3
Le Su-25SM3 RF-93026 « 08 rouge » du 368e ChAP avant… et après la guerre en Ukraine. Parachuté, son pilote a pu rejoindre les lignes des indépendantistes pro-russes de la RPD le 4 mars.
Le Su-25SM3 RF-93026 « 08 rouge » – 2
Le Mi-8MTV-5 RF-04525 « 57 bleu » de la 16e BrAA. L’appareil a été baptisé Nikolaï Maïdanov en hommage à un célèbre pilote d’hélicoptère kazakh, tué le 29 janvier 2000 au cours de la seconde guerre de Tchétchénie.
Un Mi-8AMTSh russe au décollage d’une piste de cam-pagne sur le front d’Ukraine du Nord. Les trois bandes de reconnaissance rapide sur la queue, ainsi que le V blanc à l’arrière du fuselage, sont bien visibles.
Le Mi-8AMTSh RF-91292 « 83 bleu » photographié avant la guerre en Ukraine.
Les restes du même appareil après qu’il a explosé au sol le 4 mars 2022.
La queue du Mi-8AMTSh RF-91292 enlevée par l’armée ukrainienne.
Le 5 mars est une journée au cours de laquelle les pertes des deux partis en présence vont être sévères, particulièrement côté russe. L’aviation de chasse russe revendique la destruction en combat aérien de quatre Soukhoï Su-27 et d’un MiG-29 près de Jitomir, environ 130 km à l’ouest de Kiev. Le gouvernement ukrainien reconnaitra plusieurs mois plus tard qu’un de ses avions s’est bien écrasé vers 08h00 dans une forêt proche du village de Tarsivka, le pilote ayant pu s’éjecter sain et sauf. Il serait intéressant d’apprendre quelles étaient les unités impliquées dans cet affrontement, d’autant que la défense anti-aérienne russe réclame un autre Su-27 et un Su-25 dans le secteur de Radomychl, au nord-ouest de Jitomir. Un second Su-25 ukrainien est revendiqué par la DCA vers Nijyn (Nejine), au sud-est de Tchernihiv. Deux hélicoptères Mi-8 ukrainiens sont détruits dans la région de Kiev, dont un au sol.
Au moins neuf appareils russes sont dans le même temps abattus avec certitude par l’artillerie anti-aérienne ukrainienne. Le bombardier Su-34 RF-81879 « 24 rouge » du 2e GvBAP est descendu par un SAM vers 12h40 au-dessus de Tchernihiv ; l’équipage peut s’éjecter mais si le pilote (Major Krasnoyartsev) est capturé blessé, le navigateur (Major Krivolapov) est retrouvé mort. Un second Su-34 du 2e GvBAP, le RF-81864 « 26 rouge », tombe sous les tirs de la 58e brigade d’infanterie motorisée indépendante au sud-est de la même ville, les deux membres d’équipage (Major Ravil Gattarov et Major Dimitri Rounev) étant cette fois tués. Le Mi-24P RF-94966 « 24 bleu » du 30e OTSAP, en mission au nord de Kiev, est abattu par un missile sol-air portatif près de Kozarovychi, ne laissant aucun survivant. Chargés d’escorter un Mi-8 qui évacue des blessés, deux Mi-24 appartenant sans doute à la 17e BrAA sont pris à partie près de Kiev par des MANPADS d’origine polonaise PPZRPiorun. Le Mi-24P RF-95286 « 32 rouge » s’écrase à Kozarovichi avec son équipage, le capitaine Viatcheslav Baraev et le lieutenant Alexandre Khripounov.
Dans la région de Mykolayiv, au sud de l’Ukraine, les artilleurs de la Marine ukrainienne réclament quatre hélicoptères, dont trois abattus par le même soldat… Trois de ces revendications peuvent être confirmées, toutes étant des machines du 39e VP : les Mi-8AMTSh RF-91164 « 59 bleu » et RF-91165 « 58 bleu », ce dernier écrasé à Kalinovka en faisant trois morts, ainsi que le Mi-24VM RF-13017 « 22 bleu » tombé vers Bachtanka, au nord-est de Mykolayiv ; le pilote, le lieutenant-colonel Youri Oritchak et le navigateur, le lieutenant Eldar Timoutchev, étant tués. Les missiles antiaériens causent aussi la perte de deux Su-30SM du 43e régiment aéronaval d’attaque de l’aviation de la flotte de la Mer Noire (43e OMChAP) lors d’une mission de bombardement. Le premier est le RF-33787 « 45 bleu » qui s’écrase près de Chapaïvka, une quarantaine de kilomètres à l’ouest de Mykolayiv ; l’équipage composé du Major Alexeï Golovensky et du capitaine Alexeï Kozlov est capturé après s’être éjecté. Le second Soukhoï tombe dans les lignes russes mais son équipage, composé du lieutenant-colonel Alexeï Khasanov et du capitaine Vasily Gorgoulenko, ne survit pas au « crash ». Selon l’état-major ukrainien, 34 avions et 37 hélicoptères russes ont été détruits depuis le début du conflit.
Le Su-34 RF-81879 « 24 rouge » de la deuxième esca-drille du 2e GvBAP au roulage en 2018 sur la base sibé-rienne de Tcheliabinsk-Chagol, non loin des monts Oural.
L’épave du Su-34 « 24 rouge » abattu par un SAM à Tchernihiv (Tchernigov en russe) le 5 mars 2022. L’appareil portait l’insigne du 2e GvBAP, une des rares unités de la 14e armée aérienne venues renforcer le dispositif d’attaque russe.
L’épave du Su-34 – 2
Le Soukhoï Su-34 est le fer de lance des unités de bombardement tactique russes.
La dramatique séquence montrant l’explosion du Mi-24P « 32 rouge », sans doute de la 17e BrAA, frappé de plein fouet par un missile sol-air alors qu’il volait à basse altitude au nord de Kiev.
La dramatique séquence – 2
Le Mi-24P RF-94966 « 24 bleu » du 30e OTSAP photo-graphié en 2020 avec deux réservoirs supplémentaires de 540 litres installés sous les pylônes latéraux.
Deux vues des restes du Mi-24P RF-94966. – 1
Deux vues des restes du Mi-24P RF-94966. – 2
Le Mi-24P RF-95286 « 32 rouge » (sans doute un appa-reil de la 17e BrAA) est abattu par un MANPADS Piorun le 5 mars 2022 dans la région de Kiev.
Deux vues extraites d’un reportage consacré à une sortie d’hélicoptères Mi-8AMTSh dans le nord de l’Ukraine. Les bandes de reconnaissance sont là encore bien visibles. Le matricule et les codes des appareils sont masqués pour éviter l’identification de leur unité. – 1
Deux vues extraites d’un reportage consacré à une sortie d’hélicoptères Mi-8AMTSh dans le nord de l’Ukraine. Les bandes de reconnaissance sont là encore bien visibles. Le matricule et les codes des appareils sont masqués pour éviter l’identification de leur unité. – 2
Le Mi-8AMTSh « 58 bleu » (RF-91165) servait au sein du 39e régiment d’hélicoptères, basé en temps de paix à Djankoï en Crimée. Il a été abattu le 5 mars 2022 dans la région de Mykolayiv. – 1
Le Mi-8AMTSh « 58 bleu » (RF-91165) servait au sein du 39e régiment d’hélicoptères, basé en temps de paix à Djankoï en Crimée. Il a été abattu le 5 mars 2022 dans la région de Mykolayiv. – 2
Le Mi-24VM RF-13017 « 22 bleu » s’est écrasé au sol vers Bachtanka le 5 mars. – 1
Le Mi-24VM RF-13017 « 22 bleu » s’est écrasé au sol vers Bachtanka le 5 mars. – 2
Le chasseur-bombardier biplace Su-30SM RF-33787 « 45 bleu » du 43e OMChAP en vol avant la guerre. L’appareil porte le nom de baptême Irkoutsk derrière le poste du navigateur.
Le Su-30SM RF-33787 brûle à l’ouest de Mykolayiv le 5 mars 2022.
Le navigateur du Su-30SM « 45 bleu » a été capturé par les forces ukrainiennes. Il s’agit du Cne Alexeï Kozlov qui porte la combinaison orange « haute visibilité » des unités opérant régulièrement au-dessus de la mer.
La dramatique séquence – 3
Le 6 mars, les forces russes annoncent avoir abattu trois Su-27 près de Poltava, de même qu’un Su-25 dans la région de Radomychl (au nord-ouest de Jitomir) et deux hélicoptères Mi-24 dans le secteur de Makariv, également à l’ouest de Kiev. L’Antonov An-26KPA n/c 6909 « 57 bleu » de la 456e GBrTrA ukrainienne est détruit par une frappe de missile sur l’aéroport de Vinnytsia-Gavrichevka, au sud-ouest de Kiev. Dans le Sud, les autorités de la région de Mykolayiv signalent la perte de deux appareils de l’armée de l’Air ukrainienne à proximité du parc naturel d’Olechky Sands, à l’est de Kherson. Ces deux machines étaient des hélicoptères Mi-8 de la 18e OBrAA dont les équipages sont tués par des missiles sol-air près de Mykolayiv (Major Konstantin Zyabnitsky, capitaines Sergueï Bondarenko et Igor Pazitch ; Major Igor Tourevitch, capitaines Oleksandr Tchouiko et Vladislav Gorban). Les combats dans le secteur sont particulièrement violents car les Russes perdent eux-mêmes un Mi-8 du 55e OVP à Nova Kakhovka, un peu plus au nord-est ; frappé par un MANPADS, l’appareil tombe dans le Dniepr en entrainant dans la mort son équipage de trois hommes [11] et ses seize passagers, des personnels des 368e ChAP (trois hommes) et 37e GvSAP (treize hommes) qu’il transférait de Djankoï vers la base de Chornobaïvka récemment capturée. Cette hécatombe sonne le glas du 37e GvSAP dont on n’entendra plus parler dans les semaines suivantes…
[11] Maj Youri Belitchenko, Cne Konstantin Saïgakov et Lt Ildar Izmailov.
Retombant dans ses exagérations antérieures, l’état-major de l’armée ukrainienne revendique en conclusion de cette journée la destruction de pas moins de dix avions et onze hélicoptères ! Outre le Mi-8 du 55e OVP, les seules autres pertes russes dont on a la preuve sont le Su-34 FR-95070 « 06 rouge », abattu à 18h15 par un missile Bouk dans la banlieue est de Kharkiv, faisant un tué et un blessé parmi son équipage, ainsi qu’un Su-25 dont le pilote peut s’éjecter. Un Su-30SM russe aurait aussi été abattu près de Popasna, à l’ouest de Lougansk ; son équipage aurait été fait prisonnier.
Les combats aériens avec les forces ukrainiennes vont ensuite baisser nettement en intensité, celles-ci étant de moins en moins engagées vu les pertes sévères subies dans les premiers jours de l’invasion. Un nouvel intervenant, bien moins coûteux en hommes, supplée l’aviation ukrainienne de manière très efficace pour cibler les véhicules et les blindés : le drone armé d’origine turque Bayraktar TB2.
Deux chasseurs ukrainiens Soukhoï de la 39e BrTA photo-graphiés en 2021. À gauche le Su-27S1M « 48 bleu », à droite le Su-27P « 37 bleu ».
Le Su-34 RF-95070 « 06 rouge »
Ce qu’il en reste, après avoir été frappé par un missile le 6 mars à Kharkiv.
Un drone Bayraktar TB2 de la 10e brigade de la Marine ukrainienne (10e MABr) en vol.
Le Bayraktar peut emporter 60 kg de bombes planantes guidées, soit deux MAM-L de 22,5 kg et deux MAM-C de 7 kg. Les premières servent à engager les blindés et les petits navires, les secondes sont utilisées contre l’infanterie et les véhicules légers.
Le 7 mars, les Russes revendiquent avoir abattu un MiG-29 tandis que les Ukrainiens réclament deux avions à 20h30 et 21h10 près de Kiev. Une seule perte russe peut être identifiée : celle du lieutenant-colonel Oleg Tchervov, du 266e ChAP, tombé aux commandes du Su-25SM RF-90969 « 29 jaune » près du village de Myrotské, au nord-ouest de Kiev.
Le 8 mars, l’aviation russe lance des frappes en profondeur jusqu’en Ukraine occidentale. Des MANPADS détruisent trois hélicoptères ukrainiens au nord-est de Kiev. L’un est un Mi-24 de la 16e OBrAA qui s’écrase près du village de Koulajyntsi ; l’équipage, composé du lieutenant-colonel Oleksandr Maryniak et du Major Ivan Bezzoub, est tué. Les autres sont deux Mi-8MT de la 11e OBrAA qui tombent entre Nova Basan et Bervytsia. Au moins deux des membres d’équipage du « 133 » sont tués (lieutenant-colonel Oleg Hegetchkor et capitaine Igor Moroz), tout comme le capitaine Volodymyr Sklyar sur le « 135 » à bord duquel il officiait comme mécanicien embarqué. Les capitaines Ivan Pepelyachko (pilote) et Oleksiy Tchij (navigateur) ont la chance d’être éjectés du « 135 » avec des blessures aux jambes ; ils sont capturés par les Russes qui les libèreront lors d’un échange de prisonniers le 13 avril 2022. La dernière perte ukrainienne est celle du Major Andreï Lyoutachine, de la 40e BrTA, dont le MiG-29 est touché en détruisant à la roquette trois transports de troupes blindés BMP ; l’avion et son pilote s’écrasent dans une forêt proche de Berezivka, à l’ouest de Kiev. Les Russes déplorent pour leur part un seul tué : le Major Sergueï Volynets, du 368e ChAP, dont le Su-25 se « crashe » dans ses lignes, sans doute dans la province de Donetsk.
La Pologne propose durant cette journée de confier sa flotte de vingt-trois MiG-29 aux États-Unis pour que ceux-ci la transmette à l’Ukraine, mais cette proposition est rejetée dès le lendemain par le gouvernement américain pour une fois soucieux de ne pas augmenter les tensions dans la région.
Le Su-25SM RF-90969 « 29 jaune » du 266e ChAP a été abattu le 7 mars 2022 dans le secteur de Boutcha. – 1
Le Su-25SM RF-90969 « 29 jaune » du 266e ChAP a été abattu le 7 mars 2022 dans le secteur de Boutcha. – 2
Le Su-25SM RF-90969 « 29 jaune » du 266e ChAP a été abattu le 7 mars 2022 dans le secteur de Boutcha. – 3
Le plus puissant des hélicoptères d’assaut ukrainiens est le Mi-24P, comme ce « 27 rouge » qui porte sur la queue les deux bandes blanches d’identification rapides en vigueur depuis le conflit de 2014.
Les épaves des Mi-8MT « 133 » (au premier plan) et « 135 » de la 11e OBrAA ukrainienne rassemblées en bordure d’un champ à Bervytsia. Bien que peu visible ici, les deux appareils portent sur la queue la marque de reconnaissance ЗА БАБУ ВЕРУ signifiant « Pour grand-mère Vera », comme la plupart des hélicoptères ukrainiens depuis le début du mois de mars. – 1
Les épaves des Mi-8MT « 133 » (au premier plan) et « 135 » de la 11e OBrAA ukrainienne rassemblées en bordure d’un champ à Bervytsia. Bien que peu visible ici, les deux appareils portent sur la queue la marque de reconnaissance ЗА БАБУ ВЕРУ signifiant « Pour grand-mère Vera », comme la plupart des hélicoptères ukrainiens depuis le début du mois de mars. – 2
Le pilote du Mi-8MT « 135 », le Cne Ivan Pepelyachko, aura la chance d’être éjecté vivant de son appareil.
Touché au moteur gauche par un missile le 9 mars, le Su-24M « 26 blanc » de la 7e BrTA tente de revenir à son terrain mais il s’écrase vers 11h00 dans un étang du village d’Ivanki, dans la région de Tcherkassy. L’équipage réussit à s’éjecter. Les forces aériennes ukrainiennes perdent aussi à 19h40 le MiG-29MU1 « 10 blanc » de la 40e BrTA tombé à Novopil, au nord-ouest de Jitomir ; son pilote était le commandant d’un des deux escadrons de la 204e BrTA, le Major Yevgueny Lysenko probablement envoyé en renfort à la 40e brigade en raison de son expérience. Selon le gouvernement ukrainien qui rendra sa mort publique le 14 mars, ce pilote de MiG-29 a d’abord descendu un des deux adversaires engagés en combat aérien avant d’être abattu par l’artillerie antiaérienne. On peut cependant douter de cette déclaration puisqu’aucune épave d’avion russe n’a été retrouvée, alors que le secteur est toujours demeuré sous contrôle ukrainien….
Dans la soirée du 9 mars, le bilan officiel des forces russes fait état de la mise hors service de 90% des principaux aérodromes de l’aviation militaire ukrainienne, un chiffre qui parait nettement surévalué. Le major-général Igor Konachenkov, porte-parole du Ministère de la Défense russe, déclare : Au moment du lancement de l’opération spéciale, les forces armées ukrainiennes disposaient de 250 avions et hélicoptères de combat opérationnels. Les forces aérospatiales russes ont détruit 89 avions de combat et 57 hélicoptères, en vol comme au sol. À ce total doivent être ajoutés 93 drones de tous types, 953 chars et blindés légers, 101 lance-roquettes multiples, 351 canons et mortiers ainsi que 718 véhicules militaires.
Lors de la journée du 10 mars, l’aviation et les défenses anti-aériennes russes revendiquent un avion et trois hélicoptères Mi-24 ukrainiens sur lesquels on n’a aucun détail. Les forces de Moscou perdent en contrepartie deux appareils. Le premier est le Su-25SM RF-91969 « 10 rouge » du Major Nikolaï Prozorov, du 18e GvChAP, abattu vers 01h30 par un missile sol-air portatif de la 10e brigade d’assaut de montagne à Bekhy, au nord de Jitomir. Le second, qui pourrait être un Su-34, s’écrase vers 21h00 près de la ville biélorusse de Kojan-Gorodok, à 17 km de la base aérienne de Louninets. L’équipage blessé réussit à s’éjecter.
Dans la matinée du 11 mars, des missiles à longue portée russes frappent les bases aériennes de Loutsk et d’Ivano-Frankivsk où une dizaine de MiG-29 et de Su-24 pourraient avoir été détruits. Un Su-27 est également gravement endommagé par une frappe de missile sur la base aérienne de réserve de Kanatovo, au nord-est de Kirovograd [12]. Selon l’état-major ukrainien, il s’agirait en fait de raids menés par des formations de Su-24 et Su-34 escortés par des Su-35, au moins dix missiles de croisière ayant aussi été lancés par six bombardiers stratégiques Tu-95MS. Les forces aériennes ukrainiennes n’effectuent que dix sorties d’attaque au sol, menées par des Su-24 et des Su-25 ainsi que par des Mi-24. L’hélicoptère russe Mi-8MTV-5 RF-24764 « 60 blanc » s’écrase à l’atterrissage dans la matinée du 11 à Valouïki, au sud-est de Belgorod (Russie), à proximité de la frontière ukrainienne.
[12] La date de cette perte n’est pas certaine.
Le 12 mars, les frappes russes de missiles se poursuivent. Elles touchent notamment en matinée la base aérienne de Vasylkiv, une quarantaine de kilomètres au sud de Kiev, où stationnent les MiG-29 de la 40e BrTA. On ignore l’étendue des dégâts. Alors qu’il attaquait une colonne de troupes, un Su-24M de la 7e BrTA ukrainienne est touché à basse altitude par un missile dans l’après-midi du 12 mars. L’appareil s’écrase près de Nova Kakhovka, au nord-est de Kherson, sans que son équipage ait le temps de s’éjecter. Le pilote, le lieutenant-colonel Valery Ochkalo et son navigateur, le Major Roman Chekhoun, sont tués dans l’explosion.
Un avion russe touché par un missile sol-air portatif au-dessus d’Izioum, au sud-est de Kharkov, tombe en Russie dans la région de Belgorod ; l’équipage de deux hommes se parachute. Un autre appareil serait tombé à Roubijne, dans le secteur de Lougansk. Un Mi-24VM (ou bien un Mi-35M) est perdu près de Novomykolaivka, au nord-est de Jitomir. Le Ka-52 RF-13409 « 74 rouge » du 55e OVP s’écrase à Skadovsk, au sud de Kherson ; son pilote le capitaine Andreï Lyoulkine est grièvement blessé, son navigateur le lieutenant Alexandre Potapenkov est tué. L’état-major ukrainien estime avoir détruit 59 avions russes, 83 hélicoptères, 371 blindés, 1305 véhicules, 66 lance-roquettes multiples et 7 drones.
Le lieutenant-colonel Denis Litvinov, un pilote de Soukhoï qui pourrait appartenir au 266e ChAP, réussit par miracle à rentrer d’une sortie d’attaque au sol après que son Su-25SM RF-90965 « 32 jaune » a été touché par un MANPADS, comme le révèle un commentaire du Ministère de la Défense russe : Alors qu’il effectuait une mission de combat (…), un avion d’assaut Su-25, second d’une paire, a été touché par un missile sol-air portatif tiré depuis le sol par un soldat de l’armée ukrainienne. Son pilote a décidé d’éteindre le moteur endommagé et de demeurer à bord. Réalisant qu’il ne survivrait pas à une autre attaque, le pilote de l’avion de tête, le lieutenant-colonel Denis Litvinov (…) a décidé de couvrir son ailier avec son propre appareil. Il a détecté visuellement le lancement d’un deuxième missile et, en tirant des leurres infrarouges, a réussi à le détruire. Pendant l’approche à l’atterrissage, le pilote du Su-25 endommagé a signalé une panne des systèmes d’avionique et de contrôle, mais il a réussi à atterrir sans incident grâce à l’assistance fournie par (son leader).
Le MiG-29MU1 « 10 blanc » de la 40e BrTA a explosé dans une forêt au nord-ouest de Jitomir le 9 mars 2022. – 1
Le MiG-29MU1 « 10 blanc » de la 40e BrTA a explosé dans une forêt au nord-ouest de Jitomir le 9 mars 2022. – 2
Le MiG-29MU1 « 10 blanc » de la 40e BrTA a explosé dans une forêt au nord-ouest de Jitomir le 9 mars 2022. – 3
Le Su-25SM russe RF-91969 « 10 rouge »…
-… et ses restes, après avoir été frappé par un MANPADS dans la nuit du 9 au 10 mars 2022 dans la région de Jitomir.
Un Su-24M russe emportant des missiles antiradar Kh-31PM pendant la guerre en Ukraine. Les codes de l’appareil ont été masqués sur la vidéo dont est tirée cette photographie, afin d’éviter d’identifier son unité.
Le Lt-Col Valery Ochkalo, ici devant un Su-24MR de la 7e BrTA, est tué le 12 mars 2022.
Son navigateur, le Maj Roman Chekhoun, disparait également le 12 mars 2022.
Ce cliché de la dérive du Su-34 RF-95010 « 35 rouge » a été mis en ligne le 13 mars 2022, mais on ignore encore à quelle date exacte et dans quel secteur l’appareil a été abattu.
Le Su-34 « 35 rouge » photographié avant la guerre, alors qu’il servait au sein du 559e BAP.
Comme toutes les productions Kamov, l’hélicoptère d’attaque Ka-52 est propulsé par deux rotors coaxiaux contrarotatifs, ce qui élimine le besoin d’un rotor de queue. Ici le RF-90392 « 80 rouge » du 55e OVP normalement basé à Korenovsk, près de Krasnodar.
L’épave du Ka-52 RF-13409 « 74 rouge » du 55e OVP achève de se consumer le 12 mars 2022.
Contemporain du Fairchild A-10 Thunderbolt II, le Soukhoï Su-25 fait comme lui preuve d’une robustesse incroyable comme le prouvent ces clichés extraits d’un reportage officiel russe… Sévèrement endommagé le 12 mars par un missile sol-air dans le nord de l’Ukraine, un réacteur hors d’état, le Su-25SM RF-90965 « 32 jaune » est quand même parvenu à rentrer en Biélorussie… Ses marques sont ici censurées. – 1
Contemporain du Fairchild A-10 Thunderbolt II, le Soukhoï Su-25 fait comme lui preuve d’une robustesse incroyable comme le prouvent ces clichés extraits d’un reportage officiel russe… Sévèrement endommagé le 12 mars par un missile sol-air dans le nord de l’Ukraine, un réacteur hors d’état, le Su-25SM RF-90965 « 32 jaune » est quand même parvenu à rentrer en Biélorussie… Ses marques sont ici censurées. – 2
Le Lt-Col Denis Litvinov devant son appareil
Le 13 mars dans l’après-midi, l’aviation russe revendique un Su-24 près de Novyi Bykiv (Novy Bokov), à l’est de Kiev. Plus tard dans la journée, un MiG-29 de la 114e BrTA piloté par le Major Stepan Tarabalko est abattu en combat aérien ; la mort de cet officier sera confirmée par les autorités ukrainiennes le 20 mars. Le Ministère de la Défense d’Ukraine affirme de son côté que sa force aérienne a abattu quatre avions et trois hélicoptères. Une seule de ces sept revendications peut être confirmée, celle d’un Su-30SM du 14e GvIAP descendu par un missile sol-air à proximité du village de Mala Komytchouvakha, dans la région d’Izioum, au cours d’une mission d’attaque au sol. Cet appareil est très probablement le RF-81771 « 60 rouge » dont l’équipage peut s’éjecter sain et sauf. Après une traque de plusieurs jours, les lieutenants-colonels Sergueï Kosik (pilote, commandant-adjoint du régiment) et Max Krichtop (navigateur) finiront par être capturés. Ils feront par la suite partie d’un échange de prisonniers.
Dans les premières heures du 14 mars, une trentaine de missiles de croisière pulvérisent une partie du centre de regroupement des combattants volontaires étrangers à Yavoriv, à une vingtaine de kilomètres de la frontière polonaise. Ils auraient été tirés par des bombardiers stratégiques depuis l’espace aérien russe selon un responsable du Pentagone. La base de Yavoriv, également centre de formation et d’entraînement de l’OTAN, servirait de plateforme de livraison pour l’aide militaire venue d’Europe ; il faut donc considérer ce bombardement comme une sérieuse mise en garde adressée par la Russie aux Occidentaux. En réponse à l’envoi par les forces ukrainiennes d’un missile tactique Tochka-U sur le centre-ville de Donetsk où il a fait 21 morts civils et 35 blessés [13], l’armée russe indique par ailleurs qu’elle va désormais cibler les entreprises de défense ukrainiennes réparant des armes, incitant les civils qui y travaillent à quitter leurs postes pour éviter d’être touchés… Au cours d’une mission sur Volnovakha, au sud-ouest de Donetsk, un Su-25 de la 299e BrTA ukrainienne est abattu par un système de missiles de défense aérienne Pantsir-S. Son pilote le Major Roman Vasilyouk réussit à s’éjecter près du village de Yegorovka, mais il est blessé à la jambe en tentant de s’échapper et il est capturé par la milice populaire de la RPD. Il sera libéré le 24 avril lors d’un échange de prisonniers.
[13] Ce tir non autorisé amènera dès le 15 mars le président Volodymyr Zelensky à limoger le commandant des forces conjointes ukrainiennes dans le Donbass, le général Oleksandr Pavlyouk, « recasé » à la tête de l’administration militaire de la région de Kiev.
Le Ministre de la Défense ukrainien Oleksii Reznikov déclare que l’aviation et les unités de défense aériennes du pays ont déjà abattu 167 avions et hélicoptères russes, le bilan de la journée étant de quatre hélicoptères et deux avions, dont un chasseur abattu par un missile anti-aérien (aucune preuve fournie). Le lendemain, le Ministre des Affaires étrangères va révéler des chiffres différents : 81 avions et 95 hélicoptères, soit 176 appareils.
Le Maj Stepan Tarabalko, un pilote de MiG-29 de la 114e BrTA ukrainienne, a été abattu en combat aérien le 13 mars 2022.
Le Soukhoï Su-30SM « 60 rouge » du 14e GvIAP russe photographié sur le terrain de Koursk-Khalino avant le conflit.
Le Su-30SM « 60 rouge » descendu par un missile sol-air vers Izioum le 13 mars 2022.
L’épave du Su-30SM « 60 rouge » du 14e GvIAP, tombée près du village de Mala Komytchouvakha. – 1
L’épave du Su-30SM « 60 rouge » du 14e GvIAP, tombée près du village de Mala Komytchouvakha. – 2
Image satellite de la base biélorusse de Velikii Bokov, sur laquelle on peut compter le 14 mars 2022 pas moins de 46 hélicoptères (13 Ka-52, 8 Mi-24 et 25 Mi-8). L’armée russe exploite environ 80 Ka-52, Mi-8, Mi-24 et Mi-28 à partir de trois sites d’opérations avancés dans le sud-est de la Biélorussie, afin d’être à portée de Kiev. Environ 90 Mi-8 et une quinzaine de transports lourds Mi-26 sont positionnés en réserve sur la base aérienne de Machoulitchchy, à l’extérieur de Minsk.
Le Major Roman Vasilyouk (à droite) photographié le 5 mai 2022 à son retour de captivité. Descendu le 14 mars par la milice populaire de la RPD, ce pilote du Su-25 a fait l’objet d’un échange de prisonniers le 24 avril suivant
Le 15 mars, les Russes revendiquent un Mi-8 et deux avions. Le Mi-8 est un appareil de la 11e OBrAA qui est effectivement descendu près de Maryinka en RPD, tuant tout son équipage composé du capitaine Oleksandr Borys ainsi que des lieutenants Oleksandr Lazovsky et Leonid Tymotchenko). Les deux avions auraient été victimes d’une batterie de missiles antiaériens Bouk-M3 assurant la protection d’une colonne logistique en provenance de Biélorussie ; les hommes du lieutenant Sergueï Ovcharenko réclament un Su-25 à 14h10 à l’est de Tchernihiv et un Su-24 à 14h20 à l’ouest du même secteur, sans qu’on puisse confirmer ces revendications de manière indépendante.
Par contre, le MiG-29MU-1 « 15 blanc » de la 40e BrTA doit effectuer un atterrissage forcé sur le ventre près de Novyi Bykiv, 80 km à l’est de Kiev, après avoir été touché par un intercepteur russe MiG-31BM qui a tiré sur lui un missile hypersonique R-37M BVR à 125 km de distance ! Si son appareil est endommagé au-delà du réparable, le pilote ukrainien s’en sort sain et sauf. Un bombardement de la base aérienne ukrainienne de Kramatorsk, au nord de Donetsk, y aurait également détruit quatre Su-25, un Mi-24 et cinq hélicoptères Mi-8 dans trois des hangars, une affirmation impossible à vérifier.
Un groupe composé de Su-24, Su-25 et Mi-24 ukrainiens, sous le couvert de chasseurs, aurait effectué d’après le MDU neuf sorties sur des colonnes d’équipements et des rassemblements russes. L’affirmation semble douteuse au vu de la différence de performances des types d’appareils engagés. Une colonne d’une douzaine de véhicules russes aurait été détruite par l’aviation d’assaut, en liaison avec l’artillerie, dans le secteur de Marioupol où les combats font rage depuis le début du mois.
Le jour-même où les forces russes prennent le contrôle total de l’ensemble du territoire de la région de Kherson, la base aérienne de Kherson est bombardée par l’artillerie ukrainienne qui y revendique la destruction d’une quinzaine d’hélicoptères. Les photos satellites apparues par la suite montrent quatre hélicoptères Mi-8AMTSh, Mi-24VM et Mi-28N détruits et trois autres endommagés par le feu, ce qui poussera les Russes à déplacer le régiment d’hélicoptères (39e VP ?) basé sur place. La DCA ukrainienne revendique pour sa part avoir abattu trois avions, dont deux Su-34, et un hélicoptère. L’un des avions est le Su-30SM RF-81773 « 62 rouge » du 14e GvIAP qui s’écrase près du village de Bryhadyrivka, dans la région de Kharkiv, victime d’un canon antiaérien ZU-23 de la 80e brigade d’assaut aérienne indépendante. Le lieutenant-colonel Alexandre Pazynitch (commandant-adjoint du régiment) et le capitaine Evgueni Kislyakov décèdent dans le « crash ». Le MDU réclame au total 192 appareils répartis en 84 avions et 108 hélicoptères depuis le début du conflit. Au même moment, l’analyste Justin Bronk, du think tank britannique RUSI, estime pour sa part les pertes russes confirmées entre 15 et 20 jets de combat et à environ 30 hélicoptères, peut-être légèrement plus.
Le Cne Oleksandr Borys devant deux Mi-8 de la 11e OBrAA.
Les restes du Mi-8 piloté par le Cne Borys, détruit près de Maryinka en République Populaire de Donetsk. – 1
Les restes du Mi-8 piloté par le Cne Borys, détruit près de Maryinka en République Populaire de Donetsk. – 2
Les restes du Mi-8 piloté par le Cne Borys, détruit près de Maryinka en République Populaire de Donetsk. – 3
Bien que de conception ancienne (les premières versions sont entrées en service en 1981), le MiG-31BM demeure très performant puisqu’il peut atteindre 3400 km/h. Cet intercepteur a ouvert son palmarès le 15 mars 2022 aux dépens d’un MiG-29 ukrainien.
L’épave du MiG-29MU-1 « 15 blanc » de la 40e BrTA, écrasé dans un champ après avoir été touché par le tir d’un MiG-31BM russe le 15 mars 2022. – 1
L’épave du MiG-29MU-1 « 15 blanc » de la 40e BrTA, écrasé dans un champ après avoir été touché par le tir d’un MiG-31BM russe le 15 mars 2022. – 2
Image impressionnante d’un Mi-24PU1 de la 11e OBrAA ukrainienne en vol en 2017.
La base aérienne de Kherson, récemment capturée, est bombardée par les Ukrainiens le 15 mars 2022. Plusieurs hélicoptères russes y sont détruits, dont des Mi-28.
L’hélicoptère d’attaque russe Mi-28N (ici le RF-95315 « 05 blanc » de la 15e BrAA) est le pendant du Ka-52.
Un Su-30SM du 14e GvIAP au décollage
Les restes du Su-30SM RF-81773 « 62 rouge » abattu dans la région de Kharkiv le 15 mars 2022. – 1
Les restes du Su-30SM RF-81773 « 62 rouge » abattu dans la région de Kharkiv le 15 mars 2022. – 2
En revendiquant dans la journée du 16 mars un Mi-24 ukrainien dans la région de Samara, les forces armées russes estiment avoir détruit depuis le début de leur « opération militaire spéciale » un total de 181 avions et hélicoptères, 172 drones, 1379 blindés, 133 lance-roquettes multiples, 514 canons et mortiers, et 1168 véhicules militaires des forces armées ukrainiennes. Dans la nuit du 16 au 17, des Su-25 russes détruisent des entrepôts d’armes et de munitions ukrainiens.
Le MDU signale que ses forces armées ont détruit dans le même temps deux Su-34 dont un par la DCA près de Tchernihiv, trois Su-30SM dont deux dans la région d’Odessa et trois hélicoptères par la DCA près de Mykolayiv. On peut confirmer deux de ces pertes : le Ka-52 RF-13411 « 76 rouge » du 55e OVP, abattu par un MANPADS Piorun à Voznessensk, dans la région de Mykolayiv ; et un Su-25 du 18e GvChAP qui s’écrase à 23h30 au retour d’une mission de nuit sur l’Ukraine. Son pilote le capitaine Vladimir Bardine peut s’éjecter mais on retrouvera son corps sans vie deux jours plus tard à Kasli, dans l’oblast russe de Tchelyabinsk.
Le 17 mars, les bombardiers et avions d’assaut ukrainiens attaquent de nouveau les colonnes motorisées russes. La DCA ukrainienne revendique avoir abattu au cours de la journée sept avions et un hélicoptère russes, ce dernier étant un Ka-52 qui serait tombé à 11h45 près de Boutcha, au nord-ouest de Kiev. Le MDU indique que le 960e régiment d’assaut russe, sur Su-25, a subi des pertes importantes lors de ses opérations sur le front Sud.
Le 18 mars, l’usine de réparation aéronautique de Lviv est frappée par plusieurs missiles de croisière Kalibr. Le hangar principal, qui abritait trois MiG-29 ukrainiens en révision ainsi que trois MiG-29 de l’armée de l’air azerbaïdjanaise, est totalement détruit. D’autres appareils stockés à proximité paraissent endommagés. Parmi les avions ukrainiens réduits à l’état de ferraille, le MiG-29 « 12 blanc » était l’unique exemplaire de la variante modernisée MiG-29MU2 capable d’utiliser des missiles guidés Kh-29 pour l’attaque au sol. Un missile hypersonique de haute précision Kinjal est pour la première fois utilisé pour détruire un dépôt d’armes souterrain de missiles et de munitions de l’aviation ukrainienne à Deliatyn, au sud d’Ivano-Frankivsk. Le Ministère de la Défense d’Ukraine affirme, encore une fois sans fournir de preuves, que ses forces ont descendu deux Su-34 et trois hélicoptères russes.
Avant : le Kamov Ka-52 RF-13411 « 76 rouge », abattu par la DCA ukrainienne le 16 mars 2022 dans la région de Mykolayiv.
Après : le Kamov Ka-52 RF-13411 « 76 rouge », abattu par la DCA ukrainienne le 16 mars 2022 dans la région de Mykolayiv. -1
Après : le Kamov Ka-52 RF-13411 « 76 rouge », abattu par la DCA ukrainienne le 16 mars 2022 dans la région de Mykolayiv. -2
La queue du Ka-52 RF-13411 « 76 rouge » abattu le 16 mars 2022. L’appareil peut être identifié grâce au numé-ro de série visible au bas du gouvernail : 35382614005.
Un Su-25 russe au décollage pour une mission nocturne dans la soirée du 16 mars 2022.
Le Cne Vladimir Bardine, du 18e GvChAP, tué le 16 mars 2022.
Photographié en mars 2022 dans le hangar principal de l’usine de réparation aéronautique de Lviv, le « 12 blanc » est l’un des six MiG-29 qui y sont détruits le 18 du mois. C’était l’unique MiG-29MU2 capable d’utiliser des missiles guidés Kh-29 pour l’attaque au sol.
Vu à Lviv à côté du MiG-29MU2 « 12 blanc », ce MiG-29 azerbaïdjanais en cours de maintenance sera également détruit le 18 mars 2022.
Le 19 mars, l’aviation tactique russe poursuit ses raids de jour et de nuit, en particulier sur les centres de contrôle, les stations radar et les systèmes antiaériens. Un missile Kinjal fait exploser un dépôt de carburant militaire dans la région de Mykolayiv. Il aurait été lancé depuis un MiG-31K [14] opérant au-dessus de la Crimée, mais il est aussi question de navires de surface… Les forces ukrainiennes revendiquent la destruction de trois hélicoptères russes.
[14] Sur le MiG-31 et le missile Kinjal, voir la rubrique « Actualités » d’AVIONS 241, juillet-août 2021.
Lors de la journée du 20 mars, des Su-24M et Su-25 ukrainiens effectuent des attaques au sol, missions qui seront poursuivies les 21, 22 et 24. Le communiqué du MDU déclare qu’un Su-34 et un hélicoptère ont été abattus par la défense antiaérienne dans le Donbass, mais l’hélicoptère ne figure plus dans un communiqué ultérieur. Un Ka-52 de la 18e BrAA portant l’immatriculation RF-90656 et le code « 05 bleu » est pourtant bien détruit par la DCA ukrainienne mais en plein centre d’Hostomel, au sud-est de l’aéroport. L’équipage, composé des Major Roman Kobets et Ivan Boldyrev, réussit à s’éjecter au-dessus des lignes russes.
Le 21 mars, des appareils de transport du district militaire Est de la Fédération de Russie livrent une centaine de tonnes d’aide humanitaire aux habitants des Républiques populaires de Donetsk et de Lougansk. Un Su-24M de la 7e BrTA est abattu près de Zelena Dolyna, dans l’oblast de Dnipropetrovsk, alors qu’il bombardait des blindés russes. Le capitaine Oleksandr Korneïtchouk (navigateur) s’éjecte, suivi de son pilote le Major Vyacheslav Khodakivsky qui se tue en sautant à trop basse altitude. Quelque temps auparavant, cet équipage avait déjà été touché par un missile, mais il avait réussi à atterrir en urgence sur un aérodrome de dispersion d’où son appareil avait pu être rapatrié à Starokostiantyniv. Dans la nuit du 21 au 22, des hélicoptères Ka-52 et Mi-28N détruisent neuf chars et sept blindés transports de troupes ukrainiens selon le Ministère de la Défense russe.
Étant donné que la grande ville portuaire et industrielle de Marioupol, qui revêt une importance stratégique en mer d’Azov, est encerclée depuis le 3 mars par les troupes russes, l’état-major ukrainien décide de mettre en place dans le plus grand secret un pont aérien par hélicoptère pour ravitailler la garnison assiégée. Vu les risques encourus, tous les pilotes sont volontaires et chacun d’eux ne doit participer qu’à une seule mission, celle-ci engageant deux Mi-8. Deux autres hélicoptères sont prévus en soutien, au cas où il serait nécessaire d’effectuer une mission de sauvetage. L’itinéraire prévu consiste à décoller de la base de Dnipro, à effectuer un ravitaillement à Zaporojié puis à franchir les lignes russes jusqu’à l’usine Azovstal, le retour s’effectuant par le même chemin à l’aide d’un second ravitaillement. Il faut parcourir au total près de 600 km, dont 200 dans les lignes ennemies.
Deux Mi-8 décollent discrètement du terrain de Dnipro le 21 à 03h30. Pour ce vol de nuit, les équipages sont équipés de lunettes de vision nocturne. Le pilote du premier appareil est le capitaine Roman Drogomyretsky de la 11e OBrAA ; celui du second est le Major Oleksiy Grebentchchikov qui a comme navigateur le capitaine Igor Kharchenko. Les hélicoptères ont été débarrassés de leur armement offensif afin de pouvoir emporter deux tonnes de charge utile chacun : des missiles sol-air Stinger, des missiles antichars NLAW, des munitions, des systèmes de communication internet par satellite Starlink et des fournitures médicales. À bord de chaque appareil a pris place un officier du renseignement militaire ukrainien (GUR) chargé de riposter aux tirs venus du sol en maniant la mitrailleuse embarquée ; il doit aussi guider l’équipage jusqu’aux lignes ukrainiennes au cas où l’hélicoptère devrait faire un atterrissage forcé. Après une rapide escale de ravitaillement à Zaporojié, les Mi-8 prennent la direction du sud-est, passent à mi-chemin au-dessus de la ville de Polohy puis atteignent la mer d’Azov ; ils tournent ensuite sur leur gauche et longent la côte directement jusqu’à Marioupol. Pour augmenter leurs chances, les appareils volent à 250 km/h au ras du sol, parfois à moins de cinq mètres d’altitude. L’un d’eux heurte même la cime d’un arbre avec une de ses roues ! 38 minutes jusqu’à la ligne de front, 42 minutes jusqu’à Azovstal. Je m’en souviendrai toute ma vie, déclarera Grebentchchikov.
Les hélicoptères se posent au sein même de l’immense aciérie Azovstal, dans les sous-sols de laquelle s’est retranché le régiment « Azov », une unité d’élite ouvertement néo-nazie de la Garde nationale ukrainienne qui est chargée de défendre la ville avec la 36e brigade d’infanterie de marine. Les pilotes laissent tourner les moteurs afin de pouvoir redécoller en urgence. Émergeant des tunnels environnants, les soldats d’ « Azov » se précipitent pour récupérer les fournitures puis charger, plus difficilement, les seize blessés graves qu’ils ont amenés avec eux. Au bout d’une vingtaine de minutes, les appareils redécollent avec l’aube, en profitant du fait que la fumée qui s’élève de la ville déjà en grande partie détruite se dirige vers la mer. Les troupes ukrainiennes déclenchent alors un feu d’enfer sur les positions russes pour couvrir le bruit des Mi-8 qui réussissent à se reposer sans encombre à Dnipro vers 07h30.
Les forces ukrainiennes revendiquent avoir abattu au cours de la journée un avion et deux hélicoptères. L’avion, endommagé par la DCA près de Tchouhouïv (au sud-est de Kharkiv), serait tombé en flammes sur le territoire russe. Le 21 toujours, le gouvernement ukrainien prend la décision d’interdire aux conducteurs d’utiliser des enregistreurs vidéo de voiture, lui qui incitait jusque-là sa population à témoigner massivement des pertes subies par les envahisseurs… La veille, Volodymyr Zelensky a interdit onze partis politiques d’opposition, les accusant de diviser (la société) et de collaborer (avec l’ennemi). En clair : d’avoir pour la plupart une position modérée dans ce conflit. Parmi eux, le parti de centre-gauche Plateforme d’Opposition-Pour la vie, deuxième force politique du pays. Cette dérive autocratique du « héros de la démocratie » occidentale n’a absolument pas été relevée par les principaux médias français, qui ne se sont pourtant pas privés de souligner la dérive autoritaire de Vladimir Poutine ! Elle témoigne de l’influence grandissante du bloc radical d’extrême-droite au sein du gouvernement ukrainien.
Filmé lors d’un reportage d’actualité, le Ka-52 RF-90656 « 05 bleu » est un appareil de la 18e BrAA.
Deux fragments du même Ka-52 RF-90656, abattu le 20 mars 2022. – 1
Deux fragments du même Ka-52 RF-90656, abattu le 20 mars 2022. – 2
Le Maj Vyacheslav Khodakivsky de la 7e BrTA, ici devant le Su-24MR « 60 jaune », est tué le 21 mars 2022 en bombardant des blindés russes.
Un blindé de transport de troupes BTR-80 russe détruit au début de la guerre en Ukraine.
Un hélicoptère Ka-52 au départ d’une mission de nuit en Ukraine en mars 2022.
Un Mi-8 ukrainien décoré d’yeux de reptiles sur les prises d’air des moteurs. L’appareil n’emporte aucun armement offensif.
Le Maj Oleksiy Grebentchchikov a participé au premier vol réussi du pont aérien vers Marioupol, le 21 mars 2022.
La série de clichés qui suit est extraite d’une vidéo tournée lors d’un des ravitaillements ukrainiens de Marioupol assiégée. On y voit l’un des hélicoptères voler à très basse altitude au-dessus de la mer d’Azov…
-… Puis arriver à Marioupol en passant devant le port. On aperçoit au fond le vraquier libérien MV Smarta, endommagé le 20 mars.
Vue générale du complexe sidérurgique d’Azovstal, où se réfugie le régiment « Azov » à partir du 18 mars 2022. En bas, le bassin de déchargement et sur la gauche, le petit fleuve Kalmious.
Les soldats d’ « Azov » déchargent fébrilement les fournitures apportées par les Mi-8.
Redécollage à l’aube sur Marioupol dévastée par les combats.
Le 22 mars, des Su-25 russes attaquent les forces ukrainiennes à Irpin, juste à l’ouest de Kiev. Dans la nuit du 22 au 23, des hélicoptères Ka-52 et Mi-28N auraient détruit huit chars, cinq blindés, neuf camions, trois blockhaus et sept canons. Les revendications du MDU se montent à six avions et un hélicoptère descendus par la DCA, dont un Su-25 qui semble n’avoir été qu’endommagé à 16h45 au-dessus de Marioupol. L’hélicoptère serait, selon le témoignage d’un membre de la Garde nationale ukrainienne, un Mi-8 qui se serait écrasé dans ses lignes après avoir été touché par un missile sol-air. On ne peut pour l’instant confirmer aucune de ces pertes russes, contrairement à celle d’un Soukhoï Su-24M de la 7e BrTA. Le bombardier codé « 49 blanc » est abattu par des missiles sol-air à Souligovka, près d’Izioum ; son pilote le Major Alexeï Kovalenko [15] est tué mais son navigateur réussit à s’éjecter et à regagner les lignes ukrainiennes.
[15] Homonyme de l’ancien commandant de la brigade, le colonel Mykola Kovalenko tué le 2 mars 2022.
Le 23 mars, des bombardiers russes Su-34 utilisent des armes guidées pour frapper des blindés, des parcs de véhicules et des dépôts d’armes ukrainiens. L’état-major ukrainien revendique la destruction de sept avions et un hélicoptère, à nouveau sans en fournir la moindre preuve… Par contre, un MiG-29 de la 204e BrTA est abattu en combat aérien au-dessus de Tryhirya (Trigorye), au sud-ouest de Jitomir. Son pilote le Major Dmitry Tchoumatchenko est tué. Cet appareil pourrait être le « 47 blanc » (n/c 2960729003), ou bien le « 48 blanc » (n/c 2960728120) qui auraient tous deux été détruits au cours du mois de mars 2022.
La Russie affirme avoir détruit le 24 mars la plus grande réserve de carburant encore restante de l’armée ukrainienne, à Kalinovka près de Kiev, avec des missiles de croisière Kalibr. De plus, les forces russes auraient détruit depuis la veille plusieurs équipements militaires ukrainiens, dont trois systèmes de défense anti-aérienne et quatre drones. Selon le MDU, la DCA ukrainienne aurait abattu deux avions et la force aérienne un troisième.
Le 25 mars, six missiles de croisière russes frappent le centre de commandement de l’armée de l’Air ukrainienne à Vinnytsia, causant d’importants dégâts aux infrastructures. L’état-major russe signale que certaines de ses colonnes et concentrations de troupes ou de matériels ont été attaquées à la roquette et à la bombe par des avions ukrainiens. Selon le communiqué officiel de Moscou, son artillerie antiaérienne a abattu deux Su-25 et un Su-24 au-dessus de la ville de Vychneve (Vitchnyovoe), juste au sud-ouest de Kiev.
De son côté, l’état-major ukrainien indique que sa DCA a descendu trois avions et sa force aérienne trois avions plus un hélicoptère. Ce dernier, le Mi-8MTV-5-1 RF-91882 « 02 rouge », s’était posé en campagne près de Malaya Rohan, à quelques kilomètres au sud-est de Kharkiv, après avoir été endommagé en combat. L’appareil est finalement détruit au sol par un MANPADS, sa destruction étant enregistrée par un drone Leleka-100. Les autres revendications ne sont pas documentées.
Dans la soirée du 25 mars, le chef d’état-major adjoint de l’armée russe, le général Sergueï Roudskoï, déclare que les principaux objectifs de la première étape de « l’opération spéciale » sont atteints. Les capacités de combat des forces ukrainiennes ont été réduites de manière importante, ce qui permet (…) de concentrer le gros des efforts sur l’objectif principal : la libération du Donbass. Les forces russes ont bloqué certaines grandes villes ukrainiennes comme Kiev, Kharkiv, Tchernihiv, Soumy et Mykolayiv. 54% de la république populaire de Donetsk et 93% de celle de Lougansk ont été « libérés ». La région de Kherson est sous le contrôle total des Russes, comme la majeure partie de celle de Zaporojié. Au cours du premier mois de l’opération, 1351 soldats russes sont morts et 3825 ont été blessés (soit 5176 hommes) selon le décompte officiel qui estime que les pertes militaires ukrainiennes se montent à près de 30 000 hommes dont 14 000 tués, ce qui paraît nettement surévalué… Mais il est impossible d’en dire plus puisque l’Ukraine ne communique plus sur ses pertes depuis le 12 mars, date à laquelle elle admettait déjà 1300 tués. Dans le même temps, L’Otan estime les pertes totales russes entre 7000 et 15 000 hommes.
Le général Roudskoï affirme que les forces aériennes ukrainiennes et les systèmes de défense aérienne sont presque complètement détruits, tandis que la marine ukrainienne n’existe plus. Selon lui, les trois quarts des avions de combat et la moitié des hélicoptères ukrainiens sont détruits ; un seul des 36 drones Bayraktar TB2 demeure en service ; 82 % des systèmes mobiles de missiles antiaériens S-300 et Bouk-M1 ont été annihilés. L’Ukraine a également perdu une partie importante de ses véhicules de combat (entre 30 et 65%). Les forces russes ont mené des frappes sur seize des principales pistes d’atterrissage militaires ukrainiennes et détruit trente-neuf dépôts de stockage et armureries. Des armes de haute précision ont frappé trente usines clés du complexe militaro-industriel.
Le Maj Alexeï Kovalenko (à gauche), de la 7e BrTA, tué le 22 mars 2022.
Deux clichés du Su-24 de la 7e BrTA abattu le 22 mars 2022 près d’Izioum. – 1
Deux clichés du Su-24 de la 7e BrTA abattu le 22 mars 2022 près d’Izioum. – 2
Le MiG-29 « 06 bleu » de la 204e BrTA photographié à Mykolayiv en février 2018.
Le Su-24MR « 49 blanc » de l’aviation russe. Bien que de conception ancienne, les Soukhoï Su-24 à ailes à géomé-trie variable demeurent très utiles grâce à leur avionique performante.
Le drone de reconnaissance Leleka-100 est construit par le principal fabricant de drones ukrainien, la frime DeViro. L’appareil coûte environ 60 000 euros avec son système de pilotage.
Le 25 mars 2022, un drone ukrainien Leleka-100 filme la destruction d’un Mi-8 russe au sud-est de Kharkiv. – 1
Le 25 mars 2022, un drone ukrainien Leleka-100 filme la destruction d’un Mi-8 russe au sud-est de Kharkiv. – 2
L’épave du Mi-8MTV-5-1 russe RF-91882, détruit vers Kharkiv le 25 mars 2022, porte sur la queue un Z blanc.
Deux autres vues des restes du Mi-8MTV-5-1 « 02 rouge » détruit au sol entre Biskvitne et Malaya Rohan le 25 mars 2022. Le « Z » blanc sur la queue est bien visible. – 1
Deux autres vues des restes du Mi-8MTV-5-1 « 02 rouge » détruit au sol entre Biskvitne et Malaya Rohan le 25 mars 2022. Le « Z » blanc sur la queue est bien visible. – 2
Le 26 mars, le gouvernement de Kiev réclame la destruction d’un avion russe impossible à confirmer.
Le 27 mars est marqué par de nouvelles revendications non vérifiables des forces ukrainiennes : quatre avions plus un hélicoptère. Le 28 à 09h30, le bilan est, selon l’état-major général des Forces armées ukrainiennes, de 123 avions et 127 hélicoptères russes détruits depuis le 24 février, plus 586 chars, 1693 blindés, 302 canons automoteurs, 54 lance-missiles, 95 lance-roquettes multiples, 1150 véhicules militaires, 66 drones et 7 navires. La journée est marquée par une troisième mission de ravitaillement ukrainienne vers Marioupol, la seconde ayant été effectuée quelques jours plus tôt par deux Mi-8 de la 12e OBrAA. Comme d’habitude, les hélicoptères volent tellement bas qu’il leur faut « sauter » de grands pylônes électriques en arrivant sur le bord de mer, mais cette fois ils doivent filer sur les vagues devant deux navires de guerre russes qui, heureusement, n’ouvrent pas le feu… Les appareils appartenant cette fois à la 16e OBrAA sont pilotés par le lieutenant-colonel Viatcheslav Voronyi et un officier nommé Vitaly Pleka ; ils amènent à Azovstal quatre tonnes de fret (armes, systèmes Starlink, analgésiques et antibiotiques) et reviennent à l’aube avec une quinzaine de blessés.
Le 28 mars, le Ministère de la Défense russe confirme que des avions de combat adverses apparaissent toujours dans les airs en annonçant la destruction de deux Su-24 à l’ouest de Korosten, dans la région de Jitomir, et celle d’un Su-25 près de Droujkivka, au nord de Donetsk. Des hélicoptères Mi-28N et Mi-28UB détruisent plusieurs blindés ukrainiens avec des missiles guidés à près de 5 km de distance, tandis que des bombardiers tactiques Su-34 frappent avec succès divers objectifs terrestres au cours de la nuit (quatre systèmes de missiles antiaériens, une station radar, deux entrepôts de munitions et trois de carburant, etc.).
La quatrième mission à réussir du pont aérien ukrainien vers Marioupol débute ce jour à 04h00. Conduite par deux Mi-8, elle amène un chargement composé de trois tonnes de médicaments, de munitions et de nourriture, mais aussi de seize parachutistes volontaires pour renforcer la garnison. Le site d’atterrissage n’est plus le même : prévu pour être Azovstal, il a dû être changé au dernier moment pour le port de Marioupol car l’usine vient d’être lourdement bombardée. Arrivés sur place peu après 05h00, les hélicoptères ne restent que sept minutes, un seul blessé léger prenant place à bord de l’appareil du commandant de la 11e OBrAA. Celui-ci a expliqué pourquoi au média d’information en ligne ukrainien LIGA.net : J’ai demandé : « Où sont les autres ? » et ils m’ont répondu : « Il n’y en a pas plus ». Plus tard, j’ai appris qu’en raison du changement de site de débarquement, les blessés devaient être transportés d’Azovstal jusqu’au port. Ils sont montés dans des bateaux et sont partis par la mer en direction du port. Mais ils n’ont pas pu s’éloigner de la côte, car les navires russes se tenaient à une distance de cinq à dix kilomètres. Du coup les bateaux se sont échoués et les blessés n’ont pas réussi à atteindre le port. Je ne connais pas leur sort.
Au retour, l’un des hélicoptères est cette fois détecté par les forces russes qui ouvrent le feu. Moscou revendique la chute de ce Mi-8 en mer d’Azov, à cinq kilomètres au large de Marioupol, mais il s’agit d’une affirmation erronée car les deux appareils sont bien revenus à leur base ; tout comme l’est l’autre revendication selon laquelle ces hélicoptères évacuaient les principaux commandants du régiment « Azov »… Par contre, il est clair que les troupes russes et celles des insurgés de la RPD sont désormais prévenues que leurs adversaires tentent de forcer le blocus par voie aérienne. Le lendemain 29, une nouvelle tentative échouera d’ailleurs en raison de violents tirs d’infanterie ; les hélicoptères devront rentrer à Dnipro avec des impacts de balles.
Le Ministère de la Défense de l’Ukraine affirme pour sa part que sa force aérienne a abattu huit avions plus trois hélicoptères dont on ne trouve aucune trace.
Le 29 mars, l’armée russe lance des frappes de missiles Kalibr sur la base de Starokostiantyniv, siège des Su-24 de la 7e BrTA et des drones armés Bayraktar TB2. En milieu de journée, le Ministre de la Défense russe Sergueï Choïgou déclare à l’agence TASS qu’il estime – manifestement de façon très optimiste – que 123 des 152 avions de combat ukrainiens ont été éliminés, ainsi que 77 des 149 hélicoptères. Constatant l’avancée des pourparlers
russo-ukrainiens qui se tiennent en parallèle à Istanbul, l’état-major russe décide d’entamer en gage de désescalade le retrait rapide de ses troupes des secteurs de Kiev et de Tchernihiv, c’est-à-dire du nord de l’Ukraine.
L’état-major ukrainien signale subir des frappes aériennes dans les secteurs de Kharkiv et du Donbass ; il affirmera dans la matinée du 30 avoir touché ou détruit douze avions et quatre hélicoptères dans les 48 heures précédentes, soit quatre avions et un hélicoptère dans la journée du 29… Encore une fois non vérifiables.
Au cours de la matinée du 30 mars, un Su-24M de la 7e BrTA est touché par la chasse russe près du village de Toumen, dans la région de Rivne à la frontière avec la Biélorussie. L’équipage tente de rejoindre sa base mais l’appareil trop endommagé s’écrase avant d’y parvenir, au seuil de la piste 27 de la base aérienne de réserve de Kanatovo, à Kropyvnytskyi. Le pilote était le colonel Maxim Sikalenko, commandant par intérim de la 7e BrTA ; le navigateur était le Major Konstantin Gorodnitchev, de nationalité russe, qui était demeuré en Ukraine après les combats du Donbass alors que ses propres parents avaient choisi de retourner en Russie…
Le MDU affirme que l’armée de l’Air ukrainienne a abattu quatre avions qu’on ne peut confirmer, contrairement à celle d’un hélicoptère du 332e OVP : frappé par un MANPADS, le Mi-28N RF-13628 « 65 rouge » s’écrase près du village d’Elitnoye, dans la région de Kharkiv, tuant son équipage composé du Major Artem Ogoltsov (pilote) et du capitaine Alexandre Prikhodko (navigateur).
Dans la journée du 31 mars, les forces russes entrent dans la ville d’Izioum, près de Kharkov, où les combats étaient acharnés depuis le 3 de ce mois. Malgré les alertes des 28 et 29 mars, les autorités ukrainiennes considèrent que le pont aérien vers Marioupol se déroule jusque-là de manière satisfaisante ; elles décident de frapper un grand coup en doublant les effectifs engagés pour la prochaine mission, de manière à livrer davantage de soldats en renfort ainsi qu’une équipe chirurgicale mobile. Cette mission comporte quatre Mi-8 des 11e et 16e brigades qui sont protégés par une « canonnière volante » Mi-24. Vers 05h00, les cinq appareils se posent les uns après les autres sur la jetée du port de Marioupol où les volontaires déchargent des médicaments et des munitions, mais aussi de nouvelles stations Starlink, avant d’aider à embarquer les blessés graves. Vingt d’entre eux prennent place à bord du Mi-8 du Major Yevgueny Soloviov, le commandant adjoint de la 11e OBrAA ; treize autres sont placés dans celui du Major Youri Tymous, de la 16e OBrAA. Leurs deux hélicoptères redécollent immédiatement, Soloviov en tête.
Quatre minutes après leur départ et alors qu’ils franchissent la côte, des traceuses encadrent subitement les Mi-8 par l’arrière. Un MANPADS frappe de plein fouet celui de Soloviov au niveau du moteur gauche, heureusement sans exploser. Bien que le pilote évolue à ce moment-là au ras du sol, il parvient à maîtriser sa machine et à rentrer sur un seul moteur à Dnipro au terme d’une heure et huit minutes de vol. Touché lui aussi, son ailier n’a pas sa chance : il s’écrase à proximité du hameau côtier de Rybats’ke (en russe Rybatskoye), deux kilomètres au sud-ouest du port de Marioupol. Les Ukrainiens ont subi le feu d’un détachement antiaérien de la milice populaire de la RPD commandé par le lieutenant Sviridenko, qui les a pris pour cible avec des missiles Stinger capturés peu auparavant. Les tireurs, le soldat Alexsandre Proskourine et le sergent-chef Andreï Lebedev [16], seront crédités de deux victoires, le second hélicoptère étant supposé avoir percuté en mer à une vingtaine de kilomètres de la côte avec une quinzaine de passagers.
[16] À cette date, ce duo est crédité depuis le 24 février 2022 de trois hélicoptères et cinq drones Bayraktar.
Leur victime est le Mi-8MTV « 653 » de la 16e OBrAA, dont les trois membres d’équipage sont tués : le pilote, le Major « Dmytro » Tymous, le navigateur, le lieutenant Denys Badika et le mécanicien, le lieutenant Ivan Vakhovsky. Le lieutenant du GUR qui maniait la mitrailleuse embarqué, Sergueï Babak, est fait prisonnier de même qu’un des blessés d’ « Azov » en cours d’évacuation, le soldat Dmitry Lobinski. Les quinze autres personnes à bord ne survivent pas au « crash ». Prévenus par radio de l’embuscade, les deux Mi-8 restants, qui commencent juste à charger des blessés, décollent en urgence tandis que le Mi-24 engage les troupes russes autour d’Azovstal pour les distraire. De l’atterrissage du premier appareil au décollage du dernier, moins de vingt minutes se sont écoulées… La seconde formation utilise un autre itinéraire pour rentrer, ce qui lui permet d’échapper aux tirs.
Profitant du retrait russe dans le nord et le nord-est de l’Ukraine, les troupes de Kiev reprennent le contrôle de quatre bases aériennes ainsi que de l’aéroport d’Hostomel. Fait rare, le Ministère de la Défense de l’Ukraine ne revendique en ce dernier jour du mois de mars aucune victoire aérienne !
Le président Vladimir Poutine confirme qu’il exigera dès le 1er avril le paiement du gaz russe en roubles, et non plus en dollars ou en euros, de la part des pays « inamicaux » de l’Union européenne [17]. Étant donné qu’il prévoie la suspension des contrats en cours si les pays concernés n’obtempèrent pas, une crise économique majeure est peut-être sur le point d’éclater ; elle pourrait très vite se doubler d’une crise alimentaire au vu de la quantité de céréales importée de Russie et d’Ukraine par l’UE.
[17] Rappelons que 48,4% des importations de l’UE en gaz proviennent de Russie, ainsi que 25,4% de celles en pétrole.
Vitaly Pleka est un des pilotes de la 16e OBrAA qui a réussi un aller-retour vers Marioupol, probablement le 27 mars 2022. Le Mi-8 MTV-2 à bord duquel il a été photo-graphié en 2023 porte l’insigne de sa brigade, « Mad Ducks Cavalry », en hommage à la cavalerie aéromobile américaine. Pleka est décédé le 18 mars 2024, son Mi-24 ayant été abattu la veille dans l’oblast de Soumy par un MANPADS 9K333 Verba.
Deux vues tirées d’un reportage officiel russe qui montre une mission « anti-véhicules » d’hélicoptères d’attaque Mi-28. Le premier est un Mi-28UB reconnaissable à son radome, le second un Mi-28N qui porte le Z des unités opérant sur les fronts Est ou Sud. – 1
Deux vues tirées d’un reportage officiel russe qui montre une mission « anti-véhicules » d’hélicoptères d’attaque Mi-28. Le premier est un Mi-28UB reconnaissable à son radome, le second un Mi-28N qui porte le Z des unités opérant sur les fronts Est ou Sud. – 2
Un BMP-3 de la milice populaire de la RPD entrant dans Marioupol fin mars 2022. Ce blindé transporte sept fantassins en plus de son équipage de trois hommes ; il est lourdement armé d’un canon de 100 mm, d’un autre de 30 mm et de trois mitrailleuses de 7,62 mm.
Un Mi-8MSB-V de la 10e MABr, basée en temps de paix à Koulbakino.
La 7e BrTA, dont on voit ici le Su-24MR « 60 jaune » à Koulbakino en 2019, perd un de ses appareils en combat aérien le 30 mars 2022.
Ce Su-24M de la 7e BrTA, touché par un chasseur russe le 30 mars 2022, s’écrasera peu après dans la région de Rivne proche de la Biélorussie.
Le Mi-28N RF-13628 « 65 rouge » photographié avant-guerre.
Les restes du Mi-28N « 65 rouge », abattu par un missile sol-air portatif près de Kharkiv le 30 mars 2022. – 1
Les restes du Mi-28N « 65 rouge », abattu par un missile sol-air portatif près de Kharkiv le 30 mars 2022. – 2
Les restes du Mi-28N « 65 rouge », abattu par un missile sol-air portatif près de Kharkiv le 30 mars 2022. – 3
Les restes du Mi-28N « 65 rouge », abattu par un missile sol-air portatif près de Kharkiv le 30 mars 2022. – 4
Fortement armé et disposant d’une cabine blindée, un hélicoptère d’attaque Mi-24 est utilisé pour escorter les quatre Mi-8 ukrainiens engagés le 31 mars 2022 sur Marioupol.
Un des Mi-8 du pont aérien posés sur le port de Marioupol fin mars 2022.
Un Mi-8MT ukrainien effectuant une évacuation.
Le moteur gauche du Mi-8 de la 11e OBrAA piloté par le Maj Yevgueny Soloviov a été transpercé par un MANPADS.
Les débris du Mi-8MTV « 653 » (n/c 93566) de la 16e OBrAA abattu par les forces de la RPD au retour de Marioupol le 31 mars 2022. Cet appareil portait lui aussi sur la queue la marque de reconnaissance ЗА БАБУ ВЕРУ (« Pour grand-mère Vera »). – 1
Les débris du Mi-8MTV « 653 » (n/c 93566) de la 16e OBrAA abattu par les forces de la RPD au retour de Marioupol le 31 mars 2022. Cet appareil portait lui aussi sur la queue la marque de reconnaissance ЗА БАБУ ВЕРУ (« Pour grand-mère Vera »). – 2
Les débris du Mi-8MTV « 653 » (n/c 93566) de la 16e OBrAA abattu par les forces de la RPD au retour de Marioupol le 31 mars 2022. Cet appareil portait lui aussi sur la queue la marque de reconnaissance ЗА БАБУ ВЕРУ (« Pour grand-mère Vera »). – 3
Les débris du Mi-8MTV « 653 » (n/c 93566) de la 16e OBrAA abattu par les forces de la RPD au retour de Marioupol le 31 mars 2022. Cet appareil portait lui aussi sur la queue la marque de reconnaissance ЗА БАБУ ВЕРУ (« Pour grand-mère Vera »). – 4
Le Maj Youri « Dmytro » Tymous, de la 16e OBrAA, abattu le 31 mars 2022 quelques minutes seulement après avoir redécollé de Marioupol.
Les Ka-52 « 42 blanc » et « 44 blanc » de l’aviation de la Marine russe.
Le meilleur chasseur russe – et sans doute le meilleur au monde – est actuellement le Soukhoï Su-35S. Considéré comme un véritable « épouvantail », il n’a jusqu’à la fin mars 2022 subi aucune perte malgré de régulières revendications ukrainiennes. Ses pilotes ont par contre rempor-té une dizaine de victoires aériennes que l’on peut confirmer de sources indépendantes.
Ce système de défense antiaérien russe Pantsir-S1, monté sur un camion Kamaz 6560, arbore après cinq semaines de combat en Ukraine huit étoiles pour autant de victoires revendiquées (sept avions et un hélicoptère). Le Pantsir est composé de deux éléments, douze tubes lance-missiles et deux canons de 30 mm.
Conclusion (provisoire)
À l’heure où j’écris ces lignes, le 31 mars 2022 au soir, que peut-on tirer comme enseignements de la guerre en Ukraine ? « Invasion totale marquée par de multiples crimes contre l’humanité » pour les uns, « opération militaire spéciale pour imposer la paix dans le Donbass » pour les autres, ce conflit a vu pour la première fois la Russie utiliser sur une grande échelle et avec un certain succès des missiles de croisière de haute précision de type Kh-101 et Kalibr, ainsi que des missiles hypersoniques Kinjal. D’un point de vue strictement aéronautique, on a pu constater dans chaque camp l’efficacité redoutable des missiles sol-air portatifs à guidage thermique contre les appareils volant lentement et près du sol, comme les hélicoptères ou les Soukhoï Su-25. Du côté de la force aérienne russe, la perte de plusieurs Su-30SM et Su-34 chargés de bombes classiques (généralement des OFZAB-500 de 500 kg, souvent couplées de missiles air-sol Kh-29T) met en lumière un manque criant de moyens de guidage télévisés ou lasers pour la détection et la désignation des cibles, contrairement aux principales forces de combat occidentales. L’emploi de munitions à guidage de précision – bombes guidées ou missiles – leur aurait permis d’opérer à 6000 ou 7000 mètres d’altitude, c’est-à-dire hors d’atteinte de l’artillerie légère, des systèmes de défense aérienne à courte portée et des MANPADS… La chasse russe semble en revanche s’être montrée efficace puisqu’elle a revendiqué une vingtaine de victoires aériennes, pour la plupart des chasseurs Su-27 et MiG-29 ukrainiens, dont au moins douze sont certaines. Les Ukrainiens réclament de leur côté une dizaine de victoires aériennes mais aucune ne peut être vérifiée, à l’image de 60 à 80% de leurs revendications… Il est par contre à peu près sûr qu’après cinq semaines de combats acharnés l’armée de l’Air ukrainienne a les reins brisés.
D’un point de vue géostratégique, ce gâchis humain aurait pu être évité si l’Ukraine avait respecté les accords de Minsk et surtout si elle avait accepté ce que réclamait la Russie depuis des années : devenir un état neutre comme les huit autres pays européens qui s’en portent très bien (Irlande, Suède, Finlande, Autriche, Suisse, Liechtenstein, Moldavie, Malte)… La poursuite des opérations militaires verra vraisemblablement la Russie s’emparer du port stratégique de Marioupol ainsi que de l’ensemble du Donbass, car malgré sa résistance jusqu’ici impressionnante l’Ukraine n’a pas les moyens de faire une guerre d’usure contrairement à son adversaire. Vladimir Poutine voudra-t-il poursuivre son avancée dans le Sud jusqu’à couper totalement l’accès de l’Ukraine à la Mer Noire, ou se contentera-t-il de fermer la Mer d’Azov ? Nul ne le sait. Mais ne soyez pas étonnés si une quelconque « République populaire de Kherson » favorable à Moscou venait à se créer dans les temps à venir ! La sécurisation d’une des rives du Dniepr est en effet la meilleure façon de garantir l’approvisionnement en eau de la Crimée. Il est même possible que l’objectif final soit de s’emparer de tout l’est de l’Ukraine, depuis Kharkiv (la deuxième ville du pays) jusqu’à la Mer Noire. Malheureusement et selon la célèbre formule du théoricien militaire Carl von Clausewitz, la guerre est une simple continuation de la politique par d’autres moyens.
La Russie n’a pas réussi à renverser le gouvernement ukrainien en place – si tant est que cela ait fait partie de ses plans – mais elle demeure en position de force sur le terrain. Souhaitons pour les populations civiles locales, qu’elles soient de langues ukrainienne ou russe, que les négociations de paix aboutissent rapidement. L’Ukraine ne pourra qu’en sortir exsangue, amputée de larges portions de son territoire et contrainte à la neutralité ; l’Europe sera affaiblie et la Russie définitivement arrimée à la Chine. Tout ça pour ça ! Le centre politique et économique de la planète est aujourd’hui en train de basculer irrémédiablement vers l’Est, la Chine et l’Inde. Les nations occidentales (Europe, Amérique du Nord, Japon, Australie) ne représentent plus que 11% de la population mondiale mais elles consomment pourtant 70% des ressources et dépensent les trois-quarts du budget militaire cumulé. Les autres nations, soit 89% de la population terrestre, souhaitent continuer à commercer avec ce grand exportateur de matières premières qu’est la Russie. Le déclin du monde occidental ne vient-il pas de débuter avec cette guerre ?
FIN
Je dédie cet article à mon camarade Frédéric Stahl, rédacteur en chef de la revue Navires & Histoire, qui aurait tant voulu pouvoir traiter de cette actualité brûlante en révélant, comme il aimait le faire, le dessous des cartes…
3ème et dernière partie de l’article consacré à Pierre Le Gloan
Je rappelle que cet article est publié avec l’aimable autorisation de David MECHIN son auteur et journaliste au “Fana de l’Aviation”. Vous pouvez également visionner sur le même sujet la vidéo https://youtu.be/QLlkOBY_RCg?si=JjqKu7Xp5HYzQCEJ
Retour en Afrique du Nord
Suite à la campagne de Syrie, le GC III/6 reprend sa place sur le terrain d’Alger-Maison Blanche le 16 juillet 1941. L’activité aérienne va retomber à un niveau très bas imposé par la commission d’armistice, ponctuée par de rares alertes contre des appareils britanniques s’aventurant un peu trop près des côtes. Les Dewoitine du groupe reçoivent alors les nouveaux marquages imposés par la commission d’armistice, des bandes rouges et jaunes sur les capots-moteur et partie arrière du fuselage, que nombre de pilotes surnomment « livrée d’esclave ».
Tous les pilotes vétérans de la campagne de Syrie vont recevoir les honneurs de la part du gouvernement de Vichy qui distribue de nouvelles citations. Le Gloan reçoit l’homologation de ses sept victoires aériennes qui lui valent quatre palmes et une étoile de vermeil supplémentaires sur sa croix de guerre, ainsi qu’une promotion à titre exceptionnel au grade de lieutenant (effective le 9 septembre 1941).
Ces décorations lui seront remises lors d’une cérémonie présidée par le général Weygand (délégué général du gouvernement en Afrique du Nord) sur le terrain d’Alger-Maison blanche le 27 juillet 1941, et dans laquelle l’ensemble du groupe est décoré. Cependant, en tant qu’as de l’unité, les photographes du Service de Presse des armées s’attardent sur lui et la presse vichyste va le signaler en tant que nouvel « as des as » de l’aviation française, ayant, avec 18 victoires homologuées (ou 21 si l’on y ajoute les succès non-homologués), dépassé le score du capitaine Edmond Marin la Meslée.
Cette information aura cependant une diffusion assez limitée du fait de l’occupation de la France. Pas un mot dans les journaux paraissant en zone nord sous le contrôle de l’occupant tels que « L’œuvre » ou « Le Matin ». Certains titres de la zone sud, tels que « Le journal » (replié à Lyon) ou « Le journal desdébats » mentionnent de leur côté la cérémonie avec le nom de Pierre Le Gloan dans de discrets articles en pages intérieures. C’est cependant la presse d’Afrique du Nord, et tout particulièrement le quotidien « L’écho d’Alger », qui va se montrer le plus prolixe avec un article détaillé de la cérémonie et avec une photo de l’as recevant sa décoration figurant en une du journal.
Il sera d’ailleurs mentionné dans plusieurs autres articles du même quotidien. Devenu le porte-drapeau de l’aviation française, le lieutenant Pierre Le Gloan va être de toutes les cérémonies militaires organisées à Alger en l’honneur de l’arrivée en Afrique du Nord de tel ou tel notable vichyste – c’est notamment le cas le 9 novembre 1941 pour le défilé organisé pour le centenaire des Tirailleurs et Spahis Algériens, la venue du ministre de l’Intérieur Pierre Pucheu le 1er mars 1942, ainsi que l’arrivée à Alger de l’amiral Darlan le 29 octobre 1942.
Le régime de Vichy vit à ce moment ses derniers jours en Afrique du Nord : durant la nuit du 7 au 8 novembre 1942, débarquent les troupes américaines lors de l’opération Torch. Si celles-ci se heurtent à une vive résistance à Casablanca ainsi qu’à Oran, la situation est différente à Alger où s’est organisé un groupe de résistants menés par le jeune José Aboulker (étudiant en médecine), l’industriel Roger Caracassonne ainsi que les officiers du 2e bureau de l’armée d’armistice, le colonel Germain Jousse et le lieutenant Henri d’Astier de la Vigerie. Ils ont pu négocier clandestinement avec les autorités américaines au mois d’octobre précédent dans une villa de Cherchell et vont ainsi préparer une prise de contrôle d’Alger. Rassemblant un groupe de 400 résistants, ils réussissent à prendre possession de tous les lieux stratégiques de la ville durant la nuit (dont le central téléphonique) et d’assigner à résidence le général Juin et l’Amiral Darlan, prisonniers de leurs villas. Quand les autorités militaires de Vichy parviennent à reprendre le contrôle de la ville, il est déjà trop tard car les troupes américaines ont pu solidement prendre position tout autour d’Alger, et ce sans combats d’importance. Sur l’aérodrome d’Alger – Maison blanche, le GC III/6 a été placé en « super alerte » dès le début du mois de novembre, prêt à faire décoller 9 avions, car a été signalé un très gros convoi naval anglais en Méditerranée. Durant la nuit du 7 au 8, seule la 6e escadrille est d’alerte et le lieutenant Le Gloan, appartenant à la 5e, est par conséquent probablement en ville avec sa fiancée… Des coups de canons sont entendus durant la nuit sans que personne ne puisse s’informer car le téléphone est coupé. Ce n’est que vers quatre heures du matin que le capitaine Léon Richard, le chef de la 6e escadrille, réunit ses pilotes pour les informer que les anglo-américains débarquent en Afrique du Nord. Les pilotes s’apprêtent à décoller mais une brume à couper au couteau tombe sur l’aérodrome au lever du jour. Ceux qui n’étaient pas d’alerte arrivent d’Alger à pied, en vélo ou même en voiture et apprennent à leurs camarades que des soldats américains sont tout autour du terrain et sont plutôt amicaux car ils les ont laissé passer ! Ces derniers prendront possession de la base sans tirer un coup de feu et nombre d’avions américains et britanniques vont s’y poser dans la journée. Le 12 novembre 1942, l’amiral François Darlan, qui a pris le commandement de l’ensemble des forces françaises d’Afrique du Nord, ordonne un cessez-le-feu général.
Le réarmement
Darlan engage l’armée d’Afrique aux côtés des alliés et prétend gouverner « au nom du Maréchal » qu’il considère prisonnier des Allemands. Il maintient toutes les lois de Vichy en Afrique du Nord… Mais les résistants locaux n’entendent pas de cette oreille laisser la France devenir une sorte de dictature franquiste : Darlan est assassiné le 24 décembre 1942 et lui succède le général Giraud. Dès le mois de janvier 1943 il rencontre le général De Gaulle à l’instigation des Américains et britanniques pour tenter de fusionner les deux gouvernements français en lutte contre l’Allemagne. Ce sera effectif le 3 juin 1943 par la création du Comité Français de Libération Nationale coprésidé par Giraud et De Gaulle. Mais Giraud, apparaissant trop lié à Vichy aux yeux de nombre de résistants, en sera progressivement évincé par De Gaulle qui se montre nettement plus fin politique que ce dernier.
Nombre de combattants de l’armée d’Afrique, qui ont le 8 novembre 1942 reçu l’ordre de tirer contre les Américains, puis quatre jours plus tard de se rallier à eux, sont pour le moins déboussolés par ces changements d’alliance et de régime. Le GC III/6 l’est également : il est prié dès le 11 novembre 1942 de quitter Alger-Maison blanche pour laisser la place aux appareils alliés. Le journal de marche de sa 6e escadrille indique alors : « Nous déménageons à Oued-Semar [à 2 km du terrain d’Alger, NdA], dans les baraques de parachutistes. Et là, à moitié planqués, nous nous demandons ce que l’on va faire de nous. Le Général Giraud prend le commandement de l’armée d’Afrique. Après nous avoir laissé entendre qu’il ne faut pas être avec lui, on nous apprend qu’il devient notre chef. On ne sait plus que penser. Nous retournons notre veste une fois de plus. Evidemment les évènements nous y forcent. Mais notre désarroi est bien grand. » Après quelques mois de contacts avec les Anglais et Américains, le même rédacteur indique quelques lignes plus loin que « On a vite oublié le 8 novembre. Il est vrai que maintenant l’avenir est sous un jour nouveau. La vieille haine anti germanique commence à souder, et reprend le dessus. Il s’agit de faire partir de France ceux qui s’y trouvent actuellement et qui font souffrir quarante millions de français. Une politique positiviste, arriviste en somme, remplace la politique attentiste. Nous verrons bien. » L’espoir du groupe est de reprendre la lutte contre l’Allemagne, mais les vieux Dewoitine 520 sont maintenant à bout de souffle et soutiennent difficilement la comparaison avec les appareils ennemis, même s’ils peuvent encore servir à l’entraînement qui reprend d’ailleurs immédiatement sans limitation des vols.
Le rééquipement sur du matériel moderne va venir des alliés américains et britanniques, les bases en sont d’ailleurs posées lors de la conférence d’Anfa du mois de janvier 1943. Mais avant même que ne se tiennent les pourparlers, les Américains rééquipent immédiatement, à titre symbolique, un premier groupe de chasse sur Curtiss P-40. Il s’agit du GC II/5 dont l’insigne d’une des escadrilles n’est autre que la tête d’indien Séminole, qui en 1917 était celle de l’escadrille Lafayette qu’avait à l’époque dessinée le sergent Harold Willis. En novembre 1942 il est colonel à l’état-major du général Eisenhower et retrouve avec surprise sa création d’il y a vingt-cinq ans sur les P-36 survivants du GC III/5 : il fait alors en sorte que « son » escadrille soit réarmée dans les plus brefs délais. Les choses ne traînent pas et le 9 janvier 1943 une cérémonie, dûment filmée et photographiée par les services de presse alliés, a lieu sur le terrain d’Alger-Maison blanche où les Curtiss P-40 repeints avec des cocardes françaises sont donnés aux pilotes du GC II/5 que dirige le commandant Constantin Rozanoff. Assiste à la cérémonie le lieutenant Pierre Le Gloan, en tant que porte-drapeau de l’aviation française, mais qui à titre privé est probablement très intéressé car, quelques semaines plus tôt, il a été le premier pilote de son groupe à tester un appareil américain, un chasseur P-38, sur le terrain de Nouvion (actuellement El Ghomri, près d’Oran) même si le stage a été écourté en raison des intempéries. Il repartira d’ailleurs à Biskra le 16 janvier 1943 pour un second stage.
C’est durant le premier semestre de l’année 1943 que va s’opérer le réentrainement et la transformation sur matériel moderne du GC III/6 qui s’installe le 10 janvier sur le terrain d’Ain Sefra, aux confins du Sahara près de la frontière marocaine. C’est là qu’il participe sur ses Dewoitine à des exercices avec deux groupes de bombardement qui ont lieu dans le désert, à Colomb Béchar, au mois de mars. Le 20 avril, les pilotes partent par roulement sur le terrain de Berrchid, au Maroc (près de Casablanca), pour se familiariser au pilotage de leur nouvel avion d’armes, le Bell P-39 N « Airacobra ». Les avis des pilotes sont manifestement partagés (Voir Fana n°552 à 554) mais, selon le journal de marche de la 6e escadrille qui est assez détaillé, le lieutenant Pierre Le Gloan en revient « très content » et plutôt satisfait de sa nouvelle monture.
Les P-39 destinés au groupe sont livrés en caisse à Alger le 30 avril 1943. Promptement remontés par les mécaniciens, ils sont convoyés par les pilotes à partir du 1er mai vers le terrain d’Ain Sefra. 26 Airacobra sont ainsi alignés par le GC III/6 le 18 mai 1943 et l’entrainement sur le nouvel appareil commence, pour vite débuter par des deuils. Le 26 mai 1943, Le Gloan réalise un exercice de combat simulé avec le capitaine Léon Richard, le chef de la 6e escadrille et autre « as » de la campagne de Syrie où il a ramené 6 victoires aériennes, plus une autre obtenue contre un avion britannique au large des côtes d’Afrique du nord. L’exercice débute à l’aube, avec Le Gloan sur Dewoitine, et Richard sur P-39. Les deux pilotes repartent à 10 heures pour un second vol en ayant changé d’appareil. Le Gloan, notant qu’il n’a plus que 5 gallons d’essence, rentre se poser à 11 heures. Le Dewoitine de Richard ne rentrera pas et sera retrouvé écrasé au sud du terrain dans l’après-midi : l’enquête conclura à une panne d’essence.
Décrit comme bouleversé par ce drame, Pierre Le Gloan suit ensuite son groupe qui s’installe le 18 juin à Berkane sur la côte méditerranéenne du Maroc, près de la frontière avec l’Algérie, pour y poursuivre son entraînement. Il y bénéficie d’une permission pour aller se marier le 2 juillet 1943 à Alger avec sa fiancée Mirelle Fischer. L’as des as de l’aviation française d’Afrique du Nord est une personnalité suffisamment médiatique pour que l’écho d’Alger signale le mariage sur sa première page et félicite les deux époux… Au GC III/6, un nouveau drame survient le 17 juillet quand l’adjudant Loï se tue en sautant de son Airacobra parti en ville et dont l’empennage accroche le parachute du pilote.
Le 4 août 1943, le GC III/6 s’installe sur le terrain de Lapasset en Algérie, à 60 km à l’est d’Oran, pour y débuter sa nouvelle vie opérationnelle dans le Coastal Command de l’aviation alliée consistant à effectuer des patrouilles côtières pour y protéger les convois de ravitaillement. Le groupe est réorganisé à l’américaine, avec l’ajout d’une 3e escadrille qui, à la demande du général Gama, inspecteur de la chasse, reprend les traditions de la SPA 84 dont l’insigne est une tête de renard portant un monocle. Le commandement de cette escadrille est confié le 11 août au lieutenant Pierre Le Gloan mais aucune photo connue ne permet d’affirmer si son appareil sera décoré du nouvel insigne. Il réalise néanmoins un vol notable le 14 août en participant à l’escorte d’un convoi entre Tenès et Le Chelif dont il revient se poser de de nuit à sa base.
Les missions d’escorte de convois se poursuivent et Lapasset, qui a déjà reçu la visite du général Giraud le 13 août, va recevoir celle du général De Gaulle le 22 du mois, qui demande à ce que lui soient présentés tous les pilotes, « ce qui est fait » note le journal de marche de la 5e escadrille. Pierre Le Gloan serre alors la main ce celui qui à cette époque a de fait pris la direction du CFLN. Le 5 septembre 1943, la Luftwaffe montre timidement le bout de son nez car des P-39 décollent sur alerte à la poursuite d’un bombardier allemand signalé mais qui ne peut être retrouvé. La reprise des combats s’annonce, d’autant plus que deux jours plus tôt est parvenue la nouvelle du débarquement des Alliés en Italie du sud ce qui enthousiasme le rédacteur du journal de la 6e escadrille, qui rappelle les exploits du Groupe contre les Italiens en 1940 et écrit : « vivement qu’on appelle le 3/6 en renfort car c’est un spécialiste de la question. »
Accident mortel sur P-39.
Malheureusement le destin en décidera autrement pour Pierre Le Gloan. Les moteurs Allison des P-39, que les pilotes ont refusé de faire équiper de filtres à sable pour préserver leur vitesse, connaissent de nombreuses pannes dont l’une va causer la perte de l’as de l’aviation d’Afrique. Le 11 septembre 1943 Pierre Le Gloan décolle à 7h45 à bord du P.39 N n°429.421 pour relever une patrouille envoyée en mission de protection de convoi. Le plafond nuageux est bas et la mer bouchée par la brume. Il vole à 600 m d’altitude et se trouve à 3 km à l’ONO de Ouillis (NE de Mostaganem) quand survient une panne à 7h53, ainsi relatée par son équipier le sergent Colcomb : « A 7h55, le sergent Colcomb voit des trainées de liquide noir s’échapper sur le côté du moteur du lieutenant Le Gloan. Il prévient celui-ci par radio à deux reprises. Réponse : « Bien compris ». Aussitôt après le lieutenant Le Gloan effectue un virage de 180° à gauche, pour revenir au terrain de Lapasset, en perdant un peu d’altitude. Sitôt le virage terminé, il largue sa porte de cabine et incline son avion à droite, comme pour se jeter en parachute. Puis en perdant beaucoup d’altitude, pour se poser train rentré dans un champ planté de vignes. Il ne largue pas son réservoir supplémentaire. Il touche le sol ayant presque fini de redresser son virage, d’abord légèrement du plan gauche, puis du réservoir supplémentaire, qui est rapidement arraché et fait explosion. L’avion rebondit et va s’écraser dans un treillis constitué par de petits arbres de 3 à 4 cm de diamètre, où il fait une trouée de 100 mètres environ. Une deuxième explosion se produit, suivie de l’incendie de l’avion et des arbres environnants. L’accident s’est produit dix minutes après le décollage. »
Postérité et controverse post-mortem
La nouvelle de sa disparition en service commandé fait l’objet d’un article en première page de l’Echo d’Alger le 15 septembre 1943. Il reçoit une ultime citation à l’ordre de l’aviation française qui indique « Officier alliant les plus belles vertus militaires aux dons les plus exceptionnels de chasseur. Aussi heureux dans le combat que modeste après la victoire, s’est couvert de gloire, dès le début de la guerre, en abattant, seul, cinq avions ennemis au cours du même vol. A remporté au total 21 victoires dont 18 homologuées et 16 en combat singulier. 11 citations dont 10 à l’ordre de l’armée. Est tombé à son poste le 11 septembre 1943, à la date et à l’heure anniversaire de la mort de Guynemer. Leur souvenir restera indissolublement lié dans la légende des ailes françaises. » Plusieurs personnalités civiles et militaires, françaises comme alliées, assistent à la messe donnée en sa mémoire à la cathédrale d’Alger le 25 octobre 1943, dont le général Chambe, chef du cabinet militaire du général Giraud. Ses restes seront inhumés après la guerre le 7 octobre 1950 à Plouguernével, tout près de sa commune natale de Kergrist-Moëlou qui baptisera une de ses rues de son nom au mois d’août 2003, soit soixante ans après sa mort.
Car l’oubli a bien vite recouvert sa tombe immédiatement après sa disparition, un oubli favorisé par l’ombre infamante du régime de Vichy qui a engagé des soldats français dans une quasi-cobelligérance aux côtés des forces de l’axe lors des évènements du Levant en 1941. Un voile pudique a recouvert ces évènements à tel point que l’historique du GC III/6 rédigé sur la campagne de Syrie porte la sévère mise en garde que ce document « est à conserver jusqu’à nouvel ordre comme un document confidentiel qui ne sera pas diffusé et ne devra sous aucun prétexte sortir des archives. Tout manquement à cette prescription sera sanctionné sévèrement. » Seul l’as de 14-18 Marcel Coadou, solidarité bretonne oblige, signe en 1948 sous son surnom de guerre de Judex dans le journal local « la Gazette de Provence » un court article relatant les exploits de Pierre Le Gloan sans mentionner l’épisode de la Syrie. Ce n’est qu’en 1987 que l’ouvrage des historiens Christian-Jacques Ehrengardt et Christopher Shores, « L’aviation de Vichy au combat » (Ed. Lavauzelle) décrit en détail du point de vue purement factuel cet épisode tragique de la guerre. L’historien Patrick Facon écrira dans plusieurs publications parues durant les années 1980, et notamment la revue « Airfan » de mars 1984, que « La propagande faite par la presse française – dont des journaux extrémistes comme Gringoire -, de même que son refus de rallier la France Libre après la fin de la Campagne du Levant valurent à I’as de 1940 de très nombreuses inimitiés au sein des milieux proches du général de Gaulle. »
Cette inimitié est bien réelle : Une publication de la France Libre en Amérique du Sud, « La France Nouvelle » éditée à Buenos Aires, publie le 8 août 1943 un article d’un sympathisant gaulliste qui décrit le réarmement de l’ancienne armée de l’air d’armistice en ces termes : « Le capitaine d’Artois me parle d’un projet spectaculaire que les Américains étudient : la constitution d’une escadrille Lafayette qui ira se battre immédiatement en Tunisie aux côtés des alliés. Le côté comique de l’histoire, me dit-il, c’est que pour faire partie de cette formation nous allons devoir, au commandement supérieur de l’air, désigner nos meilleurs pilotes et que nos meilleurs pilotes – les Le Gloan, les Marin la Meslée – sont tout justement les vétérans de la campagne de Syrie et les plus férocement anti-alliés. Ça promet. Ça a tenu. »
On ne peut faire le procès à Pierre Le Gloan de ne pas avoir rallié la France Libre après la campagne de Syrie dans la mesure où absolument aucun pilote de l’aviation d’armistice ayant participé aux combats ne l’a fait : Mers El Kébir et cinq semaines de durs combats ont assurément causé un fossé durable contre les alliés britanniques d’hier, et les Français libre perçus comme leurs affiliés. Mais il faut également noter qu’il n’y a eu que très peu de publicité sur les exploits de l’as de l’aviation d’armistice pour en faire une sorte de porte-drapeau – et tout particulièrement aucune mention de son nom dans les colonnes de la presse collaborationniste la plus extrémiste, y compris le journal Gringoire que l’on peut lire sur le site Gallica.
Il faut cependant reconnaître que Pierre Le Gloan reste un mystère dans la mesure où aucun document écrit de sa main ne semble exister, ni de témoignage détaillé issu d’un de ses proches, et qui permette de comprendre clairement son état d’esprit. Cependant, les quelques témoignages d’acteurs qui l’ont brièvement côtoyé et qui ont été cités dans cet article semblent montrer qu’il s’est au moins posé des questions sur le départ en dissidence. Sa renommée, assez limitée, semble avoir été plus subie que voulue car il n’a fait aucune déclaration connue sur ses combats. Il n’y a de plus aucune preuve montant de sa part une approbation au régime de Vichy, alors que plusieurs signaux montrent sa motivation à reprendre la lutte après le débarquement des Américains en Algérie. De ce fait, les quelques lignes écrites par le lieutenant Nicolas, officier mécanicien du GC III/6 de 1940 à 1943, semblent en dresser le portrait le plus juste en signalant qu’il « a laissé le souvenir d’un grand gaillard, ouvert, simple, conscient de sa valeur et sachant l’affirmer, sans pour autant devenir prétentieux. Il aimait le travail sérieux, bien fait. » De ce qui précède, et sous réserve de tout document prouvant le contraire, il apparaît que Pierre Le Gloan, de facto présenté comme « l’as de Vichy », n’ait été qu’un « as sous Vichy », un simple technicien particulièrement doué, qui comme nombre de pilotes de l’armée de l’air d’armistice a obéi à des ordres sur lesquels il n’avait que peu de prise. Comme l’ont été plusieurs de ses camarades qui ont combattu durant campagne de Syrie mais avec des résultats plus modestes, tels que Jacques André, Léon Cuffaut ou Gabriel Mertzisen, et qui n’ont pas hésité plus tard à se porter volontaires pour combattre et se distinguer en Russie dans le régiment de chasse Normandie-Niemen.
Pierre Le Gloan, en tenue de cérémonie et toutes décorations dehors, pose après la campagne de Syrie devant son nouveau Dewoitine 520 personnel (n°300), qui porte les couleurs réglementaires de l’armée de l’air d’armistice imposées par l’Allemagne – les bandes jaunes et rouges sur le capot-moteur et la partie arrière de l’appareil, que les pilotes surnomment « livrée d’esclave ».
Vue en gros plan de l’insigne de la 5e escadrille du GC III/6, le masque sévère.
Nommé lieutenant après la campagne de Syrie, Pierre Le Gloan dont la croix de guerre comporte 10 palmes pose devant un Dewoitine 520 en compagnie du commandant Raymond Destaillac qui a pris en janvier 1942 le commandement du GC III/6. Les deux hommes se connaissent bien et s’apprécient : alors simple lieutenant, Destaillac était dans les années 1930 le chef d’escadrille de Le Gloan et lui a porté des notations très élogieuses.
Le 9 janvier 1943, une cérémonie a lieu à Alger-Maison blanche à l’occasion du réarmement du premier groupe de chasse français, le GC II/5 qui reçoit des Curtiss P-40. Pierre Le Gloan, alors as des as de l’armée de l’air issue de l’aviation d’armistice avec ses 18 victoires homologuées (Jean Demozay, issu des FAFL, en a 19), assiste à la cérémonie en tant que porte-drapeau. (US Nara)
L’air pensif et cigarette aux lèvres, Pierre Le Gloan côtoie les pilotes du GC II/5 devant leurs nouveaux P-40 dont celui baptisé « Diou Biban », attribué au lieutenant André Legrand (9 victoires).
Poignée de mains entre les généraux Giraud et De Gaulle, devant un Lockheed Lodestar des lignes aériennes militaires. La période du réarmement de l’aviation française d’Afrique du Nord, durant la première partie de l’année 1943, s’effectue alors qu’une dure guerre politique se livre entre les deux généraux : le second, bien plus fin politique, parviendra à évincer le premier et devenir le seul chef du Comité Français de Libération Nationale à l’été 1943.
Photographié à Meknès en 1946, ce P-39 N est néanmoins très intéressant car il porte le numéro de série des premiers appareils affectés au GC III/6 au printemps de 1943.
Le lieutenant Pierre Le Gloan, photographié en 1943 en compagnie de pilotes américains.
P-39 Airacobra français en patrouille de Coastal Command le long des côtes d’Afrique du Nord en 1943. Ici, des appareils du GC I/5. On note le « Belly tank », réservoir largable qui causera la perte de Pierre Le Gloan.
Poste de pilotage du P-39 accessible par une porte latérale, ce qui fait sourire bien des pilotes français disant avoir l’impression de monter dans une Peugeot 402. Le pilotage de l’appareil s’avérera malheureusement autrement plus dangereux que celui de la célèbre voiture.
Mécaniciens français s’afférant sur un P-39 Airacobra. Le GC III/6 connaîtra de nombreuses difficultés mécaniques sur cet appareil, causant plusieurs accidents mortels, dont celui de Pierre Le Gloan le 11 septembre 1943.
Dewoitine 520 n°300 du lieutenant Pierre Le Gloan, GC III/6, Alger-Maison Blanche en 1942.
Bell P-39 N (n°29241) du lieutenant Pierre Le Gloan, chef de la 3e escadrille du GC III/6, Lapasset, septembre 1943. Ce profil est spéculatif et seul le numéro de série est certifié. Selon des rares photos des P-39 du groupe à cette époque, les insignes d’escadrille, qui seront dessinés sur la portière du pilote, n’étaient pas encore peints. Le numéro tactique n’est qu’hypothétique et est supposé correspondre au premier appareil de la 3e escadrille.